La start-up HSL, anciennement connue comme Hysilabs, a levé 15 millions d’euros cet été pour produire sa molécule innovante, capable de transporter de l’hydrogène. Les cofondateurs cherchent un site de 5000 m2 sur la zone industrielle de Fos.
À 35 ans, Pierre-Emmanuel Casanova a tout d’un hyperactif. Il est aux manettes de HSL (ex-Hysilabs), une cleantech qu’il a cofondée avec Vincent Lôme en 2015. Au cours des assises régionales de l’hydrogène le 12 novembre dernier, le patron a présenté « sa technologie révolutionnaire » devant les professionnels du secteur, avant d’assister au dîner Choiseul Sud qui convie chaque année 100 leaders de moins de 40 ans.
Son innovation permet de charger, transporter, et décharger de l’hydrogène. « Personne ne savait le faire en 2015 », relate l’entrepreneur, également président du réseau Entreprendre. Son équipe d’une quinzaine de personnes a découvert une nouvelle molécule qui agit comme une « éponge liquide ».
Il attrape un stylo pour dessiner un schéma : ce liquide emprisonne le gaz (H2) qui est ensuite transporté dans un camion-citerne pour être libéré. Cela paraît simple dit comme ça. Mais l’innovation, protégée par 12 brevets, a abouti après 10 ans de recherche et développement.
En juin 2023, pour passer au stade de la pré-industrialisation, la start-up a levé 15 millions d’euros auprès d’investisseurs européens. « Sans aucun français », regrette Pierre-Emmanuel Casanova en souriant. Sa vocation internationale lui vaut de changer de nom : Hysilabs devient HSL.
HSL recherche du foncier à Fos
Cette somme conséquente vise à accélérer le développement de la jeune société. « Il nous faut un site industriel de 5000 m2 », nous annonce l’entrepreneur. Son démonstrateur préindustriel, prêt depuis juin 2022, est capable de produire plusieurs kilos de sa molécule.
Pour passer à l’échelle, ce prototype doit se transformer en une « mini-usine » de production. D’ici 2027-2028, les tonnes produites permettront « d’envisager des usines à taille industrielle » de plusieurs milliers de m2 à l’image de la bioraffinerie de la Mède.
L’ingénieur tient « en priorité à trouver du foncier sur Fos. » Il est préférable, d’un côté, que le site soit situé à proximité des salariés à l’Arbois, siège historique de l’entreprise. Et de l’autre, qu’elle soit proche d’une connexion de forte puissance énergétique, de producteurs, et d’un écosystème industriel. « Nous devrions connaître son emplacement début 2024 », assure le cofondateur.
Des États-Unis à Aix-en-Provence
Si le port de Marseille-Fos ne se positionne pas, la pépite pourrait s’en aller du côté de Pau ou de Lyon. Ce qui pourrait être une perte pour les premiers investisseurs régionaux qui ont soutenu HSL depuis le début.
En effet, la start-up est un fruit cultivé sur le territoire. En 2014, l’innovation du « relargage » (décharge) de l’hydrogène est découverte « par hasard » par des chercheurs en chimie d’Aix-Marseille Université (AMU).
Pierre-Emmanuel Casanova, alors en poste aux États-Unis où il achève un master en management des innovations, est « chassé » pour trouver un sens à cette innovation. Après plusieurs voyages dans le monde, il détecte « l’opportunité de marché » de transporter de l’hydrogène.
Avec son associé, ils intègrent alors le Technopôle de l’Arbois en février 2015 pour son riche écosystème Cleantech. « La géographie française, je ne la connaissais pas. Mais quand j’ai rencontré Frédéric Guilleux [directeur du Technopôle, ndlr], j’ai signé », raconte l’ingénieur qui a grandi entre la Guadeloupe et la Nouvelle-Calédonie, et qui est aujourd’hui aussi élu de la Ville d’Aix-en-Provence.
« L’hydrogène ne doit pas tout faire »
Très vite, HSL postule aux prix d’incubateurs et aux concours régionaux. Les cofondateurs récoltent près de 600 000 euros. Et deux ans plus tard, la société lève 2 millions d’euros auprès de Région Sud Investissement (RSI), Cap Création – Crédit Agricole (CAAP), InnoEnergy et le fonds R2V.
Ce tour de table a permis à l’entreprise de tenir deux ans avant de capter 4 millions d’euros de fonds européens en 2021. À ce stade, l’équipe avoisinait encore la dizaine de collaborateurs. Si le Covid-19 a ralenti le développement, l’activité doit reprendre de plus belle grâce aux 15 millions levés et ses presque 40 salariés.
Pour bien entamer 2024, il ne reste plus qu’à trouver un site… Et que l’hydrogène trace son propre sillon. « L’hydrogène va être une vraie alternative aux énergies fossiles, mais il faut qu’il trouve sa place. Il ne doit pas tout faire comme le pétrole l’a fait. En voulant tout faire, on en a oublié la batterie. Il faut donc être très pragmatiques… et plutôt axer son développement sur la mobilité lourde. »