Face aux problématiques de surfréquentation du Parc national des Calanques et des comportements inappropriés en zone naturelle protégée, l’institution a décidé de renforcer et de réinventer sa communication à destination des publics urbains et touristiques. Des jauges limitées sur certains sites « ne sont pas exclues dès cet été ».
La surféquentation du Parc national des Calanques. Le sujet est sur le devant de la scène depuis plusieurs mois déjà. La fréquentation record de l’été dernier est dans toutes les mémoires. Des pics à 3 000 visiteurs par jour et 2,3 estivants par mètre carré de plage. Car la zone naturelle protégée est également un site de baignade idyllique aux paysages exceptionnels à quelques kilomètres du centre-ville de la deuxième ville de France. Cela explique, en partie, l’engouement pour cet espace à l’heure de crise sanitaire, au sortir des confinements et en raison des restrictions dans les déplacements et voyages.
« On a eu un afflux de fréquentation de 50 % à 100 %. On attend encore beaucoup de monde cette année », lance le directeur du Parc national, François Bland. Son président, Didier Réault, espère une légère accalmie : « L’année dernière, les cinémas, les salles de spectacles, les festivals, les centres commerciaux étaient fermés. Les touristes n’avaient pas grand-chose d’autre à faire ». Toutefois, avec un tel succès l’été passé, un effet d’entrainement est à prévoir cette saison.
Après les aménagements et restrictions d’accès par mer et par terre, les deux responsables présentaient, vendredi 8 juillet, le dispositif estival de communication et de sensibilisation. Des mesures « complémentaires » pour tenter de réduire les nuisances de la surfréquentation pour une nature fragile et protégée.
« Il faut laisser les comportements urbains hors du site »
D’abord en renforçant la présence d’agents sur le terrain. « Cette saison, nous avons 24 écogardes qui patrouillent pour rappeler les bons gestes, 9 écovolontaires positionnés aux portes d’entrée du site pour sensibiliser les arrivants », énumère François Bland. Sans compter 14 gardes régionaux forestiers et leurs missions de surveillance, mais surtout d’information et de sensibilisation. « C’est notre premier rôle », rappelle Lola, garde régionale. « Avec la population urbaine, moins connaisseuse et sensible à la nature, c’est intéressant. Il faut trouver des arguments, la bonne approche ».
Car le Parc national des Calanques à la particularité d’être un espace naturel en zone urbaine. « C’est le troisième ou quatrième parc métropolitain au monde, avec Sidney, le Cap et Rio », explique Didier Réault. « Nous avons la difficulté de faire vivre la nature avec le brouhaha métropolitain ».
Ce parc attire « beaucoup d’urbains » poursuit le président, quand d’autres sont surtout fréquentés par des amateurs de nature, avec une forte sensibilité pour les questions environnementales. « Il faut laisser les comportements urbains hors du site », reprend-il, en évoquant les voitures, les barbecues, les enceintes portables, les chichas et cigarettes, mais surtout les déchets.
L’art pour ouvrir le dialogue avec la nature
Comment nouer le dialogue et toucher ce public ? Le Parc national « invente et innove », répond le directeur François Bland. En plus de la présence humaine accrue sur le terrain, des stands ludiques et pédagogiques s’installent aux entrées du site. Comme la « Calanques mobile » présentée ce matin. Le camion permet de déployer des animations, des présentations, et même de projeter des films de sensibilisation.
« Les arts sont un excellent moyen d’instaurer une nouvelle forme de dialogue », poursuit le directeur. Cette année, le théâtre fera son entrée dans le spectacle naturel des calanques, avec des performances « inattendues et originales. Pour surprendre et interpeler de manière ludique ». Comme la compagnie Bloob, que les baigneurs et plagistes auront la surprise de voir surgir de l’eau pour les interpeller sur la question des déchets.
À l’entrée du parc, le duo d’échassiers Mister Yes et Mister No (Compagnie l’Art à bord) accueilleront les visiteurs avec des saynètes humoristiques sur les bons et mauvais gestes à adopter en nature.
L’office du tourisme en renfort pour… « détourner » les touristes
Enfin, le parc mise sur la communication numérique. L’appli mobile « Mes Calanques », lancée en 2019, permet d’accéder à de nombreuses informations sur les itinéraires, les activités, la faune et la flore, et l’ouverture des massifs. Une mise à jour sera fonctionnelle mi-juillet pour connaître en temps réel le niveau de fréquentation des sites. Le parc espère dissuader les visiteurs en cas de saturation, pour justement la limiter.
Dans la même optique, l’Office métropolitain de tourisme de Marseille s’implique cette année aux côtés du parc. Son directeur, Maxime Tissot, reconnaît « l’ambiguïté » de limiter l’afflux de touristes quand son institution est censée en attirer. « Mais la surfréquentation renvoie une mauvaise image et une expérience négative. Nous préférons améliorer la qualité de l’expérience du visiteur sur le territoire. Ne pas le dissuader de venir, mais plutôt de venir dans des périodes calmes pour profiter vraiment de la nature ».
L’office métropolitain de tourisme déploiera notamment 16 agents dans le parc pour informer les visiteurs sur les autres activités, de nature ou non, que la région marseillaise propose. Et elle n’en manque pas, même si les Calanques captent toute la lumière ces dernières années.