Nous vous en parlions début septembre : La création d’un restaurant social et solidaire en lieu et place de l’ancien Mc Do Saint-Marthe, situé dans les quartiers Nord de Marseille. Quelques obstacles perturbent l’avancée de ce projet qui est présenté officiellement à la presse ce matin.

Vous n’avez peut-être pas suivi les aventures de l’ancien Mc Do Sainte-Marthe. Le lieu, symbole de la convergence de nombreuses luttes, depuis le combat des salariés du Mc Do et celui des gilets jaunes, transformé depuis le confinement en base logistique pour la distribution de colis alimentaires pour les plus démunis, est au centre d’un nouveau projet qui se veut résolument solidaire et surtout collectif.

Le 11 septembre dernier, nous évoquions sur made in marseille la reconversion de l’établissement en restaurant social et solidaire, géré par une Société coopérative d’intérêt commun (Scic). Pour ce faire, la direction de Mc Donald France a demandé au préalable la constitution d’une association de préconfiguration, pour entamer les discussions. Baptisée « Après », cette association est présidée par Fathi Bouaroua, ancien directeur régional de la Fondation Abbé-Pierre. On retrouve également Kamel Guemari, figure emblématique de la lutte des salariés du Mc Do Saint-Marthe.


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Un ancien McDo des quartiers Nord transformé en restaurant social et solidaire

Pharmacie ou restaurant d’insertion ?

Ces dernières semaines, le projet a quelque peu changé d’orientation. Le restaurant d’application à destination des jeunes et des personnes éloignées de l’emploi est toujours dans les cartons, mais « le montage de ce type de projet nécessite beaucoup de temps, des partenariats complexes, et une intégration au monde de la formation qui ne sera pas facile à réaliser en moins de 24 ou 36 mois », explique Fathi Bouaroua.

La Scic souhaite obtenir l’autorisation de porter ce projet en qualité d’entreprise d’insertion. « Elle donnera ensuite la possibilité d’intégrer, au fur et à mesure, des personnes en formation et de la formation professionnelle. C’est la raison pour laquelle il faut aussi que l’on se déclare publiquement ».

Ce matin, sur place, Fathi Bouaroua et Kamel Guemari tiennent une conférence de presse pour présenter leur idée. Ce jour marque « l’acte de naissance officiel. En dehors du papier, il est important de faire savoir que nous sommes désormais en position de proposer un avenir à ce lieu, même si nos propositions sont encore un peu à affiner », poursuit le président. 

Quelques éléments « inquiétants » ces derniers jours sur la destination du site les poussent « à alerter » sur le fait « que c’est ce lieu que nous voulons, et pas un autre ». Car, en effet, l’équipe à ouï-dire que certains projettent une autre vocation pour l’établissement : sa transformation en pharmacie, portée par un important groupe de la région, bien implanté dans la cité phocéenne. Une information démentie par la société que nous avons contactée.
Par ailleurs, différentes actions contre les occupants temporaires ont été lancées selon le président d’« Après ». « Des assignations et on est venu couper l’eau ». 

Dessiner un nouveau projet pour le territoire

Dans ce contexte, ils attendent aussi « beaucoup de la Ville de Marseille », qui avait accepté de discuter avec le géant américain du fast-food. Le rendez-vous, prévu le 19 octobre avec la municipalité, a été reporté à une date ultérieure. La raison avancée : la situation sanitaire dans la cité phocéenne.

Fathi Bouaroua défend « un projet de territoire », dont la Scic permet d’intégrer tous les acteurs. « On aimerait que les habitants, les toutes petites associations de ces quartiers populaires parmi les plus pauvres, portent ce projet social et économique de leur territoire. Nous pensons que ce lieu doit revenir aux habitants ».


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L’ancien Mc Do Saint-Barthélémy à Marseille, base logistique alimentaire pour les quartiers Nord © N.K.

Mc Do pourrait-il faire don de son établissement ?

Pas de bras-de-fer en perspective cette fois-ci. La discussion est privilégiée pour trouver un terrain d’entente « dans l’intérêt commun. Il ne faut surtout pas participer ou continuer à lutter contre Mc Do ».

Ce temps est révolu. « Notre idée n’est plus de parler du conflit social. Mc Do n’est plus dans le fait de gagner ou perdre un combat social, mais plutôt de se questionner sur la manière de participer au développement social d’un territoire dans lequel il a prospéré et comment rendre aux habitants de ces quartiers une partie de ce qu’il a pu gagner, sans rien perdre ».

L’idéal pour les porteurs du projet serait que Mc Donald’s, dans le cadre notamment de sa responsabilité sociétale (RSE), fasse don de ce bien à une Fondation d’utilité publique ou une collectivité. La Fondation Abbé-Pierre ou encore la Fondation de France, qui ont fait part de leur intérêt dans ce dossier, pourraient être des pistes envisagées.

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Des structures qui mettraient ensuite le bâtiment à disposition de la Scic contre un loyer. Une solution gagnant-gagnant, car le legs est défiscalisé à hauteur de 66 %. « On est dans une logique de dialogue et de développement d’une relation dans laquelle une partie des bénéfices des grandes multinationales pourrait permettre d’aider les territoires ». Une option privilégiée, avant un autre potentiel recours. Dans le cas où Mc Do ne voudrait pas céder, la pression de la préemption exercée par la municipalité pourrait les faire capituler. Ainsi, pour les protagonistes, le rôle de la Ville de Marseille est majeur dans les négociations.

« Choix politiques »

Pour Fathi Bouaroua l’heure des « choix politiques » a sonné. « La Ville doit apporter un réel soutien à la population eu égard du chômage et de ce qui se passe dans ces quartiers en termes d’insécurité et d’avenir de la jeunesse ». « Une jeunesse à qui on peut donner une chance et éviter qu’elle ne parte en perdition », insiste Kamel Guemari.

Certains comme Salim Grabsi, de l’association Le Sel de la Vie, cheville ouvrière de la plateforme de logistique, ne cachent pas leur impatience. « Il faut que les élus comprennent qu’il y a urgence. Il faut qu’ils mènent des actions en direction des QPV (quartiers prioritaires de la Ville) ». Une réponse qui tarde, alors que « c’est un projet structurant qui vise aussi à recoudre le sud et le nord de Marseille ».

« La première étape est de discuter avec Mc Do sur la destination de ce lieu »

De son côté, la Ville a pris la mesure de la situation, mais « la première étape indispensable pour nous est de discuter avec Mc Do sur la destination de ce lieu, pour savoir ce qu’il souhaite en faire. On a besoin de cette première rencontre pour éventuellement se positionner », affirme Laurent Lhardit, adjoint au maire de Marseille, délégué au dynamisme économique. L’hypothèse d’une préemption n’est même pas à l’ordre du jour, tant que les deux partis n’auront pas échangé.

Pour l’élu, le projet « d’Après », « tient la route de ce que nous avons pu en voir » et s’inscrit dans une logique de cohérence dans le quartier. « Notre objectif et la préoccupation de la Ville, c’est bien sûr que ce lieu ait une destination », réaffirme-t-il.

Si la Scic fait valoir « l’urgence », Laurent Lhardit estime que ce « projet s’inscrit dans le long terme, et malheureusement on ne peut pas aller plus vite que la musique, comme on dit ». L’avenir du lieu est conditionné par la rencontre entre Mc Do France et la municipalité, qui devrait avoir lieu dans le courant du mois de novembre. En attendant, par crainte de se voir expulser de l’ancien Mc Do ou que d’autres fassent de meilleures offres, Fathi Bouaroua demande un moratoire.


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L’ancien Mc Do Saint-Barthélémy toujours au service des plus démunis
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