Les Hangars du cinéma sont une base logistique de 4 000 m2 dédiée aux tournages de films, en pleine croissance dans la région marseillaise. Ils doivent ouvrir du côté de Capitaine Gèze en septembre 2023.
« On est très contents », lance Erika Wicke de Haeck, présidente de l’Association régionale des techniciens du Sud-Est (ARTS). Cette structure promeut les métiers de l’audiovisuel sur le territoire. « On demande depuis des années une base logistique dédiée au cinéma auprès des institutions ».
Car Marseille manque cruellement de ce type d’équipement qui assure une base arrière technique pour les tournages de films sur le territoire, depuis que la caserne d’Aurelle a cessé de remplir cette fonction en 2020.
Alors, quand le président de la République a décidé de faire de Marseille la capitale méditerranéenne du cinéma dans le cadre du plan Marseille en grand, « ils nous on dit : « occupez-vous-en ». On a sorti le projet en deux mois ».
Lundi 9 janvier, la ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, a signé un protocole d’accord avec la Région Sud, la Métropole Aix-Marseille-Provence et la Ville de Marseille pour concrétiser ce projet, ainsi que trois autres.
Un million d’euros pour accueillir « six productions en même temps »
C’est donc au 56 boulevard Capitaine Gèze, dans le 14e arrondissement, que la nouvelle base logistique Les Hangars du cinéma, doit ouvrir « à la rentrée 2023 », avance Erika Wicke de Haeck. Sous l’impulsion de l’État et du Centre national du cinéma (CNC), la Caisse des dépôts finance ce projet à hauteur de « 1 million d’euros », précise-t-elle.
Il s’installe dans d’anciens bâtiments, entrepôts et hangars, sur 4 000 m2. Le complexe permettra « de préparer et faire le suivi de tournages, la création des décors, des costumes, le stockage, pour quatre à six productions en même temps ». Les travaux doivent débuter en mars, et durer jusqu’en juillet.
La présidente de ARTS précise que cet équipement sera utile pour les « moyennes et petites productions ». Il est donc complémentaire de Provence Studios à Martigues, ou de la future cité du cinéma à Marseille dans l’ancienne usine Saint-Louis.
« Eux s’adressent aux productions de mastodontes comme Netflix, OCS, etc. Notre mission est d’accueillir tous les autres tournages, qui sont très nombreux mais n’ont pas des énormes moyens. C’est une mission d’intérêt général ».
« avant – après », avec la maquette du projet :
Un bail de quatre ans
Le fabricant de portails et clôtures Vermigli occupait les locaux avant que l’établissement public foncier (EPF) PACA acquière le site en 2021, pour le compte d’Euroméditerranée qui l’aménagera à l’avenir.
Les Hangars du cinéma sont donc un projet provisoire qui bénéficie d’un bail de quatre ans, jusqu’en fin 2026. Sur le papier. Car ce type de projets temporaires se pérennisent parfois à Marseille. Comme le tiers-lieu culturel et solidaire Coco Velten, ou l’atelier coopératif Ici Marseille.
Mais pour l’heure, il s’agit bien d’urbanisme transitoire. C’est pourquoi l’architecte Gauthier Oddo, spécialiste du genre avec les projets de Yes we camp, est intervenu en assistance à maîtrise d’ouvrage. L’architecte Kristell Filotico est à la manœuvre pour concevoir sur le projet.
Elle s’est déjà illustrée dans des projets modulaires, comme à la Friche de la Belle de mai. Elle entend donner ici aussi beaucoup de flexibilité aux bâtiments, pour répondre aux contraintes très diverses de chaque tournage.
« Nous ne touchons pas à l’enveloppe du bâti », explique-t-elle. « On réaménage seulement l’intérieur. On crée les différents espaces de travail, bureaux, ateliers, avec des cloisons, une enveloppe thermique ». Elle prévoit toutefois de retirer une toiture pour créer « une cour de travail ».
Les techniciens du cinéma « experts de l’urbanisme transitoire »
Cette « réhabilitation architecturale raisonnée » fait la part belle au réemploi. Comme celui de gravats issus de la démolition, avec le soutien technique du bureau d’études Lamoureux & Ricciotti Ingénierie.
D’ailleurs, les aménagements sont eux-mêmes pensés pour âtre réemployés ailleurs : « les éléments réutilisables représentent 40 % de l’investissement effectué sur le bâtiment » précise l’architecte.
Luminaires, mobilier, équipements sanitaires… ainsi que les aménagements intérieurs neufs (ateliers, bureaux), « sont conçus pour être entièrement démontables ou mobiles ». Ils pourront rejoindre un futur site à l’avenir.
Kristell Filotico entend également « planter des arbres partout où c’est possible » et implanter des réservoirs de récupération des eaux de pluie.
Pour monter ce projet expérimental, l’architecte a pu compter sur le soutien des adhérents de l’associations ARTS. « Les techniciens du cinéma sont des experts du transitoire. Ils savent aménager des choses en 48 heures. On a beaucoup appris d’eux et ils ont permis de monter le projet en un temps record ».
« On n’a jamais eu autant de tournages sur le territoire »
La présidente de l’association ARTS rappelle d’ailleurs que ces adhérents, « qui représentent un tiers des techniciens de la région, travaillent bénévolement pour faire vivre les Hangars du cinéma ». Car cet outil est vital pour la filière, alors que la réalisation de films dans la région « est en pleine croissance depuis les cinq ou sept dernières années ».
Erika Wicke de Haeck explique que « depuis le Covid, elle a explosé. On n’a jamais eu autant de tournages sur le territoire ». Une tendance qui doit se maintenir, malgré l’arrêt de la série Plus belle la vie. La ministre de la Culture, en visite à Marseille la semaine dernière, s’est dite très attentive à la situation : « On sera vigilant pour que la dynamique qui a été celle de Plus Belle la Vie, à la fois culturelle et économique, puisse se poursuivre ».
La directrice générale de France télévision a « promis d’investir 30 millions d’euros dans la production ici », ajoute de son côté Erika. Pour les professionnels du secteur, « on frise le plein emploi », se réjouit-elle. « Voire, quand une méga production débarque, ça peut créer des pénuries de techniciens ».
La création des deux nouvelles écoles de cinéma à Marseille, CinéFabrique, récente, et Kourtajmé depuis déjà deux ans, devraient donc aider à renforcer les effectifs de demain.