Le 2 juin, le maire de Marseille annonçait le rachat par la Ville de l’ex-Mc Do de Sainte-Marthe. La procédure a été amorcée ce vendredi 9 juillet à l’occasion du conseil municipal contre l’avis de l’opposition.

Ça y est ils ont les clés. C’est un épilogue qui marque l’ouverture d’un autre tome de l’histoire de l’Après-M. Cette histoire, née durant la crise sanitaire dans les quartiers Nord de Marseille, nous vous la racontons depuis son origine, lorsqu’aux premières heures du confinement en 2020, l’ancien Mc Do de Sainte-Marthe (14e) se transforme en plateforme logistique pour la distribution de repas aux plus précaires ; puis au fil des mois se mue en projet social et solidaire avec la création de l’Après-M. 

Placé en liquidation judiciaire en décembre 2019, le lieu est devenu un véritable hub solidaire, symbole de nombreuses luttes contre le chômage, la précarité et la désertification du quartier, au sein duquel le mot d’ordre reste l’entraide.

Occupé de manière illégale par les anciens salariés de Mc Do, les bénévoles avaient lancé, en mai, un appel aux fonds baptisé « la part du peuple » pour racheter officiellement ce site et le transformer en fast food solidaire. Parallèlement, la Ville avait débuté des négociations avec Mc Do France pour trouver des solutions, avant d’annoncer le 2 juin dernier qu’elle s’en porterait finalement acquéreuse.

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Payez-vous une part du futur fast-food social l’Après-M dans les quartiers Nord L’Après M © DR

« C’est un lieu important, un lieu emblématique, qui peut être le pivot d’une recomposition de l’aménagement de ces quartiers et qui fera l’objet d’une réflexion sur son devenir par la suite », annonce Mathilde Chaboche, adjointe en charge de l’urbanisme, en présentant la délibération visant à faire approuver ce rachat à 600 000 euros (hors frais et hors taxe), vendredi 9 juillet en conseil municipal, sous les yeux des porteurs de projets.

« Un moment important », exprime, à son tour, le maire de Marseille. C’est un rapport « qui dit que lorsque les Marseillais-es décident de leur destin, quand ils considèrent qu’ils ont un rôle à jouer dans la ville, et que leur histoire, n’en déplaise à certains, doit se confondre avec celle de la ville de Marseille, les choses sont possibles. C’est un rapport qui dit la possibilité de faire et de construire une ville différente et qui dit aussi le rôle et le sens que doivent avoir les collectivités territoriales ».

Un menu difficile à digérer pour l’opposition

Ce n’est pas de l’avis de l’opposition. Cédric Dudieuzère du Rassemblement national dénonce « une réquisition de l’établissement, squatté par une partie de ses anciens salariés au mépris du respect de la propriété privée », ainsi que le coût du rachat alors que les finances de la Ville sont « dans le rouge écarlate ». Pour l’élu, il s’agit d’une « décision incompréhensible » contribuant à ouvrir« une boîte de Pandore. Vous soutenez les squatteurs, nous soutenons les entrepreneurs  ».

L’histoire de « clown et de Ronald », ne fait pas rire non plus Catherine Pila. Retraçant l’histoire de ce restaurant populaire devenu restaurant solidaire, de « sa seconde vie », pour la présidente du groupe Une volonté pour Marseille « ce tableau serait poignant s’il ne reflétait pas une autre réalité. La véritable histoire c’est celle d’un restaurant fermé qui a été squatté, réquisitionné par les habitants, les mêmes qui avaient vu défiler la fine fleur de la gauche et l’ultra-gauche ». Et d’insister par deux fois :« Vous cautionnez les squatteurs, M. le maire », annonçant que le groupe ne votera « pas contre la solidarité, mais contre le chantage, l’affichage et la posture qui est la vôtre ». 

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« Un projet nourricier pour Marseille »

Samia Ghali était aux côtés des salariés grévistes du Mc Do lorsqu’elle était sénatrice et dans l’opposition. En réponse aux vives critiques, la maire-adjointe en charge, entre autres, de l’Anru avance « que toutes les solutions » avaient été recherchées à l’époque par les salariés pour sortir de l’impasse en « réfléchissant à un repreneur et une organisation économique ». Et de rappeler qu’elle avait même rencontré Jean-Claude Gaudin, alors maire. « Il m’a dit que si Mc Do ne faisait pas d’effort il n’y aurait plus de Mc Do à Marseille ». Aujourd’hui, elle se réjouit de la tournure des événements, d’autant que le bâtiment est situé « en pleine zone de projet Anru et de la réorganisation totale de ces quartiers ».

Même enthousiasme pour Aïcha Sif, pour qui le projet dérange le « RN car il n’aime pas les pauvres », rétorquant à Catherine Pila que les « squatteurs », dont elle parle « sont des hommes et des femmes qui méritent notre respect ». Pour l’adjointe à lʼalimentation durable, la transformation de ce temple de la mal-bouffe en laboratoire d’innovation sociale, démocratique et écologique apparaît comme une opportunité. « C’est un projet nourricier pour Marseille, ils travaillent sur la transition alimentaire, avec filière courte, ils ont même transformé les parkings en espaces d’agriculture urbaine », poursuit-elle, soulignant la nécessité d’encourager cette expérimentation.

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L’ancien Mc Do Saint-Barthélémy à Marseille, base logistique alimentaire pour les quartiers Nord © N.K.

La crainte d’une démolition évacuée

Conformément à la demande de Samia Ghali, les élus ont été invités à indiquer à haute voix nominativement leur vote. Des élus du 13-14e arrondissement, absents de l’hémicycle, n’ont donc pas pris part au vote, le reste de l’opposition votant contre.

Avec 54 voix sur 96 exprimées (cinq élus n’ayant pas pris part au vote), l’adoption de ce rapport fait disparaître les craintes des porteurs de projets sur une éventuelle démolition du site. Une demande de permis de démolir, déposée par Mc Do France, le 27 mai dernier, est arrivée au service d’urbanisme de la Ville de Marseille, après avoir atterri sur le bureau de Marion Bareille, maire (LR) des 13-14e. Une manière de « mettre un coup de pression » explique un proche du dossier. Les réflexions autour du projet et surtout les décisions tardant un peu trop n’étaient du goût du propriétaire, qui avait également envoyé des huissiers sur place. Depuis, le groupe a retiré sa demande.

Et après…

Pour l’heure, la Ville n’a pas précisé sous quelle forme juridique le lieu sera exploité. Les porteurs de projet, attentifs au débat du jour, ont toujours la volonté d’acheter la propriété d’usage pour ne vivre aucun aléa lié aux changements politiques. Ils souhaiteraient signer « un bail emphytéotique, à minimum de 18 ans, mais nous préférerions 25 ans. Pour nous, ce serait comme un acte de propriété provisoire qui vient consolider le projet sur un quart de siècle. Il y a des formes juridiques qui permettent d’éviter à la Ville d’avoir un coût financier à supporter par la collectivité. C’est pourquoi la SCI est toujours à l’ordre du jour. Nous proposons à la Ville de payer d’avance la redevance pour les 25 ans à venir, qui s’élève à peu près à 600 000 euros », nous confiait Fathi Bouaroua, président de l’Après M.

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