C’est une première en France depuis 50 ans. L’exposition « Picasso – les 156 dernières gravures » a pris ses quartiers jusqu’au 4 janvier 2026 au 21, bis Mirabeau, au cœur d’Aix-en-Provence.
Si l’on célèbre surtout Picasso pour ses peintures, la nouvelle exposition nichée au cœur du cours Mirabeau rappelle que l’artiste fut aussi graveur. Plus de 150 estampes, toutes réalisées durant les dernières années de sa vie, sont à l’honneur à Aix-en-Provence.
Si toutes les œuvres présentes sont achevées, seules trois portent la signature de l’artiste. Toutes, cependant, arborent le cachet de l’atelier, et font preuve d’une originalité artistique sans nom.
Picasso y a exploré plusieurs techniques : l’eau-forte, la pointe-sèche, l’aquatinte au sucre, le grattoir… Des différences très subtiles à première vue, épousant des techniques de gravure classiques ou plus originales. Pour les distinguer, les cartels présentent chacun un trait de couleur représentant la technique utilisée.
Sans ordre précis, Picasso revisite des thèmes qui lui sont familiers : le portrait, le nu, le personnage costumé, mais aussi la vieillesse, sujet omniprésent à cette période de sa vie.
Des planches de retour en France pour la première fois
Mise en place par la galerie Baudoin Lebon, l’exposition rend visible ces gravures en France pour la première fois depuis 1974. Ce n’est donc que la deuxième présentation française de cette série, la dernière exposition remontant aux années 1980 à Barcelone.
Les gravures proviennent de la collection privée du marchand d’art et collectionneur d’estampes Henri Petiet. Prêtées pour l’occasion, elles sont estimées à une valeur de 355 000 euros.
Un parcours qui conte l’histoire
En réalité, seules 155 gravures sont exposées : la 156e planche, endommagée, n’a pas pu être présente. Peu importe, le parcours se révèle riche et cohérent.
Si Picasso lui-même ne revendiquait pas de chronologie logique à ses gravures, les commissaires d’exposition ont fait le choix d’organiser une visite défilant de thème en thème. De plus, Picasso ne donnait pas de titres à ses estampes. Chaque titre visible est donc alloué par un tiers. Pour rester au plus proche de l’histoire, l’exposition met donc en avant les numéros et dates des planches.
Caroline Lemoine, commissaire de l’exposition, souligne également la volonté de montrer Picasso sans détour, y compris dans sa relation problématique avec les femmes. L’exposition assume ainsi une lecture honnête et complète de son œuvre.
Entre thématique et sensibilité
Le visiteur est accueilli par des citations de Picasso et des estampes d’inspiration cubiste, rappelant l’artiste le plus connu du grand public.
En face, le regard se déplace déjà sur quelque chose de plus intime, avec le thème du modèle. Une série mêlant gravures claires et foncées, avant de passer au cœur de la création, le thème de l’atelier. On y devine des fragments du quotidien artistique de Picasso et, même, une touche légère immiscée dans une estampe : un personnage, même si abstrait, vêtu de pattes d’eph, clin d’œil aux années 1970 .
Place ensuite aux personnages costumés, où les thèmes du cirque ou encore de la corrida, très prisés par l’artiste, sont mis en avant. L’exposition achemine enfin vers le thème de l’art classique, comme pour renouer avec les débuts de l’art de Picasso. Le jeu des proportions, le modèle, la présence du trait fin… Le tout ramène presque à un cours d’histoire de l’art.
Enfin, la visite s’achève par un film de 1h18, projeté en continu. Pas de panique, nul n’est obligé de rester durant toute la durée. Quelques minutes suffisent pour voir se superposer les traits de Picasso jusqu’à la naissance de l’œuvre finale, dans une sorte de poésie visuelle.
Un lieu de culture ouvert à tous
Depuis maintenant cinq ans, le 21, bis Mirabeau accueille expositions et projets culturels renouvelés tous les trois ou quatre mois. « Des expositions d’une grande qualité », salue Nicole Joulia, vice-présidente déléguée à la Culture du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône.
Elle souligne également la vocation honorable de ce lieu : rendre l’art accessible à tous, quels que soient les milieux sociaux, avec une entrée gratuite.
À noter que tous les mercredis, samedis et dimanches des ateliers d’art plastique sont proposés aux adultes, ados et enfants à partir de 6 ans. L’objectif est d’offrir une nouvelle réflexion sur la gravure et le corps. Ateliers de gravure sur aluminium, atelier dessin cubiste… autant de manières d’explorer le geste et d’apprendre.
Du mercredi au dimanche de 11h30 à 18h30
Entrée libre et gratuite