Alors que le château de la Buzine, dédié à l’œuvre de Marcel Pagnol, revient en régie municipale, le petit-fils de l’auteur, Nicolas, aux commandes depuis 12 ans, a décidé de retirer les œuvres dont il détient les droits.
Ce vendredi 15 septembre matin, le conseil municipal de Marseille a voté le retour du château de la Buzine en régie municipale. Nicolas Pagnol, petit-fils du célèbre auteur et cinéaste, ne sera donc plus aux commandes de cet équipement culturel avec son association, comme c’était le cas depuis 12 ans.
Après de nombreux remous politiques et administratifs depuis le début de l’été, l’ancienne propriété de Marcel Pagnol, plus connue comme « le Château de ma mère », sera directement gérée par la direction de la Culture de la Ville à partir du 17 septembre. Pour rappel, la Ville de Marseille avait annoncé le 29 juin, lors d’une réunion avec la presse, préalable au conseil municipal prévu le 30 juin, l’annulation de la délégation de service publique, suite aux nombreuses allégations quant à la conformité de son attribution.
« Nous avons réalisé des entretiens avec les 18 salariés du site pour leur intégration dans le personnel municipal », nous expliquait le chef de la majorité municipale Joël Canicave, en amont du conseil. « 16 d’entre eux poursuivent à nos côtés », dont la directrice Valérie Fédèle, nommée responsable de service. « Ils y gagneront », assure-t-il, évoquant les divers avantages de l’employeur public (tickets restaurants, transports…).
Selon l’adjoint en charges des finances, les visiteurs en tireront aussi bénéfice puisque le château de la Buzine proposera, comme les musées municipaux, la gratuité des expositions permanentes, et la gratuité totale les premiers dimanches du mois.
La Ville privée des œuvres de Pagnol ?
Oui mais pour admirer quelles œuvres ? En conflit ouvert depuis son éviction, Nicolas Pagnol a annoncé hier, jeudi 14 septembre, que sa famille, détentrice des droits sur l’œuvre de l’auteur, allait « couper toute collaboration avec la mairie de Marseille ».
Il interdira ainsi l’exploitation « de titres d’œuvres ou du nom de Marcel Pagnol, annonce-t-il, en présence de ses avocats. Je vais retirer tout ce qui m’appartient et qui appartient au fond de dotation Pagnol. C’est-à-dire le buste de Marcel, des affiches, les photos… L’œuvre de mon grand-père n’a plus lieu d’être présentée à la Buzine ».
De son côté, la Ville « regrette que Nicolas Pagnol souhaite priver les Marseillais d’un accès libre et gratuit à l’œuvre de Marcel Pagnol et à la culture provençale ».
Nicolas Pagnol porte plainte contre le maire pour diffamation
Par ailleurs, le petit-fils du célèbre auteur provençal a également annoncé qu’il portait plainte pour diffamation et injures contre le maire de Marseille, Benoît Payan (DVG), alors que les échanges tendus à la fois publics dans la presse et privés se sont enchainés en début d’été.
La plainte visera également cinq adjoints du maire : Sophie Roques, Théo Challande-Névoret, Jean-Marc Coppola, Pierre Huguet et Jean-Pierre Cochet.
Toutefois, Nicolas Pagnol précise qu’il ne contestera pas devant les tribunaux l’éviction de son association et le retour de la Buzine en régie municipale. Il estime que cette démarche aurait pu mettre en danger le personnel qui « pourrait être licencié ».
Des regrets
Le conseil municipal a été l’occasion de nouvelles joutes verbales politiques. Pour l’adjoint à la culture Jean-Marc Coppola, Nicolas Pagnol a mis en scène son départ hier lors d’une conférence de presse. « Peut-être la seule mise en scène qu’il soit capable de faire d’ailleurs » ironise l’élu, qui trouve toutefois regrettable « qu’il soit occupé à menacer de procès », plutôt « qu’à faire vivre l’héritage de son grand-père ».
Depuis le début de l’affaire, les élus d’opposition de droite ont toujours manifesté leur grand solidarité à Nicolas Pagnol. Hier encore, le maire des 11-12, Sylvain Souvestre, était à ses côtés devant les grilles du château de la Buzine. Pour le membre du groupe Une Volonté pour Marseille, le retour en régie municipale fait peser un risque financier, « qui va se traduire par l’impossibilité de subventions du Département et de la Région, car cela reviendrait à financer le budget général de la Ville de Marseille sans possibilité de vérifier l’affectation des fonds et la transparence de la gestion ».
Ce sont des regrets qu’a exprimés le maire de Marseille : la situation, la politisation, la manière dont les choses se sont passées. « Je peux comprendre l’attachement de certains à cette association, je peux comprendre que certains considèrent que Valérie Fédèle et son équipe ont bien travaillé », poursuit le maire, rappelant l’audit qui a été demandé.
Et de revenir sur ce qu’il considère inacceptable : « Ce que j’ai mal pris, c’est que les institutions [Département et Région] ont tenté de me tordre le bras, en votant des motions pour me dire d’attribuer à nouveau la délégation à l’association présidée par Nicolas Pagnol ». Depuis le début, le maire de Marseille refuse de laisser dire qu’il a voulu chasser Marcel Pagnol du château. « Nicolas Pagnol peut considérer que je suis un mauvais maire, c’est son droit. Pour autant, est-ce qu’il a le droit de priver les Marseillais de l’oeuvre de son grand-père ? (…) Je prends en compte les difficultés qu’il a avec moi, mais qu’il ne me confonde pas avec les Marseillais. On ne fait que passer ».