Le président de la République a profité de sa visite à Marseille, en clôture du Sommet des deux rives, pour réaffirmer l’intérêt de la France dans la coopération méditerranéenne, et concilier son agenda politique pleinement tourné vers les municipales 2020. Marseille reste l’une de ses priorités.

Marseille reste pour lui une « ville de cœur ». Emmanuel Macron n’a pas peur de le dire. « C’est une ville à laquelle je suis très attaché ». Dans la cité phocéenne, le président de la République est à son aise. Sa venue, pour clôturer le Sommet des deux rives, qui se tenait au palais du Pharo, était pourtant incertaine en raison de l’absence de chefs d’Etats étrangers. Mais, il lui fallait « saluer le travail accompli dans le cadre de ce sommet », et tracer le cap. (lire par ailleurs)

Si jusqu’à la dernière minute, l’Elysée a laissé planer le doute sur le moment de son arrivée, c’est finalement dimanche soir qu’Emmanuel Macron a débarqué dans la cité phocéenne. Au programme, un dîner avec les acteurs économiques, sociaux et culturels de Marseille, dans un restaurant sur la Corniche Kennedy.

« La France ne peut pas réussir si Marseille ne réussit pas »

Y étaient présents, des personnalités telles que Jean-Luc Chauvin, président de la Chambre de commerce et d’industrie Marseille Provence, Johan Bencivenga, président de l’UPE 13, Macha Makeïeff et Francesca Poloniato, respectivement directrices du théâtre national de Marseille et du Merlan, la créatrice de mode Emma François, Tarik Ghezali, spécialiste de l’économie sociale ou encore la sociologue Samia Chabani.

Un dîner privé avant, lundi matin de se rendre « au Pôle emploi [celui de Cap Pinède NDLR] pour prendre un peu le pouls à la fois des difficultés et des réalités de ce que vivent nos concitoyens dans des quartiers réputés difficiles et ce que vivent les agents qui les aident au quotidien ».

Un bon moyen aussi de prendre la température dans la deuxième ville de France, quelques jours après la visite de son épouse Brigitte dans les quartiers nord, dont le déplacement avait d’ailleurs déstabilisé bon nombre de marcheurs locaux. Ils avaient ainsi appelé à une clarification du chef de l’Etat sur la ligne LREM à tenir à Marseille, en vue de l’échéance de 2020. « Personnellement, je ne serais pas candidat aux municipales à Marseille », lance le président avec le sourire.

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Emmanuel Macron avec Jean-Claude Gaudin, Jean-Yves Le Drian et le préfet des Bouches-du-Rhône, Pierre Dartout. @ France Diplomatie.

« Je considère que l’on ne peut pas se désintéresser de Marseille quand on est président de la République. Je pense profondément que nous avons à repenser notre espace. Ce que nous avons vécu ces derniers mois nous l’a montré et la France ne peut pas réussir si Marseille ne réussit pas ».

La longue discussion d’Emmanuel Macron et Jean-Claude Gaudin

Un enjeu de taille qu’il a visiblement évoqué avec Jean-Claude Gaudin, à l’occasion du déjeuner, lundi, rassemblant 200 convives, aux premiers rangs desquels les intervenants du Sommet, les députés, dont Jean-Luc Mélenchon (LFI) et les élus marseillais. Martine Vassal, présidente LR du Département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille Provence, et le président LR de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, étaient, quant à eux, à la table du président.

De l’aveu d’Yves Moraine, qui se réjouit que les Macron aiment Marseille, « sur 1h30 qu’a duré le repas, le maire de Marseille et le président de la République se sont parlés à l’oreille au moins 1h28, donc ils avaient visiblement beaucoup de choses à se dire », nous confie le maire des 6-8e arrondissements.

Suivant la ligne Vassal, qui appelle au « large rassemblement » dès le premier tour, notamment entre LR et LREM ; il souligne « que le maire de Marseille a peut-être indiqué au président de la République les raisons qui lui paraissent pertinentes pour faire cette alliance, dès le premier tour, sur la base d’un projet et pour éviter que la ville ne tombe entre les mains des extrêmes ». Et à ceux qui brandissent une faiblesse de son parti, il rétorque avec flegme : « selon certaines analyses récentes qui circulent, Les Républicains sont plutôt en position de force par rapport à d’autres ».

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Yves Moraine, maire des 6-8e arrondissement de Marseille. © N.K.

« Faire de Marseille une véritable capitale culturelle, écologique, entrepreuneuriale »

Cet appel à l’union, Emmanuel Macron s’est « gardé de [le] commenter », comme il estime qu’il ne lui appartient pas de « désigner tel ou tel candidat » pour Marseille. Sans dévoiler le contenu des échanges avec le maire de Marseille, il assure que la « clé » réside dans l’ambition et le projet. « Le rassemblement se fera autour de celui ou celle qui portera l’ambition et le projet pour Marseille », pour en « faire une véritable capitale culturelle, écologique, entrepreunariale, méditerranéenne. Elle en a toutes les potentialités mais il faut profondément lancer une impulsion nouvelle, et le rassemblement se fera derrière ».

Parallèlement, il assure que l’Etat a une « une responsabilité particulière à Marseille, deuxième ville de France, prise aujourd’hui dans des difficultés très profondes. L’Etat ne peut pas s’en désengager, ce n’est pas seulement une affaire municipale ». 

Un discours avec lequel Saïd Ahamada est en phase. Seul candidat officiellement déclaré pour obtenir l’investiture En Marche, le député des quartiers nord attendait une clarification du chef de l’Etat sur la ligne du mouvement. « Les seuls qui parlent d’alliance aujourd’hui, sont ceux qui la veulent », souligne le parlementaire, qui ne change pas de stratégie. Pour lui, c’est clair, « il faut un projet de rupture, sinon on ne peut pas incarner une alternative. On veut offrir aux Marseillais un autre choix, si on est sur autre chose ça ne marche pas. Je ne sais pas vendre une liste avec moi, Guy Teissier, Valérie Boyer et Yves Moraine… », affirme Saïd Ahamada, qui travaille actuellement « sur le projet ».

« Quelle est la meilleure équation pour Marseille ? »

Selon l’ex-PS Samia Ghali, « si LREM fait l’alliance avec LR» à Marseille le parti présidentiel « cautionnera l’échec de la majorité municipale sortante » et il devra en assumer « la responsabilité », a-t-elle déclaré avant le déjeuner. Et d’ajouter : « Avec ou sans En marche ! je serai là », promet-elle.

Claire Pitollat, elle, est plus nuancée. La députée de la 2e circonscription des Bouches-du-Rhône, part elle aussi du postulat d’un projet, base sur laquelle doit se construire un rassemblement. Certes, elle estime que le président n’est pas « celui qui désignera le candidat, mais malgré tout il a donné un cap avec la construction d’une véritable politique méditerranéenne dans laquelle Marseille peut s’inscrire ».

Parler d’alliance de partis n’a pas de sens pour la parlementaire : « On doit s’allier sur des valeurs, des intérêts communs pour la ville et contre les extrêmes ».

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Christophe Madrolle (UDE) a toujours fait de cette lutte contre les extrêmes, l’un de ses combats politiques prioritaires. Il connaît Emmanuel Macron depuis de longues années. Quelques minutes après son départ, les deux hommes ont d’ailleurs échangé quelques mots devant le palais du Pharo. Des rires, une petite tape amicale du président sur l’épaule de candidat déclaré à la mairie, qui nous confie que le président « réfléchit à la meilleure conjoncture, car il est conscient que le risque du Rassemblement national est présent et qu’il faut construire une alternative ». Il se mettra au service de « ceux qui ont envie de construire un véritable projet alternatif », gardant en tête la question : « Quelle est la meilleure équation pour Marseille ? »

L’inconnue de la fusion Métropole-Département

En attendant de trouver la bonne formule, les propos du chef de l’Etat résonnent comme une volonté de voir un vent de renouveau souffler dans la cité phocéenne. Si pour l’heure, du côté de LREM, seul Saïd Ahamada est officiellement candidat à l’investiture, le doyen de la faculté de droit Jean-Philippe Agresti et le président d’Aix-Marseille Université, Yvon Berland, tous deux présents, lundi, sont aussi en lice. Reste que le dîner privé et très stratégique du président de La République, dimanche soir, laisse entrevoir également la possibilité de voir émerger d’autres noms.

Et dans cette quête d’un candidat, une grande incertitude : la fusion de la Métropole avec le département des Bouches-du-Rhône. Après le préfet de région, Pierre Dartout, et Martine Vassal, Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires a rendu son rapport sur le projet, dont les élus métropolitains n’ont pas encore les contours. D’après nos informations, le premier Ministre devrait s’exprimer sur le sujet dans le courant du mois de juillet. Actée sur le papier, la fusion pourrait bien être abandonnée, aux dires de certains députés. Un scénario qui viendrait alors rebattre une nouvelle fois les cartes pour les municipales 2020 à Marseille.


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