L’Après M imagine son monde d’après. Le McDonald’s transformé en restaurant solidaire et en banque alimentaire dans les quartiers Nord de Marseille recherche 300 000 euros pour « souffler un peu ».
Lancé avec beaucoup d’enthousiasme en mars 2020, l’Après M bat de l’aile. « Est-ce l’inflation ? La localisation dans le Nord ? La L2 ? », se demande à voix haute Mohamed Fahem, bénévole depuis la création du fast-food solidaire, aux côtés des figures emblématiques du projet Kamel Guémari et Fathi Bouara. Ses questions restent en suspens. « Mais redémarrer une machine qui s’est éteinte pendant le Covid, c’est complexe », admet-il.
À l’aube du premier confinement, ces Marseillais se sont affairés à récolter et redistribuer plus de 1 000 colis alimentaires. Constitué en partie d’anciens salariés du McDo, fermé en 2019 faute de rendements suffisants, le petit groupe s’étoffe rapidement. Ils réussissent à obtenir le statut de banque alimentaire auprès du Département des Bouches-du-Rhône. « Pas sans difficulté », concède Mohamed Fahem. Aujourd’hui, en moyenne 700 colis sont distribués chaque lundi aux familles marseillaises en situation de précarité.
Pour égayer le lieu, situé en lisière de la L2, les bénévoles repeignent la façade en rose et bleu. Depuis le début de l’aventure, ils ont nourri le rêve d’y créer un restaurant solidaire autonome afin de redonner vie au quartier. Et ils l’ont fait en juin 2021, après que la Ville de Marseille a racheté les murs à la firme américaine pour 600 000 euros.
Avec une énergie débordante, ils développent le burger signature l’Ovni en partenariat avec le chef triplement étoilé Gérald Passédat. « Les gens nous disent ‘Ah ouais d’accord, Passédat’, raconte Mohamed Fahem. Ça permet de ramener du monde et c’est le burger qu’on vend le plus ! ». Près de 25 personnes en emplois d’insertion, financés en partie par l’État, sont recrutées pour faire tourner les commandes.
Lancement d’une cagnotte
Ce coup marketing et les quelque 800 000 euros de chiffre d’affaires estimés en 2023, ne suffisent pas pour autant. Animer le restaurant nécessite « au moins 300 000 euros » supplémentaires par an. Il faut compter le loyer de 2500 euros mensuel versé à la mairie, les salaires, les charges en eau et en électricité. Et notamment la mise en place d’un méthaniseur transformant les déchets alimentaires en énergie.
Au lancement, les bénévoles ont tenté d’obtenir une subvention d’aide au démarrage « d’environ 200 000 euros » versée par la Région Sud, compétente en matière d’économie sociale et solidaire (ESS). Sans succès. « Comme on dit chez nous, on peut ne pas porter le même maillot, mais on a tous la même transpiration », nous lance Kamel Guémari avec son sens de la formule habituel, qui « souhaite toujours que la Région nous aide ».
Contacté, le président Renaud Muselier émet toujours ses réserves sur le projet. « Depuis le début, le modèle économique n’est pas viable. Tant qu’on ne nous présente pas un modèle économique qui fonctionne, on ne se positionnera pas », nous confie ce dernier.
Le mécénat envisagé
Alors, les bénévoles « se remuent les méninges pour savoir à quelle porte frapper. » En septembre, L’Après M a orchestré un concert avec Freeman et Faf Larage pour relancer une campagne de dons. Une cagnotte Leetchi a été ouverte dans la foulée. Elle affiche aujourd’hui un peu moins de 10 000 euros au compteur sur les 300 000 euros espérés.
Le mois dernier, certains bénévoles sont partis avec leurs machines de l’Ovni sous le bras au City center de Marseille (1er) pour cuisiner et vendre leurs burgers. Cette initiative a bien fonctionné, s’accordent à dire les participants.
D’autres ont présenté L’Après M devant des donateurs et potentiels mécènes au Mucem. S’ils restent à l’écoute des propositions : « On ne veut pas que quelqu’un nous dicte quoi faire et pilote le projet à notre place », prévient toutefois Mohamed Fahem.
Sans perdre leur but en tête, les bénévoles ont démarré hier soir une grande distribution de 14 000 chaussures et vêtements de la marque Babolat pour les sans-abri. « On espère leur mettre un peu de baume au cœur jusqu’à Noël », souffle Kamel Guémari.