Dans la foulée de la présentation en Conseil des ministres du projet de loi “plein-emploi”, la Première ministre, Élisabeth Borne et Olivier Dussopt, ministre du Travail, livraient ce vendredi 9 juin, à Salon-de-Provence, leurs mesures pour mieux accompagner les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires du RSA.
Atteindre le plein-emploi à l’horizon 2027. Tel est l’objectif du gouvernement, qui a présenté, il y a deux jours, en Conseil des ministres, un projet de loi qui vise à mieux coordonner les différents services d’accès à l’emploi pour que chaque Français puisse retrouver un travail dans les meilleures conditions. Une promesse de campagne d’Emmanuel Macron.
Ce vendredi 9 juin, la Première ministre, Élisabeth Borne, accompagnée du ministre du Travail, Olivier Dussopt, étaient à Salon-de-Provence, pour une visite sur le thème de l’accompagnement des jeunes demandeurs d’emploi et des bénéficiaires du RSA. Car si les contours précis du texte ne sont pas encore connus, la réforme du revenu de solidarité active (RSA) en est l’une des mesures phares.
L’ambition affichée est d’améliorer l’accompagnement des allocataires en conditionnant le versement du RSA à une quinzaine d’heures d’activité par semaine, dans une logique de « droits et devoirs ». Sur le papier, l’accompagnement renforcé des bénéficiaires doit permettre, à travers des activités obligatoires, un retour plus efficace vers l’emploi.
Pour répondre aux critiques de « régressions sociales », émanant majoritairement des élues des collectivités de gauche, le gouvernement s’est lancé dans une phase test pour éprouver son nouveau modèle. Le Département des Bouches-du-Rhône fait partie des 18 territoires volontaires pour expérimenter le RSA sous condition d’activité et pour laquelle une convention a été signée, ce jour, avec l’État et la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. [lire ici]
Jouer collectif
Depuis 2017, en termes d’emploi, « la situation est bonne », avance Olivier Dussopt. Selon les chiffres de l’Insee, le premier trimestre 2023 a vu la création d’environ 90 000 emplois, soit 1,8 million aujourd’hui. « Jamais depuis 1975, nous n’avons eu autant de Français(es) en emploi », se réjouit le ministre. Pour autant, malgré une baisse de 9,5 à 7,1%, le taux de chômage en France reste l’un des plus élevés d’Europe et se conjugue à des difficultés de recrutement pour les entreprises.
Le gouvernement avance plusieurs facteurs pour expliquer cette situation : une inadéquation entre les compétences des demandeurs d’emploi et les besoins des entreprises, avec des formations peu adaptées à la réalité des métiers d’aujourd’hui. La deuxième cause est en lien avec l’harmonisation des règles de l’assurance-chômage. La troisième raison réside dans « le fonctionnement du service public de l’emploi, qui se caractérise par de très nombreux acteurs et une forte complexité ».
La transformation de Pôle Emploi en France Travail, au 1er janvier 2024, vise à corriger ces dysfonctionnements avec une meilleure organisation, « pour mieux partager les informations et permettre un meilleur suivi des demandeurs d’emploi et des allocataires du RSA », assure le ministre du Travail. L’autre enjeu est de travailler en étroite coopération avec les territoires en créant des binômes État-Département, « mais aussi infra-départemental, car, souvent, il y a des questions de mobilité, de logement, de garde d’enfants… auxquelles nous ne pouvons pas apporter de réponses efficaces si nous ne le faisons pas avec les collectivités territoriales ».
Renouer avec l’esprit du Revenu minimum d’insertion
« C’est de notre responsabilité collective (État, Région, Département, commune, intercommunalité, entreprises) de savoir bâtir le bon accompagnement pour permettre à des personnes qui sont en difficulté de reprendre pied. Parmi elles, il y a des bénéficiaires du RSA », appuie la Première ministre, qui entend renouer avec l’esprit du RMI. Le Revenu minimum d’insertion – comme son nom l’indique – intégrait un volet insertion qui s’est perdu avec la mise en place du RSA. « On voit au fil des années que les dépenses d’allocations ont pris le pas sur le volet insertion. Quand on fait le constat que 40 % des bénéficiaires du RSA le sont depuis plus de 5 ans, on voit que le volet insertion s’est fortement enrayé au fil des années. Ce sont des situations qui ne sont acceptables, ni pour ces personnes ni pour notre responsabilité collective », poursuit Élisabeth Borne.
L’expérimentation déployée dans différents territoires s’inspire ainsi du contrat d’engagement jeune (CEJ), lancé en mars 2022. 400 000 jeunes en ont bénéficié à ce jour. Il s’adresse aux 16-25 ans et aux moins de 30 ans en situation de handicap qui ne sont ni en études, ni en activité, ni en formation, et qui peinent à accéder à un emploi durable. Ces derniers s’inscrivent dans un parcours d’accompagnement de quinze à vingt heures hebdomadaires en échange d’une allocation de 530 euros. Le dispositif « donne vraiment des résultats, assure la cheffe du gouvernement. Sur les premiers jeunes entrés dans le dispositif, c’est 75% d’accès à l’emploi, dont 40% d’emploi durable. Donc on voit que ce contrat personnalisé, auquel chacun dans ses compétences s’engage, ça marche ».
Expérimentation et sanctions
En signant un contrat d’allocation réciproque, le bénéficiaire du RSA s’engage ainsi à réaliser entre 15 à 20 heures d’activité par semaine, sous forme d’insertion, de formation, de parcours de l’emploi… « Cette intensité, c’est la clé de la réussite, de l’efficacité, et ça permet de mieux accompagner vers l’emploi », ajoute Olivier Dussopt.
L’essai dans les 18 départements qui doit s’achever fin 2023, permet de déterminer une méthode efficace « pour qu’à terme et progressivement, tous les allocataires du RSA de France (1,250 million) aient à la fois un suivi social et professionnel, un parcours personnalisé, des réponses aux difficultés qu’ils rencontrent…». Reste que ce suivi personnalisé s’accompagne d’un « régime de sanctions », lequel donne aux acteurs de l’emploi la possibilité de réprimer « plus facilement » les volontaires ayant rompu leurs engagements. Des mesures coercitives qui là encore interrogent nombre d’élus.
La méthodologie présentée en Conseil des ministres sera « défendue » au Sénat, avant l’été, puis à l’Assemblée nationale et ne manquera pas d’alimenter le débat.