Alors que l’expérimentation relative au suivi des bénéficiaires du RSA vient de débuter dans les Bouches-du-Rhône, la Première ministre a visité une entreprise d’insertion à Salon-de-Provence afin d’expliquer le projet de loi France Travail.

Dans la foulée de la présentation du projet de loi pour le plein emploi présenté en Conseil des ministres le 7 juin, la Première ministre, Élisabeth Borne, et Olivier Dussopt, ministre du Travail, se sont rendus à Salon-de-Provence pour visiter une entreprise d’insertion et expliquer les nouvelles mesures visant à « mieux accompagner » les demandeurs d’emploi et les allocataires du RSA.

Les Bouches-du Rhône n’ont pas été choisies par hasard pour ce déplacement ministériel. C’est « l’un des premiers territoires », selon Olivier Dussopt, à s’être portés volontaires pour expérimenter le « Contrat d’engagement réciproque ». À travers un accompagnement renforcé, ce nouveau dispositif doit permettre un retour plus efficace vers l’emploi des bénéficiaires du RSA, moyennant 15 à 20 heures d’activité hebdomadaires obligatoires. L’une des mesures les plus critiquées de France Travail, qui remplacera Pôle Emploi dès le 1er janvier 2024.

Expérimentation à Marseille

C’est à Marseille que cette « nouvelle modalité d’accompagnement » sera expérimentée. « Dans les 5e et 7e arrondissements de Marseille, pour 2 400 allocataires du RSA [sur les 63 000 que compte le département], explique le ministre du Travail. Nous allons ainsi pouvoir voir si cela fonctionne, pour qu’à terme, tous les 1,250 million d’allocataires aient à la fois un suivi social et professionnel, et un parcours personnalisé. Avec un objectif : le plein-emploi ».

L’expérimentation est menée par le Département, conjointement avec l’Etat, qui présideront un comité de pilotage, où siègeront les missions locales, la Métropole… mais pas la Ville de Marseille, qui souhaite être intégrée. Aucun représentant de la municipalité marseillaise n’était d’ailleurs présent ce jour.

« Le nouveau Pôle Emploi est déjà pour nous une réalité »

Pour illustrer le cadre de la réforme, la Première ministre a visité les locaux de ÏNVA, co-entreprise d’insertion professionnelle. Spécialisée dans le nettoyage et l’entretien des locaux, des aires et tous services associés aux métiers des autoroutes, elle a été co-fondée par Vinci Autoroutes et le groupe La Varappe, acteur majeur de l’insertion depuis plus de trente ans.

Pour le président de la Varappe, Laurent Laïk, « l’intérêt de cette entreprise, c’est qu’une autoroute traverse, en général des territoires ruraux. Et dans les territoires ruraux, les problématiques des personnes les plus éloignées de l’emploi, les plus précaires, les plus vulnérables, sont décuplées pour des questions de mobilité, de logement, de garde d’enfants, mais y compris sur des questions de temps partiel du travail ».

La ministre a échangé avec une dizaine de salariés de l’entreprise, qui recrute en moyenne 70 personnes en difficulté d’emploi par mois, dont près d’un tiers de personnes au RSA. « Nous n’avons pas attendu France Travail pour parler d’insertion, nous confie le président de La Varappe, Laurent Laik. Le nouveau Pôle Emploi est déjà pour nous une réalité. Dans ce principe de droit et de devoirs, on va pouvoir, au travers de cette expérimentation, tester des rencontres extraordinaires, et permettre aux gens de découvrir des métiers ».

Il se dit « contre » le fait « de faire travailler 15 à 20 heures des personnes sans encadrement ». Mais « si ces 15 heures nous servent à déclencher des rencontres déterminantes pour les bénéficiaires du RSA avec chefs d’entreprises et salariés et permettre, pourquoi pas, une intégration dans l’entreprise, là, je trouve que ça a du sens. Car plus personne ne connait ces métiers ». 

france travail, À Salon, le gouvernement prône l’insertion pour défendre le « nouveau RSA », Made in Marseille
Laurent Laik (à droite) © Olivia Chaber

157 métiers en tension dans la région

À l’issue d’échanges avec plusieurs acteurs territoriaux de la formation et de l’insertion, Élisabeth Borne a signé, avec Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et Martine Vassal, présidente du Conseil départemental des Bouches-du Rhône, la convention d’expérimentation France Travail. Celle-ci doit renforcer le partenariat entre État, Région et Département pour améliorer l’orientation et l’accompagnement des allocataires du RSA.

Pour cette dernière, « le RSA n’est pas une fatalité ». Dans le département, « depuis 2015, nous sommes passés de 79 000 bénéficiaires du RSA à 63 000 aujourd’hui, expose Martine Vassal. Parce que justement, on fait de l’insertion. Avec la Région, nous travaillons sur les formations, parce qu’il faut s’adapter aux métiers et permettre aux entreprises de recruter les bons profils ».

Si elle confirme que « les 15 à 20 heures seront bien obligatoires » dans le cadre de cette réforme, « elles existent déjà, défend la présidente. Nous faisons de l’insertion depuis bien longtemps. La seule chose, c’est qu’aujourd’hui, on va aller encore plus dans le détail, selon les parcours de vie ».

L’élue indique toutefois que le territoire est « en tension sur les travailleurs sociaux. Nous avons des difficultés énormes pour arriver à recruter dans les Maisons de la solidarité, dans l’accueil des différents publics… Ce sont des personnes volontaires, elles ont une vocation. Nous aimerions que les formations complémentaires soient un peu plus ouvertes afin qu’ils soient plus nombreux », a-t-elle adressé à la Première ministre.

Dans la région, le chômage dépasse de 2 % celui de la moyenne nationale (7,1 %). Mais pour Renaud Muselier, « ce n’est plus la principale préoccupation des Français. Mais plutôt la difficulté à recruter de plusieurs filières. Nous avons 157 métiers en tension dans la région. C’est avec les restaurateurs, hôteliers, acteurs du BTP… et toutes ces filières que nous allons travailler. Il faut qu’on puisse former, accompagner ».

Transformer les pratiques de recrutement

Pour Laurent Laïk, cette expérimentation est aussi « un point de départ qui doit nous permettre, pour les personnes les plus vulnérables, de passer de la marge à la norme. On ne parlera plus d’inclusion mais ce sera la norme sociétale de demain ».

Après l’environnement et la santé, La Varappe vient d’ailleurs d’élargir ses secteurs d’activité en reprenant les rênes de l’Adai, maintenant JEDAI, qui accompagne 5 000 bénéficiaires du RSA sur le volet social. Les 70 travailleurs sociaux qui y œuvrent vont travailler avec les recruteurs de Pôle Emploi afin de « traiter en même temps l’accompagnement social et dans l’emploi », reprend Laurent Laik. Il espère ainsi « avoir de la matière à apporter à France Travail et à l’expérimentation RSA, en démontrant que l’accompagnement global fonctionne ».

Le dispositif expérimental devrait être terminé à la fin de l’année. Un bilan sera alors effectué aux échelons local et national avec les 17 autres départements et métropoles sélectionnés pour tester ce « nouveau RSA ».

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