La majorité municipale marseillaise a lancé une modification du plan local d’urbanisme intercommunal afin d’y inscrire ses orientations. 75 propositions ont été adressées à la Métropole, dont plusieurs axes prioritaires sur la préservation des terres agricoles, la production accrue de logements locatifs sociaux ou encore la rue d’Aubagne. La Métropole regrette une « méthode de travail, pour le moins étonnante ». 

Dans le cadre de sa politique foncière, urbanistique et pour la préservation des terres agricoles, la Ville de Marseille avait annoncé son intention d’intervenir sur le PLUi. Adopté fin 2019 et en vigueur depuis janvier 2020, le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) est un document dit « vivant », car il est amené à évoluer au fil du temps.

Deux trains modificatifs ont débuté en fin d’année : une première phase – qui se termine dans quelques semaines – vise à réparer les oublis et des erreurs de cadastres, apporter des corrections formelles. Une seconde, plus ambitieuse, permet aux 18 communes du Conseil de territoire Marseille Provence (CT1) de demander de fixer de nouvelles orientations, des évolutions et/ou modifications de zonages.

Trois adjoints au maire sont ainsi venus présenter les grandes orientations de la nouvelle modification du PLUi, le 12 avril, car « la Ville compte jouer tout son rôle » en matière d’urbanisme et de logement. La Ville entend ainsi montrer sa capacité à agir, en formulant plus de 70 propositions à la Métropole Aix-Marseille Provence, parmi lesquels quatre qui revêtent un caractère prioritaire.

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Vers la sanctuarisation de 20 hectares de terres agricoles

Pour renforcer sa politique de protection, de valorisation des terres agricoles et les fameux 20 hectares (des parcelles de 3 à 5 hectares) qu’elle entend sanctuariser, la Ville demande à la Métropole d’acter le passage de zones classées AU (à urbaniser) en foncier agricole. En priorité sur trois quartiers marseillais : Château-Gombert, Les Caillols et Les Camoins. « À Marseille, la transition agricole est enclenchée », s’enthousiasme Aïcha Sif, adjointe en charge de l’alimentation durable, l’agriculture urbaine et la préservation des sols. « Cela veut dire que très prochainement des agriculteurs en attente de foncier vont pouvoir s’installer sur ces terres en pleine ville et commencer leurs productions en circuit court », ajoute l’élue, confiante sur l’issue positive de la demande.

Ces derniers seront sélectionnés dans le cadre d’un appel à projets. Comme le dernier porté par la Métropole Aix-Marseille-Provence en collaboration avec la municipalité qui a permis à cinq nouveaux agriculteurs urbains bio de s’installer du côté de Sainte-Marthe et Saint-Menet. Ils remettront en culture 11,5 hectares de terres en friche dans la ville.

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Pour poursuivre la démarche engagée, d’autres « périmètres d’attente » sont proposés dans les secteurs de Château-Gombert, Saint-Mitre, Porte L2, « afin de geler des secteurs sur lesquels il y a une très forte spéculation immobilière et faire en sorte que, pendant la durée de ce « périmètre d’attente » d’une durée de 5 ans, on arrête les compteurs, qu’on fasse des études pour savoir comment le quartier pourra évoluer, qu’on étudie les dynamiques et qu’on prenne les décisions à ce moment-là », précise Mathilde Chaboche, adjointe déléguée à l’urbanisme.

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30 logements par opération et 2 000 m2 de surface de plancher

La Ville de Marseille compte sur une modification du PLUi pour corriger la situation caractérisée par un fort déficit en logement très social. Le PLUi impose des servitudes de mixité sociale à partir de 80 logements. « C’est extrêmement élevé dans une ville où une bonne partie du territoire ne permet pas la construction de logements sociaux, comme dans les quartiers de la politique de la ville (QPV) », note Patrick Amico, adjoint en charge de la politique du logement et de la lutte contre lʼhabitat indigne.

L’État a demandé à Marseille la production de 2 500 logements par an dans les trois ans à venir. Ainsi, l’une des mesures phare est l’abaissement de la servitude de mixité sociale à 30 logements par opération et 2 000 m2 de surface de plancher. « Nous demandons 30% de logements sociaux par opération, avec un taux de PLAI (logement très social) d’au minimum 25%, car c’est le taux auquel nous devons arriver en 2025, et nous sommes très très loin aujourd’hui », ajoute l’adjoint.

Baisser la taille des opérations à partir desquelles il devient obligatoire de faire du logement social permet d’en réaliser en centre-ville. « Il y a très rarement des programmes de 80 logements en raison de rareté de grands terrains fonciers en centre-ville, mais on peut avoir des opérations à 30 logements et 2 000 m2 de surface de plancher. Abaisser le seuil de manière drastique va permettre de mieux dispatcher le logement social sur le territoire, notamment en centre-ville », explique Mathilde Chaboche.

Elle annonce d’ores et déjà que la prochaine modification du PLUi (soit une par an) « ira plus loin, avec un seuil modulé selon les arrondissements », reposant sur une analyse fine des besoins par quartiers.

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Parmi les propositions phares, la Ville souhaite la préservation de l’espace des effondrements – plus communément appelé la « dent creuse » – avec pré-emplacement réservé en attendant de décider avec les habitants du devenir du site. La municipalité veut entamer un « vrai travail d’échanges » avec les riverains, les associations… pour construire « ensemble ce qui va pouvoir se faire à cet endroit-là », poursuit l’élue, qui insiste sur le respect du patrimoine ordinaire de la ville, qui participe à l’histoire de la cité.

Pour que le haut de la rue conserve « son identité populaire », l’adjointe à l’urbanisme demande qu’un périmètre précis soit défini « avec des règles spécifiques en urbanisme » visant à la réalisation d’au moins 70% de logements sociaux. Une manière de permettre aux « gens qui seront expulsés ou expropriés dans le cadre de la DUP menée par la Métropole puissent y être réintégrés dans de bonnes conditions décentes et dignes ».

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Des cheminements piétons pour les écoliers

Enfin, il est demandé à la Métropole de créer des cheminements piétons entre les copropriétés fermées et privées pour créer des chemins d’écoliers. « Nous sommes la ville de France où il y a le plus de voiries privées, près de 30%. Par exemple, sur la cité de la Cravache, une centaine d’écoliers ne peuvent pas passer par deux co-propriétés fermées, et doivent faire un détour de 1,5 kilomètre pour se rendre dans leurs écoles respectives chaque matin », poursuit Mathilde Chaboche.

Dans le cadre d’un travail collaboratif avec la Métropole, l’élue dit être « l’écoute des retours de ses techniciens », rejetant les considérations politiques. Elle refuse que les élus qui siègent dans l’hémicycle métropolitain – notamment ceux de l’opposition municipale marseillaise – « se permettent en lieu et place de la commune de Marseille d’avoir un avis sur son devenir politique et l’ambition sur le territoire. Nous méritons le même degré de bienveillance et de respect que les autres communes ».

La Métropole dénonce une « consultation surprise de la gauche marseillaise »

Les 75 propositions ont été adressées à la Métropole Aix-Marseille Provence lundi 12 avril, laquelle n’a aucune obligation d’accepter les doléances de la Ville de Marseille. D’ailleurs, en début de soirée, par voie de communiqué de presse, la Métropole s’est étonnée de cette « concertation surprise de la gauche Marseillaise », alors que s’ouvre la concertation publique relative à la préparation de la modification n°2 du Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi) du Territoire Marseille Provence. Elle regrette « une méthode de travail, pour le moins étonnante ». 

« Alors que depuis plusieurs mois, des réunions de travail régulières et positives laissaient entrevoir la production d’un document porteur d’une vision partagée, Marseille est, en effet, la seule des 18 communes du Territoire Marseille Provence à préférer le passage en force au dialogue constructif ».

Elle précise que « les services compétents vont désormais faire une analyse fine et rigoureuse des propositions présentées par la Ville de Marseille et vérifier leur conformité technique et juridique, afin de s’assurer de leur cohérence avec l’orientation du document d’urbanisme ». [lire ici].

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