Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, était à Marseille lundi 27 novembre pour lancer la « COP régionale » en Provence-Alpes-Côte d’Azur, déjà territoire pilote de la planification écologique.

Alors que s’ouvre dans deux jours (du 30 novembre au 12 décembre) la 28e Conférence des Parties sur les changements climatiques (COP 28), à Dubaï, le ministre de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires, Christophe Béchu, a entamé un tour de France pour lancer les « COP régionales ». Une dizaine seront initiées dans les prochaines semaines.

Après le coup d’envoi à Metz (Grand-Est), il a fait escale à Marseille, lundi 27 novembre, accompagné de la secrétaire d’État à la Citoyenneté et à la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, pour expliquer les modalités de la planification écologique territoriale devant un parterre d’élus locaux, d’acteurs économiques, de fédérations professionnelles, de chefs d’entreprise… réunis à l’Hôtel de Région.

Fin septembre, à Saint-Malo, au congrès des Régions de France, la Première ministre, Élisabeth Borne, avait donné jusqu’à l’été 2024 aux régions pour établir leur feuille de route en matière de planification écologique à l’horizon 2030, avec l’idée de « COP territoriales ». Un échelon incontournable pour relever les défis liés à la transition écologique.

Sur le modèle des Conférences des Parties des Nations unies et co-animées par les présidents de Région et les préfets de région, elles sont une déclinaison à l’échelle locale des objectifs nationaux pour aller vers la neutralité carbone. Le but est d’accélérer, de trouver des solutions efficaces et de veiller à la solidarité entre les territoires.

Les trois piliers

« Nous sommes confrontés à trois défis écologiques majeurs qui se touchent, se rejoignent, se mélangent, qui s’amplifient malheureusement et sur lesquels il y a urgence collectivement de réagir », pose le ministre, en préalable.

Ces « COP » décentralisées reposent ainsi sur trois piliers : la réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport au niveau de 1990 (544 millions de tonnes), conformément aux engagements européens. « On est à la moitié du chemin, mais il nous reste 7 ans pour faire ce que l’on a fait en 33 ans », poursuit Christophe Béchu.

Deuxième priorité : la biodiversité. Selon les chiffres exposés, une espèce sur huit sur la planète est menacée. 3/4 des terres et 2/3 des mers sont sévèrement impactées par des pollutions de toutes sortes, parmi lesquelles la pollution plastique. L’objectif est aussi de restaurer 30 % des habitats dégradés et 50 000 ha de zones humides d’ici à 2026. La plantation d’un milliard d’arbres plus adaptés au climat futur est prévue d’ici à 2031.

« Le troisième sujet, c’est de s’adapter » au réchauffement climatique. « Au rythme où nous allons, il fera à Marseille à la fin de ce siècle la température de Tunis. Environ 3,7° d’écart », ajoute l’ancien président du Département de Maine-et-Loire, tableaux à l’appui, somme d’un an de travail sous la houlette du secrétariat général à la planification écologique (SGPE) avec les ministères concernés.

Provence-Alpes-Côte d’Azur, une région pionnière

En s’inscrivant dès 2017 dans les objectifs fixés par l’Accord de Paris (COP 21) pour décliner à l’échelle régionale le pacte mondial de l’ONU en faveur de l’environnement, avec sa « Cop d’avance », la Région Sud n’a pas attendu l’État pour engager des actions en faveur de la transition écologique et énergétique, marquant une accélération de ses politiques publiques à travers son Plan Climat en 2022.

Articulé autour de six axes : air, mer, terre, énergie, déchet et « Chez vous au quotidien », « il a la particularité d’avoir été entièrement co-construit avec l’ensemble des acteurs du territoire : industriels, ETI, PME, start-up, associations, fédérations, organismes professionnels. Nous avons défini les actions ensemble et avons pris l’engagement de devenir la première région d’Europe à respecter les accords sur le climat », souligne Renaud Muselier, président de la Région Sud.

Provence-Alpes-Côte d’Azur est aussi le premier territoire pilote de la planification écologique. Lors de la signature du protocole d’expérimentation État-Région, il y a tout juste un an, la Première ministre a assuré vouloir en faire une « région-pilote dans le déploiement de la planification écologique en France » dans le cadre du nouveau plan France nation verte. « Notre région devient l’avant-poste de la lutte et de l’adaptation au dérèglement climatique pour le gouvernement, à l’échelon territorial qui permet d’agir concrètement », ajoute Renaud Muselier.

Depuis 2017, d’abord 30 % puis 40 % du budget régional ont été consacrés à ce plan qui vise à favoriser l’éco-mobilité, augmenter la part des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, soutenir des projets vertueux, les start-up innovantes, devenir un territoire zéro plastique à l’horizon 2030, la sobriété foncière, la préservation de la ressource en eau, la protection des forêts…

Parmi les mesures phares, le dispositif d’électrification à quai des navires en escale dans les trois grands ports de la façade méditerranéenne ou encore les financements de la filière hydrogène.

« Un projet économique et industriel très fort »

La décarbonation de l’industrie reste un enjeu majeur pour le territoire. La Région Sud concentre, en effet, plus d’émissions de gaz à effet de serre liées à l’industrie (40%) qu’au secteur des transports, contrairement à « la quasi-totalité des régions françaises », pointe le ministre.

Provence-Alpes-Côte d’Azur représente 8% des émissions nationales de gaz à effet de serre. En toute logique, selon le ministère, l’enjeu est donc de concentrer 8% des efforts nationaux de décarbonation sur le territoire.

« Cette planification écologique est un projet économique et industriel très fort », ajoute Antoine Peillon, secrétaire général à la planification écologique.

cop, Avec les « COP régionales », l’État met les territoires au coeur de la transition écologique, Made in Marseille

 

Des projets d’envergure sont déployés sur le territoire en termes de décarbonation industrielle, à l’instar de Carbon, GravitHy, H2V, Provence grand large… Les efforts doivent s’intensifier selon le secrétaire général de la planification écologique, Antoine Peillon, qui soulève également les enjeux de logistique avec l’importance du port Marseille-Fos et de l’axe fluvial.

Pour illustrer les ambitions de cette « COP » à l’échelle régionale, il présente également quelques projections à l’horizon 2030 : passer de 40 000 véhicules électriques actuellement à plus de 400 000, réduire l’utilisation des chauffages au fioul (200 000 dans la région) « sans descendre à zéro, car parfois il n’y a pas d’alternatives », planter 1300 kilomètres de haies… « Beaucoup des actions engagées dans la région contribuent déjà à atteindre les objectifs ».

Le droit à l’expérimentation

Pour y parvenir, le ministère de la Transition prône une méthode participative. « On ne vous impose rien », rassure le ministre. Si souplesse, flexibilité et « liberté des moyens » sont de mise, le droit à l’expérimentation apparaît comme une solution concrète pour accélérer.

Une demande entre autres formulée par le président de la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence, Jean-Luc Chauvin. « Ce qui marche bien dans cette région, c’est qu’on travaille ensemble et nous espérons pouvoir continuer ce travail qui quelque part réconcilie écologie et économie, dit-il. Ce qui nous intéresse, c’est de savoir comment faire pour expérimenter, sortir des sentiers battus, de la réglementation de l’ancien monde pour pouvoir faire dans le nouveau monde ». Et de citer à titre d’exemple, la réutilisation de l’eau usée pour d’autres usages, l’énergie verte, développer l’industrie décarbonée…

Une demande appuyée par Sébastien Barles, adjoint à la transition écologique de la Ville de Marseille, notamment sur la rénovation thermique des bâtiments.

Dans le cadre de la territorialisation de la planification écologique, l’élu souhaiterait que le travail réalisé dans le cadre du programme européen « 100 villes neutres en carbone » dont la ville de Marseille est lauréate, « soit regardé avec attention pour qu’on puisse avoir de l’aide en ingénierie ».

« Nous ne réussirons pas la transition écologique si on ne la conjugue pas avec un effort de réindustrialisation, admet Christophe Béchu. À nos yeux, dans les leviers, 60% des solutions pour faire en sorte de décarboner existent (voitures électriques, hydrogène…). Elles sont sur l’étagère, il faut accélérer. 20% sont des changements de comportement et 20% des innovations ». 

Le calendrier et les moyens

52 leviers au total ont été identifiés par le Secrétariat général de la planification écologique « pour passer d’un modèle à l’autre et ne pas être simplement dans une incantation », ajoute le ministres convaincu « depuis toujours, que nous avons besoin de l’alliance du national pour les règles du jeu et les budgets et des territoires pour la mise en œuvre ». 

Les acteurs locaux vont désormais poursuivre leur travail collectif pour élaborer un diagnostic et préciser une feuille de route régionale avant l’été, période durant laquelle l’Etat prépare son budget. « Nous allons regarder ce qui a été exprimé par les territoires et voir comment joindre les moyens qui permettent d’avancer ».

Sur les moyens financiers, le 12 juillet dernier lors de la présentation du plan de planification écologique, la cheffe du gouvernement a annoncé « augmenter sensiblement les moyens de l’État en faveur de la transition écologique, avec 7 milliards d’euros supplémentaires dès l’année prochaine ». Ils seront précisés dans le projet de loi de finances 2024.

100 Md€ sur cinq ans pour la décarbonation de l’industrie, ainsi qu’une hausse de 1 Md€ pour celle des mobilités sont également prévus. Pour capter les financements, la Région Sud entend garder son « Cap » d’avance.

cop, Avec les « COP régionales », l’État met les territoires au coeur de la transition écologique, Made in Marseille
© Région Sud – Pierre-Emmanuel Trigo
Bouton retour en haut de la page