À 15 jours de la suppression des conseils de territoire, la Métropole Aix-Marseille-Provence poursuit son chantier de refondation autour d’une ambition aujourd’hui claire : les transitions. Financement, transfert de compétences, gouvernance… Des interrogations perdurent.
Il y a comme un air de renouveau. Une nouvelle ère qui se profile. « La Métropole de l’an II » aime à dire sa présidente Martine Vassal. Ce vendredi 17 juin, les 240 élus métropolitains étaient invités au siège du Pharo pour participer à la restitution des travaux engagés dans le cadre de la réforme institutionnelle de l’Établissement public de coopération intercommunal (EPCI) créé en 2016. La loi 3DS relative à la différenciation, la décentralisation et la déconcentration prévoit, en effet, une nouvelle structuration de l’institution.
Dans le but de simplifier l’action publique locale, la loi promulguée il y a quatre mois, acte différentes mesures parmi lesquelles la suppression des six conseils de territoire au 1er juillet 2022, et le transfert des compétences de proximité aux communes. Le but étant de permettre à la Métropole de conserver les compétences stratégiques. Pour accompagner cette évolution, quatre commissions ont été créées : ambition, finances, compétences et « Clect », la commission locale d’évaluation des charges transférées.
Un nouvel état d’esprit
Selon la présidente de la Métropole, « les élus sont ravis de ce fonctionnement et nous allons continuer sur ce format », assure-t-elle à la sortie de la séance de restitution, à laquelle ont participé 150 élus du territoire. Sur la méthode, les conseillers métropolitains de tous bords semblent unanimes. « L’aspect positif et indiscutable, c’est que les élus parlent de Métropole, c’est peut-être une avancée fondamentale, parce que ce temps de travail, qui nous tient depuis avril, nous a vraiment permis de dépasser les logiques antérieures et de regarder la Métropole telle qu’elle est, telle qu’elle devrait être », confie le maire PS de Vitrolles, Loïc Gachon.
Jean-David Ciot (PS), maire de Puy-Sainte-Réparade salue de son côté « un travail collaboratif. Ce qui est quand même une première pour la Métropole ». Il met en avant « une volonté de tourner la page avec ce qui s’est fait auparavant ». Il note une orientation claire pour « remettre au cœur de la Métropole » la question de l’emploi et du développement économique, qu’il plaide depuis toujours.
« Une métropole à vocation internationale »
Ces travaux et les échanges ont aussi permis de mettre en évidence une ambition marquée. « Ce matin, c’était très intéressant, c’était la première fois que nous avons eu véritablement un échange sur la stratégie, sur l’ambition », affirme Martine Vassal.
Les élus ont déterminé « que le fondement de la Métropole, ce sont les transitions, qu’elles soient énergétiques, alimentaires, numériques… Et autour, il y a des moyens que sont l’économie, l’attractivité, la mobilité qui vont permettre de faire de ces transitions des projets prioritaires pour la Métropole. Ce travail coopératif et ce travail d’ensemble nous permet d’avancer sur une nouvelle perspective pour avoir enfin une métropole à vocation internationale ».
Dégager des marges de manœuvre financières
Cette ambition a un coût. La Métropole doit trouver des ressources complémentaires ou faire des économies supplémentaires, sous peine de ne pas être en capacité de financer les équipements. « Si on reste au fil de l’eau, on ne pourra investir que 180 millions d’euros. Or, jusqu’à présent, on investissait 450 millions d’euros en moyenne », nous explique Didier Khelfa, maire de Saint-Chamas, vice-président délégué au budget.
Pour affirmer son ambition, la Métropole doit dégager des marges de manœuvre de l’ordre de 100 millions d’euros. « Il faut les trouver sur différents leviers de financements qui peuvent être des économies, une meilleure gestion et maîtrise des budgets annexes, sur la fiscalité », précise l’élu, également en charge de la commission des finances, dans le cadre de la reconstruction métropolitaine.
Sur ce point, les décisions politiques « qui ne seront pas faciles », avancent certains élus, « seront prises collectivement » assure Didier Khelfa, à travers le « pacte de gouvernance financier et fiscal ». Les discussions débuteront au mois de septembre pour chiffrer le nouveau budget de la Métropole. La Chambre régionale des comptes (CRC) doit également rendre son avis sur les relations financières entre la Métropole et les 92 communes qui la composent.
Les prochaines étapes
Parallèlement, si l’intention d’avancer de manière collégiale est claire, les sources d’inquiétudes persistent sur l’organisation de l’EPCI après la disparition des conseils de territoire, au 1er juillet. Ainsi que sur le transfert de charges dans le cadre du retour des compétences aux communes. Ce rôle revient à la Clect, chargée de donner un avis sur la modification des attributions de compensation, principal flux financier entre les 92 communes et la Métropole.
En termes de calendrier, le conseil métropolitain se tiendra le 30 juin. À l’ordre du jour, la présentation des comptes administratifs 2021, la suppression des six conseils de territoire de la Métropole et la présentation du nouvel organigramme métropolitain. Le 1er janvier 2023, place à la nouvelle répartition des compétences entre la Métropole et ses communes. L’EPCI a jusqu’au 22 février 2023 pour ce qui concerne le transfert des équipements sportifs et culturels.
Le cas marseillais
Reste la place de Marseille dans cette nouvelle organisation qui a alimenté la presse ces derniers jours. La majorité municipale souhaiterait signer des conventions de gestion qui lui permettraient de gérer des services ou équipements qui resteraient sous responsabilité métropolitaine. Pour Sophie Camard, maire des 1-7, c’est notamment une solution pour assurer la transition dans le transfert de certaines compétences, comme la voirie et la propreté.
En particulier sur la question sociale, puisqu’environ 1 500 agents devraient être transférés d’une institution à l’autre. « On ne transfère pas ça en six mois. Les conventions de gestion permettent d’exercer des compétences tout en gagnant du temps sur le social. Ça permet de comprendre et anticiper combien ça coûtera à la commune et que les agents ne soient pas bombardés à la Ville du jour au lendemain le 1er janvier. Pour l’instant, ni eux ni nous n’avons d’informations sur cette transition ».
« C’est interdit, par la loi »
Selon elle, la Métropole doit organiser la semaine prochaine un comité technique paritaire pour présenter le projet aux agents. Mais la présidente de l’intercommunalité a d’ores et déjà écarté l’hypothèse des conventions de gestion. « C’est interdit, par la loi », tranche Martine Vassal. « La seule chose qu’il faudra faire, lorsque la Ville de Marseille va récupérer ses compétences de proximité, comme la propreté, c’est des conventions sur le nettoiement des lignes de de tramway (sous compétence métropolitaine, ndlr) pour qu’il soit effectué par la Ville, ce qui est logique. Le préfet est d’accord », précise la présidente de la Métropole.
C’est une des raisons pour lesquelles Martine Vassal a proposé au maire de Marseille une vice-présidence dans l’exécutif métropolitain, « non seulement pour qu’on travaille ensemble sur la stratégie métropolitaine et, pourquoi pas, qu’il récupère la délégation à la collecte. Malheureusement, il ne m’a pas répondu ». En effet, par courrier, Benoît Payan a formulé ses doléances en termes de retours de compétence et de gouvernance, estimant que cette proposition « ne semble pas urgente ».
En fin de journée, Martine Vassal a adressé un courrier à Benoît Payan en réponse à sa lettre, dans laquelle elle dit partager l’analyse du maire de Marseille sur « l’aspect non urgent de votre éventuelle vice-présidence au sein de l’exécutif métropolitain ». Elle exprime également sa volonté de travailler en étroite collaboration avec lui dans un souci d’équilibre. [A lire ici]