Après des semaines de flou, le Printemps marseillais a enfin désigné ses têtes de listes. L’occasion de faire un tour d’horizon des forces en présence de tous les partis qui se présentent dans la deuxième ville de France pour le scrutin de mars 2020. Entre cohésion, défections et ralliements.
C’est, symboliquement, sous le balcon de l’Hôtel de Ville, que le Printemps Marseillais a décidé de dévoiler ses huit têtes de liste pour les municipales, il y a quelques jours. « Enfin », pouvait-on entendre dans la petite assemblée de soutiens aux candidats, enthousiastes. « Cela a pris un peu de temps, car si seul on va plus vite, ensemble on va plus loin, et nous sommes déterminés à gagner », a lancé à cette occasion, Michèle Rubirola, désignée début janvier par ce mouvement composé de 11 partis politiques [PS, PCF, LFI, Générations…, ndlr] « à parité avec 50% de citoyens ». Dans son discours, l’élue a insisté sur la notion de responsabilité : « Les Marseillais attendent que nous soyons responsables. Ils veulent cette union de toute la gauche, des écologistes et des citoyens. Ils nous le disent tous les jours, et pour cela nous ne les décevrons pas. Nous avons une grande responsabilité. L’espoir est là, et le printemps arrive ».
Sept candidats à la Mairie de Marseille sont aujourd’hui en capacité de présenter des listes sur l’ensemble des secteurs de la ville, soit 303 noms : Bruno Gilles (DVD-Ensemble pour Marseille), Stéphane Ravier (RN), Martine Vassal (LR) ; Yvon Berland (LREM), Sébastien Barles (Debout Marseille – EELV) ; Samia Ghali (Marseille avant tout) et Michèle Rubirola (Printemps Marseillais). Composition des listes, affiches de campagne et présentation du programme, à chaque « team » sa stratégie pour remporter les prochaines élections municipales.
De l’insoumise Sophie Camard au socialiste Benoît Payan en passant par le communiste Jean-Marc Copppola, les listes du Printemps Marseillais sont majoritairement menées par des personnalités politiques de gauche. De son côté, Samia Ghali a décidé de faire campagne sur son nom et en misant sur des nouveaux visages, avec des têtes de listes jeunes, [la moyenne d’âge est de 40 ans, ndlr], toutes issues de la société civile et engagées à Marseille dans différents domaines. Quatre d’entre elles sont avocats au barreau de Marseille. Chez les Verts comme chez Martine Vassal, on raisonne en binôme : des duo d’experts et non-professionnels de la politique, ou des duos de novices, mais investis avec une très bonne connaissance du terrain, pour répondre, là-encore, à un besoin de renouvellement. Au Rassemblement National, Stéphane Ravier, lui, compte sur ses fidèles lieutenants.
Dans les 1/7 arrondissements
Ainsi, pour le Printemps Marseillais, la suppléante de Jean-Luc Mélenchon (LFI) Sophie Camard, brigue la mairie des 1er et 7e arrondissements, tenue par Sabine Bernasconi (LR), candidate à sa propre succession. Cette dernière forme d’ailleurs le binôme avec Alain Gargani pour Martine Vassal. Il faudra également compter sur la pugnacité du jeune avocat Gaëtan Poitevin, de la team Marseille, avant tout; et la détermination de Sébastien Barles, et sa numéro 2, Annie Lévy-Mozziconacci pour Debout Marseille !
La généticienne de 57 ans, qui se revendique « femme de gauche », a soutenu un temps Jean-Philippe Agresti, à l’investiture LREM. En 2014, elle est tête de liste PS-EELV dans les 6/8. La liste « Un nouveau cap pour les Marseillais avec Patrick Mennucci », arrive en seconde position lors de ce scrutin municipal, avec 19,07% des votes, derrière celle du maire de Marseille (50,07%). Elle manque de quelques dizaines de voix, l’occasion d’affronter Jean-Claude Gaudin au second tour.
Aux législatives de 2017, elle est la candidate du parti socialiste dans les 7e-8e. L’élue semble désormais avoir trouver sa voie et un « épanouissement », au sein de l’équipe de Sébastien Barles, et dans une démarche qu’elle juge en « cohérence et fait sens ».
C’est à l’occasion des dernières élections municipales, que l’élue dit avoir développé une conscience écologique. « Je me suis rendue compte de l’urgence de la santé environnementale et je ne veux plus qu’elle soit un faire-valoir, mais un étendard ». Annie Lévy-Mozziconnaci a défendu des dossiers liés à la pollution, l’habitat insalubre… ou lancé un appel pour la mise en place d’un registre sur les malformations congénitales et des cancers, entre autres signés par Corine Lepage, ou Delphine Bathot. Face à ces « enjeux », elle ne voit aucun problème à figurer dans une équipe qui compte des insoumis.
Sur la ligne de départ également, la militante (RN) Clémence Parodi. Le conseiller municipale René Baccino, pour Bruno Gilles. Chez LREM, on retrouve l’entrepreneur Arnaud Devignes. Il a travaillé successivement pour les groupes Accenture et Capgemini, avant de rejoindre ensuite les équipes de Google pour y piloter les activités marketing pour finir directeur du moteur de recherche d’emploi Indeed en France.
Dans les 2/3 arrondissements
Dans ces arrondissements, c’est Solange Biaggi qui mène la liste LR, en binôme avec Stéphane Soto. Porte-parole de la thématique « travailler » de Martine Vassal, l’entrepreneur s’est mis en retrait de Medinsoft qu’il a cofondé il y a 16 ans pour des raisons d’éthique.
En 2104, Solange Biaggi remporte le 2e secteur avec 47,69% des voix. Une victoire après l’absorption par sa liste, entre les deux tours, de celle de la PRG de Lisette Narducci. Cette dernière avait obtenu de conserver son siège de maire du 2e secteur. Elle entend la garder et a choisi de rallier la liste de Bruno Gilles.
Au casting encore, pour le Printemps Marseillais, l’élu socialiste Benoît Payan tentera donc de lui rafler sa mairie.
Autres concurrents dans ce secteur : Nouriati Djambaé, élue EELV au conseil de la métropole Aix-Marseille Provence et adjointe au maire dans le 8e secteur, avec à ses côtés, le président du théâtre du Toursky, Michel Dossetto pour Debout Marseille ! Jusqu’il y a quelques semaines encore, Michel Dossetto flirtait avec la team d’Yvon Berland et ne s’en cache pas.
Avocat de formation et auteur dramatique, il assume avoir été séduit, au moment des Présidentielles, par Emmanuel Macron. « Une expérience nécessaire pour la France ». Deux ans plus tard, il ne s’y retrouve plus, pas plus que dans le projet du candidat désigné par le parti présidentiel. Il a décidé de rejoindre Sébastien Barles, « car le contenu de son projet a du sens, une direction claire ». Il entend « remettre de la culture au cœur de la cité » et œuvrer pour offrir à la population « un environnement sain ».
Un choix qui ne met pas en péril la gestion du Théâtre Toursky, le directeur Richard Martin, ayant choisi de suivre Bruno Gilles. « J’ai été étonné de son choix, mais Richard Martin fonctionne beaucoup à l’affectif, l’amitié et au coup de cœur, plus que par réflexe citoyen. La gestion du théâtre n’en sera pas entachée, nous sommes sur une liste concurrente et pas ennemie ».
L’élue de l’opposition au conseil municipal, Jeanne Marti, portera la flamme du RN. L’avocat pénaliste Alain Lhote a décidé de rejoindre Samia Ghali. La juriste, Maliza Said Soilihi représente La République en marche. En 2014, elle est élue au conseil municipal de la ville de Marseille, et a occupé le poste de vice-présidente de la commission finance et administration générale ainsi que conseillère déléguée aux fonds européens à l’information digitale.
Dans les 4/5 arrondissements
Michèle Rubirola (suspendue d’EELV) candidate à la Mairie de Marseille a décidé de se présenter dans les 4/5e arrondissements. Face à elle, Bruno Gilles, sénateur des Bouches-du-Rhône et quatre fois maire dans ce secteur, où il a de solides ancrages. On retrouve aussi le doyen de la faculté de droit d’Aix-Marseille et macroniste de la première heure, Jean-Philippe Agresti, qui a récemment rallié Martine Vassal (LR), au regard d’un parti présidentiel qu’il estime « en pleine schizophrénie » à Marseille. Candidat à l’investiture LREM, qu’il n’a pas obtenu au profit d’Yvon Berland, Jean-Philippe Agresti avait déjà répondu favorablement à la main tendue de la candidate, en montant sur la scène du Silo, le 4 juillet dernier.
C’est l’influenceur Mathieu Grapeloup qui se lance dans ces deux arrondissements, pour La République en marche. Fabien Perez, avocat de formation a été choisi par la liste « Debout Marseille ! écologiste et citoyenne ». Le chef d’entreprise, David Bergeron, et Flora Gilbert, avocate, experte en droit d’asile, mènent campagne pour Samia Ghali. On retrouve aussi le conseiller régional (RN) Jean-François Luc.
Dans les 6e/8e arrondissements
Petite nouvelle dans le monde de la politique pour le Printemps marseillais : Olivia Fortin, co-fondatrice du collectif Mad Mars, a décidé de se jeter dans le grand bain. Un pari pour cette novice puisqu’elle ira dans le 6-8e, secteur très disputé. En lice, Martine Vassal (LR), secondée, sans surprise, par Yves Moraine, actuel maire de secteur et président du groupe de la majorité municipale.
Yvon Berland désigné par le parti présidentiel a également choisi le secteur historique du maire (LR) de Marseille, Jean-Claude Gaudin. Agir, la droite constructive, vient de lui apporter son soutien, par la voix de son délégué départemental Jean-Luc Ricca. Il est secondé par Caroline Pozmentier qui s’est affranchie des Républicains.
La porte-parole régionale d’EELV, Christine Juste, sera la candidate de Debout Marseille (EELV). Le jeune Ludovic Perney, conseiller régional LR y mène déjà campagne depuis quelques semaines pour « Ensemble, pour Marseille », aux côtés de Sandra Dalbin, désormais ex-vice-présidente du Département [sa délégation lui a été retiré il y a quelques jours, ndlr]. Bernard Marandat tentera de s’imposer pour le Rassemblement national. Marseille avant tout est représenté par l’entrepreneur Pierre-Henri Blanc (aucun lien avec le café) fondateur de la conciergerie « Monsieur Major ».
Dans les 9/10e arrondissements
Dans les les 9/10. Aïcha Sif, élu apparentée EELV au conseil régional de 2010 à 2015, a été désignée par le Printemps Marseillais pour affronter Lionel-Royer Perreaut (LR). Elle trouvera aussi sur sa route, la jeune avocate Zoé Poncelet engagée auprès de Samia Ghali, le duo Hervé Menchon (EELV) et Katia Yakoubi (Debout Marseille !), le binôme Nathalie Simon (directrice mission partenariats – CCIMP) et Maxime Tommasini pour le candidat Bruno Gilles, et là-encore pour le Rassemblement national, une conseillère régionale en la personne d’Eleonore Bez.
La République en marche n’a pas encore désigné de candidat dans ce secteur, les négociations avec le Modem ayant récemment échoué.
Dans les 11/12e arrondissements
Yannick Ohanessian apparenté PS tentera sa chance sous les couleurs du Printemps Marseillais [sa candidature a été validée en tant que société civile par la direction du PM, ndlr] dans les 11e-12e arrondissements, fief de la député Valérie Boyer (LR). Cette fois, c’est Julien Ravier (LR) qui se battra pour conserver son titre de maire. Dans ce secteur on refait d’ailleurs le match – ou presque – puisque Pascal Chamassian (LREM), candidat malheureux du scrutin de 2017, fait son come-back ; soutien de la première heure d’Yvon Berland.
De leurs côtés, les Verts alignent le duo Jean-Marc Signes, président départemental de Génération écologie, militant associatif enraciné localement, et Marie-Anne Le Meur (AtmoSud) ; tandis que Bruno Gilles mise sur l’ancien proche de Gaudin et ancien maire de ce secteur, le centriste Robert Assante.
Samia Ghali place encore un avocat en la personne de François de Cambiaire, quant à Stéphane Ravier il compte sur Franck Allisio. Président des Jeunes actifs, un mouvement qui regroupe les trentenaires encartés chez Les Républicains, il avait fait parlé de lui en rejoignant Marion Maréchal Le Pen lors des Régionales de 2015.
Dans les 13/14e arrondissements
Deux communistes ont été désignés pour livrer bataille dans les quartiers Nord. Pour le Printemps Marseillais, Jérémy Bacchi, secrétaire départemental du PCF13, tentera de ravir la mairie au Rassemblement national, dans les 13/14, face à Stéphane Ravier. Ce dernier la défendra aux côtés de sa nièce et maire de secteur Sandrine d’Angio.
Toujours dans les 13-14, le Printemps Marseillais et EELV n’ont pas réussi à faire front commun pour affronter l’extrême-droite. Jérémy Bacchi a, en effet, été préféré à l’insoumis Mohamed Bensaada. Passé par le PCF, puis EELV, le co-chef de file de La France Insoumise à Marseille est aussi membre du Pacte démocratique. Mohamed Bensaada ; soutenu par Sébastien Barles, mènera donc une liste intitulée « Unir », rassemblement citoyen, écologiste et solidaire.
Néanmoins, jusqu’au 27 février, date des dépôts des listes, la porte reste ouverte pour trouver un terrain d’entente avec le Printemps marseillais, dans ce secteur, où l’on compte aussi les candidatures du Général David Galtier pour les Républicains ; celle de Julien Rossi, militant de longue date sur le secteur qui porte le programme de « Marseille, avant tout » ou la conseillère d’arrondissement Josepha Colin, adjointe de Marine Pustorino, chargée de l’action familiale et des Droits des femmes, pour l’équipe de Bruno Gilles.
Pour La République en marche, le choix s’est porté sur Marie-Florence Bulteau Rambaud, conseillère régionale Modem (depuis 2015), présidente de la commission formation professionnelle, apprentissage, lycées et jeunesse au conseil régional Provence Alpes-côte d’Azur. L’occasion « d’élargir l’arc progressiste » de la liste d’Yvon Berland.
Dans les 15/16e arrondissements
Dans les 15/16, Jean-Marc Coppola affûte ses arguments et ses propositions pour contrer ceux de la sénatrice Samia Ghali et du député Saïd Ahamada (LREM), qui a vu l’actuel directeur sportif de l’Athletico Marseille, Mamadou Niang rejoindre sa liste. Il était d’ailleurs déjà présent lors du meeting d’Yvon Berland. L’acteur marseillais Moussa Maaskri [pour la candidate Vassal, ndlr], lui aussi, ne compte pas se laisser impressionner, tout comme l’élue écologiste Lydia Frentzel et son binôme Rachid Mokrane, de l’alliance écologiste indépendante, ou encore la conseillère régionale (RN) Sophie Grech, et enfin le chef d’entreprise Jean-Claude Corteggiani, élu dans ce secteur, pour l’équipe « Ensemble pour Marseille ».
Les trois autres candidats
Les candidats Michel Pinard, avec Projet Marseille et Christophe Madrolle (UDE) et le tout nouveau Georges Vinapon*, pour « Une nouvelle voie 2020 », ne sont pas encore en mesure de présenter de listes dans tous les secteurs de la ville. Ils ont néanmoins décidé de rester dans la course pour l’Hôtel de ville… pour l’instant. La date de dépôt des listes définitives est fixée au 27 février.
* Journaliste de profession, Georges Vinapon est marié et père de 5 enfants. Il démarre sa carrière de journaliste au quotidien régional La Marseillaise en 1986. D’abord comme secrétaire de rédaction, et devient au fil des années responsable du Magazine hebdomadaire de la Marseillaise, (LMD : La Marseillaise Dimanche), responsable de la rubrique télé et enfin rédacteur à la locale de Marseille. Georges Vinapon a été membre d’Europe Ecologie les Verts, avant de suivre le mouvement “Changer la donne” de Pape Diouf aux dernières élections municipales. « Nouvelle Voie 2020 » est aussi, selon lui, l’ère de la Troisième Voie, celle vers laquelle nous convergeons, celle d’une possible conciliation de nos mondes par le rassemblement et le dialogue autour de ce mouvement.