La Ville de Marseille marque aujourd’hui son désaccord avec la stratégie de développement du Club de la croisière, en coupant sa participation financière. Un « non événement » pour la structure, qui « travaille depuis 5 ans » sur les questions environnementales. Les compagnies de croisières pourront reprendre leurs activités à partir du 30 juin.
« En désaccord avec la stratégie de développement touristique et les récentes prises de position du Club de la croisière Marseille-Provence, la Ville de Marseille a décidé de ne pas renouveler son adhésion en 2021 ». C’est par communiqué que la municipalité annonce son retrait de cette structure réunissant une cinquantaine d’acteurs, publics et privés, impliqués dans l’activité de croisière à Marseille.
Une rupture consommée, donc, qui fait suite à une première alerte envoyée lors du conseil municipal de décembre 2020. L’hémicycle votait alors la baisse de sa participation financière, de 70 000 euros à 30 100 euros. À l’époque, Laurent Lhardit, adjoint à l’économie, relativisait ce désengagement. D’abord car l’implication financière totale de la Ville, en comprenant son adhésion, était tout de même maintenue à 50 000 €. Ensuite pour des questions de priorisation des budgets en période de crise. Le maire profitait toutefois de ce vote pour pointer la question de l’impact environnemental des bateaux de croisière à Marseille.
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« On a d’autres aspects à prendre en compte que l’impact économique de la croisière »
En effet, ces immenses navires sont régulièrement pointés du doigts pour la pollution de l’air qu’ils génèrent lorsqu’ils sont à quai. Malgré l’arrêt de l’activité durant la crise sanitaire, une étude d’Atmosud estime qu’ils ont pollué six fois plus depuis le confinement. La question environnementale motive aujourd’hui la fin de l’adhésion de la Ville. En particulier « les récentes prises de position du Club de la croisière Marseille-Provence » évoquées par le communiqué. Il fait référence aux propos du président du Club de la croisière, Jean-François Suhas, chez nos confrères de Marsactu, où ce dernier remet en cause la validité de l’étude d’Atmosud.
« Pour nous, ce n’est pas tenable », explique Laurent Lhardit. Il attend notamment du club qu’il suive la municipalité dans sa stratégie de développement d’un tourisme « responsable et durable […] On a d’autres aspects à prendre en compte que l’impact économique de la croisière ». Mais même sur cette question, l’adjoint à l’économie déplore une stratégie « quantitative » contre celle de « la qualité de l’impact économique des voyageurs ». Elle pourrait générer des retombées tout aussi intéressantes, selon lui.
« Les compagnies devront ces prochaines années envisager une mutation rapide de leur modèle de développement, en prenant en compte les aspirations citoyennes, les enjeux environnementaux et l’optimisation des impacts économiques de leurs activités auprès des communautés locales », développe l’élu. Il affirme notamment n’avoir « pas eu de réponse de leur part [le Club de la croisière] » concernant ces orientations.
La transition énergétique, « on y travaille depuis 5 ans. C’est notre ADN »
Mais de son côté, Jean-François Suhas fait valoir l’inverse. « Monsieur Lhardit a participé à certaines de nos réunions, sans prendre position. Je demande des rendez-vous depuis des mois, sans réponse ». Concernant la transition énergétique de l’activité de croisière, « on y travaille depuis 5 ans. C’est notre ADN. Je serais ravi qu’elle [la mairie] s’implique et participe sur ces questions. Là ce serait un événement », glisse-t-il, considérant que le départ de la Ville n’aura que peu de conséquence sur l’économie, voire la gouvernance du club de la Croisière.
D’autant que pour compenser cette perte financière, le conseil départemental des Bouches-du-Rhône vient de son côté de voter une augmentation de la subvention de fonctionnement de 20 000 euros par rapport aux années précédentes. Elle se porte désormais à 80 000 euros contre 60 000 euros en 2020, auxquels s’ajoutent les 20 000 euros de cotisation annuelle.
Par ailleurs, un plan du Port maritime de Marseille-Fos prévoit d’équiper électriquement les terminaux de croisière entre 2022 et 2025, leur permettant de couper les moteurs à quai pour réduire la pollution. « On ne peut plus juste dire « électrification » », réagit Laurent Lhardit. Il estime notamment que cette mesure ne va pas assez vite. « On a des problèmes de santé publique et environnementaux. On ne peut plus dire aux Marseillais qu’il faut attendre ». S’appuyant sur le port de Venise, désormais interdit aux grands navires de croisières, il considère que « Marseille peut devenir un fabuleux terrain d’expérimentation » pour la croisière responsable.
Jean-François Suhas s’en remet quant à lui à l’autorité de l’État qui a récemment « autorisé la reprise des activités de croisière au 30 juin. Les compagnies MSC et Costa croisières ont déjà déposé des demandes pour les escales marseillaises. Mais il n’y aura pas d’engorgement des ports cet été », assure-t-il, car « la reprise sera progressive ».
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