Après l’interdiction progressive du mouillage des bateaux depuis 2021, le Parc national des Calanques va installer des bouées d’amarrage dans plusieurs secteurs. Le dispositif vise à préserver les fragiles herbiers de posidonie, éléments majeurs de l’écosystème méditerranéen, impactés par les ancres des plaisanciers.
Reliefs saisissants, eau turquoise, petites plages, fonds marins saisissants… Le Parc national des Calanques attire trois millions de visiteurs chaque année. Pour une aire naturelle protégée de si petite taille, cette surfréquentation représente un impact problématique pour le milieu. Le gestionnaire a décidé de mieux contenir ces pressions ces dernières années, notamment sur la pratique terrestre du site. Un « permis de visite » va d’ailleurs être expérimenté dès cet été pour limiter la fréquentation de la calanque de Sugiton.
Mais les visiteurs arrivent également nombreux par la mer, en bateau, pour profiter d’une autre perspective, d’un accès direct à l’eau et d’un petit espace de bronzage privatif. Et si c’est moins visible, ils impactent tout autant la faune et la flore. Sous l’eau, au-delà des pressions sonores et des pollutions des navires, les ancres de mouillage représentent un danger bien identifié.
En particulier pour les herbiers de posidonie. Cette plante marine est un élément majeur dans l’écosystème méditerranéen. Pour la faune d’abord, à qui elle sert d’habitat, ou de « nurserie » aux jeunes poissons qui y grandissent en sécurité des prédateurs. Elle protège également les côtes de l’érosion en atténuant la houle. Enfin, elle représente un outil puissant de lutte contre le réchauffement climatique par sa grande capacité de stockage de carbone (jusqu’à 1 500 tonnes par hectare, plus que la forêt). On la qualifie notamment de « poumon de la Méditerranée » pour sa production d’oxygène.
Les interdictions pleuvent en 2021
La question de la préservation des fonds marins est donc devenue centrale pour le Parc national. Le gestionnaire a lancé une large concertation dès 2019 avec tous les acteurs concernés, des professionnels du nautisme aux institutions publiques et associations. Le conseil d’administration de l’aire protégée a adopté un Schéma global d’organisation des mouillages en décembre 2020.
Dès 2021, le préfet maritime de la Méditerranée signait trois arrêtés visant à encadrer plus strictement l’ancrage des navires dans le secteur. Du Frioul jusqu’à la baie de la Ciotat et de Saint-Cyr, les yachts de plus de 24 mètres ont été repoussés au large. Ils ne peuvent stationner que par des fonds de plus de 30 mètres.
Pour les plus petites embarcations, le mouillage est devenu strictement interdit sur les herbiers et doit se concentrer sur les zones sableuses. Cette mesure concerne le Frioul (Eoube, Port de Banc, Port Pomègues) la rade de Marseille (Pointe-Rouge) les baies de Cassis et de la Ciotat. Et évidemment les Calanques, avec Marseilleveyre, Riou, En-Vau et Port-Pin. Ces deux dernières sont désormais strictement interdites au mouillage. L’application de ces interdictions s’accompagne d’une surveillance et une sensibilisation renforcées auprès des plaisanciers.
Des bouées de mouillages pour remplacer les ancres en 2024
« L’année 2021 a été celle des règlementations et des interdictions concernant les mouillages », précise Nicolas Chardin, directeur adjoint du Parc national des Calanques. « Désormais nous entrons dans une phase d’aménagements pour des mouillages respectueux du milieu ».
En effet, « il est souvent difficile de distinguer les herbiers de la surface ». C’est pourquoi le plan prévoit des installations, principalement des bouées d’amarrage. Fixées au fond dans des zones précautionneusement sélectionnées, elles permettent aux plaisanciers de s’y amarrer directement, sans jeter l’ancre.
7 sites ont été identifiés pour l’installation de ces bouées d’ici 2024 : « à l’ouest de Pomègues au Frioul, à Marseilleveyre, Sormiou, dans la calanque des Pierres Tombées à Morgiou, sur l’île Verte à la Ciotat, dans la baie de la Ciotat et à la Pointe Grenier, à Saint-Cyr-sur-Mer », précise le directeur adjoint. « Le mouillage deviendra obligatoire sur ces équipements ».
Les groupes privés investissent dans la préservation de la nature
Achat des équipements, entretien, maintenance, adaptation en fonction des saisons, surveillance… Le projet aura un coût. Pour le financer, le Parc pourra compter sur l’engagement de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, ainsi que les collectivités publiques concernées.
À noter que les groupes privés investissent de plus en plus dans des projets environnementaux, pour prétendre à la labellisation bas-carbone. C’est le cas de la société spécialisée dans les data centers à Marseille, Interxion. Elle a engagé une démarche de financement et de partenariat innovante avec le Parc des Calanques sur le projet Prométhée-Med, dédié à la préservation de la posidonie.