Alors que Marseille subit un pic de pollution et un pic de chaleur, l’agence de la qualité de l’air, Atmosud, explique que les deux sont liés. Le directeur, Dominique Robin décrypte ce phénomène « photochimique », qui devrait s’intensifier avec le réchauffement climatique.
Des voitures interdites en centre-ville de Marseille à cause du pic de pollution, une pétition du maire pour interdire les navires les plus polluants et une canicule exceptionnelle qui persiste… Tous ces éléments sont liés, d’après l’agence locale de surveillance de la qualité de l’air, Atmosud.
« Nous rencontrons un épisode de pollution photochimique qui entre en résonance avec le pic de chaleur et le changement climatique », explique Dominique Robin. Le directeur de l’agence donnait une conférence jeudi 21 juillet pour décrypter ce phénomène. « C’est l’effet de la chaleur et du soleil qui transforme les polluants précurseurs habituels (gaz d’échappement, industrie, transport maritime…) en pollution secondaire ».
L’ozone ne doit pas occulter les particules ultrafines
Cette dernière, plus inquiétante, est « une soupe de polluants dans laquelle on trouve l’ozone », un gaz oxydant et irritant pour les tissus humains, mais aussi les matériaux et les tissus végétaux. « Il peut même causer des pertes sur les rendements agricoles, comme le blé, qui peuvent atteindre 15 % ». C’est la concentration d’ozone, lorsqu’elle dépasse le seuil d’alerte de 180 microgrammes par m³, qui entraîne des mesures préfectorales.
Mais la pollution secondaire concentre « beaucoup d’autres polluants, dont les particules ultrafines (inférieures à 0,1 micron) dont il faut aussi parler ». En effet, ces dernières pénètrent les voies respiratoires, mais également tout le système sanguin. « Au-delà des conséquences connues sur le système cardiovasculaire, des études s’intéressent aux potentiels impacts sur le système cérébral », précise Dominique Robin.
Vers des seuils d’alerte plus sévères…
À vrai dire, ce temps d’information était prévu de longue date, puisque des concentrations alarmantes d’ozone sont observées depuis le mois de mai. L’indice est qualifié de « mauvais » dès que la valeur maximale horaire dépasse 130 microgrammes par m³. « On a atteint ce seuil environ un jour sur deux depuis mai », raconte le directeur d’Atmosud.
Or, les dernières recommandations de l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) prescrivent de placer le seuil d’alerte à ce niveau, et non 180 microgrammes par m³, comme actuellement. L’Europe et la France devraient l’adopter prochainement.
Si cela avait été le cas cette année, les mesures préfectorales auraient été déclenchées dès la fin du printemps à Marseille. En 2021, « on aurait eu 20 jours de dépassements au lieu de 13 », précise Dominique Robin.
Une intensification avec le réchauffement climatique
Atmosud a effectué une simulation des phénomènes de pics de pollution en 2030. Le directeur relève un paradoxe : « Les mesures de transition énergétique doivent entraîner une baisse conséquente des émissions de polluants localement. Mais les épisodes de forte pollution devraient s’intensifier ».
En effet, il en revient au phénomène photochimique : les pics de chaleur intensifient la concentration de polluants. « La région devrait gagner un degré en plaine et deux degrés dans les Alpes jusqu’en 2030. Même avec moins de rejets, cette chaleur entraînera plus de pics de pollution ».
De quoi plaider, du côté de Dominique Robin, pour l’accélération de la réduction des émissions et pour la transition énergétique.