La Région Sud et la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire ont présenté une stratégie 2024-2030 pour devenir un modèle en France.

Quel est le point commun entre l’atelier de confection Fil rouge, l’entreprise de gestion des déchets Lemon tri, et le groupe de l’insertion par l’emploi La Varappe ? Ce sont toutes des structures de l’Économie sociale et solidaire, appelée « ESS ». À l’échelle régionale, ce pan de l’économie représente 7% du PIB et 10% des emplois.

Cette économie à part entière, basée sur l’intérêt général plutôt que sur les profits, n’est encadrée par la loi que depuis 2014. Sont ainsi apparues les Chambres régionales de l’Économie sociale et solidaire (CRESS) dans chaque région pour aider à structurer les différents modèles possibles : associations, fondations, mutuelles et coopératives.

Dix ans après, il reste encore du chemin. C’est pourquoi la CRESS Paca et la Région Sud lancent ce 5 novembre une stratégie échelonnée sur six ans pour devenir la région « championne de l’ESS d’ici 2030 », affirme Denis Philippe, président de la Chambre, dans l’Hôtel de Région.

Renforcer l’économie sociale et solidaire

Une myriade de professionnels tendent l’oreille, attentifs à cette promesse. Son premier axe fondateur vise à « renforcer » l’ESS pour la rendre plus visible. Et comment ? En faisant émerger des projets, certes. Mais surtout en donnant envie aux nouvelles générations de s’y projeter et… d’y rester.

Ce volet est particulièrement urgent dans la « silver économie » (économie des seniors) qui a perdu de son attractivité, notamment depuis le scandale Orpea. « Près de 30% des emplois sont en tension dans ce milieu », alerte une experte dans l’assemblée qui craint une « catastrophe sanitaire ».

Plus globalement, Élisa Yavchitz, fondatrice et directrice de l’association Les Canaux et grande témoin de cette matinée, relève la nécessité « de se doter d’une vraie politique RH et d’une grille de salaires comparable à l’économie classique ». Autrement dit, bannir la précarité.

Favoriser l’accès à la commande publique

Mais pour ce faire, les structures doivent encore trouver des modèles économiques viables, qui ne dépendent pas que des subventions. D’autant plus depuis les coupes budgétaires annoncées par Michel Barnier il y a quelques semaines.

La Région Sud souhaite donc aider les structures de l’ESS à répondre aux appels à projets lancés par l’État ou les collectivités locales, comme l’a fait l’atelier Fil Rouge avec Décathlon pour produire 103 000 pièces des tenues qui ont habillé les volontaires des Jeux olympiques 2024.

« Les gros donneurs d’ordre nous obligent à entrer dans la cour des grands avec de nouveaux process et à trouver notre place industrielle », partage Annie Carrai, co-fondatrice de l’atelier de confection marseillais.

Pour concrétiser cet élan, un chef d’entreprise sociale, installé dans le public, propose « d’inclure le critère technique de la coopération » dans les marchés publics pour faire systématiquement travailler les acteurs de l’ESS. Tous applaudissent.

Développer les liens avec les entreprises « classiques »

Pour Margot Girard, directrice de l’entreprise d’insertion par l’emploi Evolio du groupe La Varappe, il faut aussi « décorréler les marchés publics de la productivité ». Et répondre en « co-traitance » au lieu de répondre en « sous-traitance ».

Elle propose concrètement de multiplier la co-création d’entreprises entre une structure de l’ESS et une entreprise pour partager les coûts et les risques, comme La Varappe l’a fait avec le groupe Vinci pour l’entreprise d’insertion Ïnva.

Co-entreprendre permet également aux structures de « pouvoir investir dans des machines et des bâtiments », rappelle Élisa Yavchitz. L’enjeu du financement est en effet revenu comme une ritournelle durant les échanges.

Un comité de financeurs pour l’ESS

La Région Sud avait déjà lancé un fonds de 10 millions d’euros pour l’ESS en 2020. La collectivité estime consacrer près de 100 millions d’euros à cette économie durant son mandat.

Mais cette année, la Banque des territoires, France active et le Crédit coopératif, annoncent la création d’un comité de 25 partenaires financeurs (cinq banques, des collectivités, la CRESS, la Région Sud…) pour renforcer l’accompagnement des acteurs.

Ce nouvel organe doit permettre de « rassurer » les autres investisseurs pour faire grandir l’ESS. Il délivrera, au début du printemps 2025, un baromètre précis de ces structures pour « mieux mesurer les trous dans la raquette » et leur donner du fil à retordre.

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