La municipalité opte pour une gestion transitoire du parc Chanot pour une durée de trois ans, afin de se laisser le temps de structurer un projet définitif pour cet équipement phare de Marseille.
Passer de 2% à 30% d’espaces verts, créer des logements sociaux, imaginer un projet ambitieux, écologique et structurant pour le parc Chanot… C’est le défi que veut relever la municipalité ces trois prochaines années. L’avenir de ce site majeur marseillais est à l’ordre du jour du conseil municipal ce vendredi 16 décembre.
La Ville de Marseille est propriétaire de cet immense équipement, géré depuis 1985 par la Safim, filiale de Veolia. Par deux fois, la convention d’occupation, qui devait arriver à son terme en 2019, a été renouvelée par la précédente municipalité : la première, pour permettre l’accueil dans les meilleures conditions du Congrès mondial de la nature, en septembre 2021. La seconde pour lui permettre d’allonger le délai de sélection d’un nouvel exploitant, dans le cadre d’un vaste projet de reconfiguration du site, et pour lequel plusieurs groupes avaient candidaté.
2023, fin de l’exploitation par la Safim
En fin d’année 2021, la majorité de Benoît Payan a décidé de mettre un terme à cette procédure, tout en reconduisant pour deux années supplémentaires la convention avec la Safim, pour se laisser le temps de mûrir un projet. Même si quelques orientations se sont dessinées, concentrés sur d’autres impératifs (le plan école, Marseille en Grand, les projets Anru…), les élus n’ont pas pu plancher sur l’avenir du parc Chanot, dont la délégation de service public prend fin au 31 décembre 2023.
« Le préfet nous a dit d’arrêter les reconductions, c’est illégal », nous livre Joël Canicave, adjoint au maire de Marseille, en charge de finances. « C’est pour cette raison qu’on lance cette procédure en mode affermage par un délégataire qui va gérer le parc Chanot, sans qu’on lui demande des choses supplémentaires en termes d’investissement, car trois ans, c’est trop court. Dans le même temps, ça va nous permettre de faire « maturer » un projet définitif qui passera ensuite sur un autre mode de concession », explique l’élu.
La municipalité présentera, en effet, un rapport pour « l’approbation du principe de délégation de service public et du lancement d’une consultation en vue de la gestion, l’exploitation et l’entretien des équipements ».
Les conclusions de l’assistance à maîtrise d’ouvrage
La Ville avait déjà réfléchi à une exploitation transitoire du site. Début octobre 2021, la majorité municipale a voté le lancement d’une procédure de mise en concurrence pour une mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) pluridisciplinaire comprenant des compétences techniques (architecturales, urbaines, environnementales et paysagères), financières, juridiques, programmatiques et de coordination. Une affectation de programme de 444 000 euros (HT) a été actée avec le vote de la délibération.
Les experts ont récemment livré leurs conclusions. Elles ont été présentées par la maire adjointe Samia Ghali à l’ensemble des élus. « Cette analyse juridique, technique et comptable nous permet de voir comment on peut évoluer, et c’est la raison pour laquelle on a tranché sur la question de l’affermage. Il y avait plusieurs scénarios, on a réfléchi à une gestion en régie, mais le plus sécurisant reste l’affermage », explique la maire adjointe, en charge de la stratégie municipale sur les projets structurants de la ville.
Un comité de pilotage en place dès le mois de janvier
Dès le mois de janvier, Samia Ghali va élaborer le cahier des charges afin de lancer rapidement le marché pour avoir les candidatures. Dans le même temps, elle mettra en place un comité de pilotage (Copil) pour travailler de manière transversale avec les élus des délégations concernées dans le but de « réfléchir de manière collégiale à ce que l’on veut faire ».
D’ores et déjà, « la question des espaces verts sera largement prise en compte. On va passer de 2% à 30% d’espaces verts, explique l’élue. Le parc Chanot est le site le plus chaud de Marseille », dit-elle, se référant aux résultats de l’AMO.
Autre certitude : il y aura du logement « et du logement social » affirme-t-elle. Par ailleurs, la réflexion sur le parc Chanot englobe aussi celle d’une Arena : « On a aujourd’hui des équipements vieillissants (Palais des sports, Dôme…), qui vont commencer à nous coûter de l’argent. On ne peut pas dire : ici, on ne met pas de chauffage, et de l’autre côté, dépenser beaucoup d’argent pour des équipements ».
Quelle vocation pour le site ?
Sur 17 hectares, le parc Chanot est doté de 7 « Palais » au service de l’événementiel, 3 auditoriums de 200 à 3 200 places, 1 800 places de parking et 100 000 m2 de surfaces intérieures et extérieures. Chanot accueille des salons, conventions, conférences, congrès, foires… La question de son repositionnement se pose, notamment sur sa vocation de lieu d’accueil de tourisme d’affaires.
Hors crise sanitaire, le parc Chanot accueille en moyenne 250 événements par an qui rassemblent un million de visiteurs. Selon trois typologies de manifestations : événements d’entreprises, en passant par le secteur de l’automobile ou des séminaires d’affaires. Des congrès qui s’étendent sur une durée de 3 à 4 jours (comme celui des pompiers, de la CGT…), puis des festivals ou salons grand public à l’image de Marsatac, le Savim, la Japan Expo, ou la Foire de Marseille.
Cette dernière attire, à elle seule, plus de 300 000 visiteurs chaque année et représente en moyenne 80 à 100 millions d’euros de retombées économiques sur le territoire. Dans le milieu du tourisme, un congressiste représente une réelle plus-value, car il dépense en moyenne 300 euros par jour (logement, restauration, transports…), soit bien plus qu’un touriste traditionnel.
« On porte notre ambition à un niveau très haut »
Le parc Chanot représente un important foncier, situé dans un endroit extrêmement stratégique, entre le 8e arrondissement, le stade Vélodrome, la mer à proximité, le parc Borély et derrière un tissu résidentiel en plein développement. L’un des enjeux est d’en faire un lieu ouvert à tous et d’y mixer les usages.
Pour l’adjointe à l’Urbanisme, Mathilde Chaboche, le parc Chanot mérite un concours d’architecture et d’urbanisme international. « Cela permettrait d’avoir des signatures prestigieuses. Et surtout de définir comment donner une urbanité au lieu, comment en faire un parc urbain, que l’on traverse, mais où l’on peut aller aussi pour les foires et les salons. Il faut réfléchir à d’autres temporalités, mixer les usages : on pourrait imaginer que ce soit un lieu de congrès lorsqu’il y a besoin, pourquoi pas un “Marseille Plages” l’été avec des animations pour les enfants », nous confiait-elle, il y a quelques mois. Aujourd’hui, son avis n’a pas changé d’un iota.
La fin de la concession de la Safim coïncide également avec celle de l’hippodrome Borély, ouvrant quelques perspectives, potentiellement une extension jusqu’à la mer. Même le nom “parc Chanot” pourrait changer pour symboliser sa grande métamorphose ? « Le maire souhaite que l’on soit dans quelque chose de complètement ouvert parce qu’on va complètement transformer le site, ajoute Samia Ghali. On est la deuxième ville de France. Un parc des expositions est nécessaire et sur ce sujet il n’y a pas de débat, mais on porte notre ambition à un niveau très haut ».