Le parc de la Moline offre aujourd’hui un espace vert de 11 hectares labellisé « écojardin » dans les quartiers Est de Marseille. Une destinée de verdure obtenue après des décennies de combat, alors que la rocade L2 devait y prendre place à ciel ouvert.
C’est un espace vert considérable qui s’étale sur 11 hectares à flanc de colline dans le quartier de Montolivet, au nord-est de Marseille. Le parc de la Moline offre une vue imprenable sur la ville, surplombé de la majestueuse bastide de Bois-Luzy, aujourd’hui devenue une auberge de jeunesse.
Au cœur du parc, plus modeste, la bastide Ranque est devenue un « relais nature », et accueille des associations. Les enfants viennent participer à des ateliers pédagogiques, autour de la faune et la flore.
Car le parc de la Moline est labellisé « écojardin », en récompense d’une gestion écologique responsable. Arbustes, fleurs, buissons, de nombreuses essences de la région y poussent en toute quiétude au pieds d’amandiers, de jujubiers, de chênes…
On s’y balade sur des allées piétonnières et cyclables, entre une oliveraie, et des jardins botaniques, potagers, de plantes aromatiques ou médicinales. Un parcours de près d’un kilomètre, parsemé de fontaines, de jeux d’enfants et terrains de sport. Sur une vaste prairie, un amphithéâtre de verdure accueille des concerts et spectacles en plein air au pied de ses gradins en pelouse.
Un silence campagnard règne entre les chants d’oiseaux et le son des fontaines. Difficile alors d’imaginer qu’au même endroit, un flux continu de voitures circule sur les six voies de l’autoroute A 507 (rocade L2), sous terre.
Un « bénéfice collatéral » de la création de la L2
À l’origine, il s’agissait d’un petit parc privé. « Le parc de la Moline tient son nom de l’ancien propriétaire, originaire de Molines-en-Queyras », nous raconte Richard Hardouin. Cet habitant et militant du quartier a vu ce petit espace vert fermé au public, devenir au fil des ans cet imposant parc public.
« C’est un bénéfice collatéral de la création de la rocade L2 », rit-il, entouré d’amis, également militants et riverains. Ce défenseur de l’environnement et de la qualité de vie est aujourd’hui vice-président de France nature environnement des Bouches-du-Rhône, et président du Collectif anti-nuisances environnement (CAN).
« Le collectif se nommait CAN L2 auparavant. Car il est né dans la lutte contre la création de l’autoroute de contournement de Marseille. Dans les années 1930, c’était un projet de petite rocade de banlieue campagnarde. Pour devenir au final, une véritable autoroute urbaine ».
L’autoroute de contournement de Marseille, en projet depuis 1933, a en effet suscité de vives protestations citoyennes, associatives et politiques. Destruction de jardins, d’habitations, nuisances sonores et pollution, les prétextes n’ont pas manqué. Si la voie a bel et bien vu le jour au bout d’un chantier interminable, les militants ont obtenu son enfouissement sur plusieurs tronçons.
Notamment celui entre l’avenue Montolivet et la rue Kaddouz, où prend place aujourd’hui le parc de la Moline. « Ils avaient déjà tout détruit pour creuser une tranchée ouverte », rappelle Jean-Pierre Bonicel, membre du collectif. « C’est contre la L2 que nous nous battions. Au final, nous avons obtenu l’enfouissement de ce tronçon, “à l’arrachée” », précise-t-il. « L’espace créé en surface a permis la création et l’agrandissement du parc. Quand on voit le résultat, c’est quand-même un victoire. C’est assez rare à Marseille, pour ce genre de combat ».
En arpentant le parc de la Moline, une plaque sobre rappelle aux badauds que la création de cet immense espace vert est le fruit d’un combat citoyen de plusieurs décennies. Initié par Guy Saint-Jean dans les années 1970, Marseillais engagé contre la rocade L2 et pour la préservation de l’environnement et de la qualité de vie, fondateur du collectif anti-nuisances Can L2.
La L2 sous terre, mais la pollution en l’air
« Mais cela ne résout pas les problèmes de pollution de l’air », reprend Bernard Donadio, également membre de CAN environnement. « Il y a une forte pollution pour les riverains des embouchures du tunnel, où les gaz s’échappent ». En effet, sous la pression du collectif, des stations de mesure de qualité d’air ont été installées dernièrement par Atmosud. « Des dépassements de polluants ont déjà été enregistrés » affirme le militant.
La sortie du tunnel de la L2 à l’extrémité sud du parc de la Moline, au niveau de la rue Kaddouz
Si le collectif milite pour une filtration de l’air du tunnel, Atmosud et le CETU (Centre d’Etudes des Tunnels), ont opté pour un processus de « dilution de la pollution », le projet Borée. Des micro-capteurs positionnés dans le tunnel déclenchent une ventilation ipportante en cas de pic de pollution. Les polluants seraient ainsi mieux dilués. « Il y a en effet une amélioration de la qualité de l’air pour les riverains des sorties du tunnel », admet Bernard Donadio, « mais ce n’est pas un réel traitement de la pollution ».