Quatre mois après le drame marseillais qui a fait 8 morts, la ville a lancé un projet urbanistique dans la rue d’Aubagne et entend mettre la main sur sept immeubles. Alors que les craintes se font sentir du côté de la population sur la « gentrification » du quartier, une question se profile à l’horizon : quel avenir à l’emplacement des immeubles effondrés ?

Le 5 novembre 2018, le drame de la rue d’Aubagne endeuillait Marseille. L’effondrement de deux immeubles dans le quartier de Noailles entraînait la disparition de huit personnes. L’événement mettait au grand jour la problématique profonde de l’habitat indigne et dangereux dans la deuxième ville de France. Démarrait alors un audit d’urgence à grande échelle sur l’état des logements dans le quartier. Il entraînait l’évacuation d’environ 250 immeubles jugés dangereux. Face à cette crise, une série de mesures d’urgence ont été déclenchées par les collectivités et l’État à Marseille.

Quatre mois plus tard, la question de l’avenir de ce quartier populaire à forte identité se pose donc pleinement. « Notre objectif à long terme est de concevoir un nouveau projet urbanistique pour la rue d’Aubagne, qui s’inscrira pleinement dans l’esprit et l’environnement du quartier et intégrera de nombreux logements sociaux », a annoncé le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, vendredi 1er mars. La ville a décidé de suivre les recommandations d’un récent rapport d’experts. Elle réquisitionnera sept immeubles de la rue d’Aubagne. « Nous prendrons le temps nécessaire afin de réaliser une opération de maîtrise foncière et d’urbanisme en réalisant des procédures à l’amiable et, si nécessaire, des expropriations dans le cadre d’une Déclaration d’Utilité Publique (DUP) »

Le collectif du 5 Novembre – Noailles en colère, exprime pourtant des inquiétudes naissantes au sein de la population du quartier. Marie Batoux, membre du collectif, craint notamment que le quartier soit « laissé aux mains des spéculateurs et promoteurs et que l’effondrement accélère la gentrification. Les habitants souhaitent une consultation globale sur le secteur. » De leur côté, le ministre du Logement, Julien Denormandie, et les élus locaux, se sont engagés à préserver le caractère populaire de Noailles. Certains, comme la maire de secteur Sabine Bernasconi (LR), rappellent que c’est la ville et non des promoteurs qui prennent possession de ces immeubles.

, À Noailles, après les effondrements vient la question de l’avenir de la rue d’Aubagne, Made in Marseille
Le permis de louer expérimenté dans le quartier de Noailles à partir du 15 octobre

Quel avenir à l’emplacement des immeubles effondrés ?

Une délicate question commence à émerger concernant le trou béant laissé au 63 et 65 rue d’Aubagne : quel est son avenir ? Marie Batoux, qui a participé aux premières réunions citoyennes à la suite du drame, nous explique que « très vite les gens se la sont posée. Ce qui ressortait, c’est que les gens ne voulaient pas de nouvelle construction ici. Plutôt un espace de vie et de commémoration pour les personnes disparues, un espace ouvert, public, pourquoi pas de jeu. Il est encore tôt pour décider, mais on sera présent pour en discuter ».

La maire de secteur, Sabine Bernasconi semble aller dans ce sens : « ça demande encore du temps de réflexion, et il faut que les habitants décident. Mais, ça me paraît impensable de reconstruire. Personnellement, je préférerais un lieu de mémoire ». Une position que soutient également la présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence, Martine Vassal : « C’est à la population de trancher, pas à moi. Mais je pense que cet endroit là, il faut le sanctuariser ».

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L’emplacement du 63 et 65 rue d’Aubagne aujourd’hui

Certains habitants vivant à proximité du lieu ont également leur avis sur la question. Parmi ceux que nous avons rencontré, la majorité préfère également en faire un lieu de mémoire. Comme ce jeune homme vivant à 20 mètres au dessus du 65 : « on ne peut pas reconstruire sur un cimetière. Il faut respecter la mémoire des disparus ». 

« Moi, j’habite en face, au deuxième étage. Ma fenêtre donne sur l’emplacement des immeubles effondrés », tempère une dame, « personnellement, je ne veux pas penser à ce drame chaque fois que j’ouvre mes volets. Si ils en font un lieu de mémoire, j’espère qu’ils en feront un lieu vivant ».


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