Le bras-de-fer se poursuit autour de la Villa Valmer. La Ville de Marseille souhaite la récupérer, Pierre Mozziconacci, poursuivre son projet d’hôtel de luxe. Alors que la Mairie prolonge la procédure contradictoire de six mois, l’hôtelier lance une procédure en référé pour reprendre au plus vite les travaux, suspendus après une destruction non autorisée.

Contexte :

 

En septembre, la procédure contradictoire devait être achevée. Pourtant, les deux parties sont restées silencieuses sur le dossier Valmer. Ce mutisme a pris fin ce lundi 25 octobre au soir, par la voix de Pierre Mozziconacci. Celui qui ne souhaite pas être qualifié de « promoteur, mais d’hôtelier, car sur ce projet, je suis locataire [pour 60 ans, ndlr] », a choisi de s’exprimer devant une assemblée d’habitants du 7e arrondissement de Marseille.

L’auditoire, rassemblé par le président de la fédérations des CIQ du secteur, Jean-Claude Rostain, semblait plutôt enclin à embrasser à sa cause. Durant la réunion, plusieurs réactions laissaient entendre que la majorité municipale et le maire Benoît Payan n’ont pas été élus grâce à leurs suffrages.

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Pierre Mozziconacci en discussion avec une habitante du 7e arrondissement

Un nouveau dépôt de permis prolonge la procédure

Du côté de la Ville, certains voient dans cette prise de parole une « opération de communication ». Elle a toutefois eu le mérite de préciser l’état du dossier, alors que la municipalité s’y refuse pour le moment, arguant que la sourde bataille juridique suit son cours. « Nous sommes toujours dans la phase contradictoire », accepte cependant de préciser Mathilde Chaboche, adjointe à l’urbanisme, ce mardi 26 octobre.

Elle confirme ainsi les annonces de l’hôtelier, la veille : cette procédure a été prolongée de six mois supplémentaires, suite à son dépôt d’un permis de construire modificatif. Il concerne « une reconstruction à l’identique » de l’élément détruit sans autorisation. Ce dernier date du 20e siècle, alors que la Villa Valmer a été bâtie au siècle précédent.

L’élue considère cependant que « l’atteinte au patrimoine des Marseillaises et des Marseillais a été commise. Reconstruire à l’identique un élément patrimonial qui a près de 100 ans est un concept hasardeux ». Elle ne commentera pas plus le dossier ni la stratégie de la Ville.

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Visuel de la reconstruction « à l’identique » déposée par les architectes de l’hôtelier. © Photo : 331 CORNICHE ARCHITECTES

Relancer les travaux au plus vite

De son côté, Pierre Mozziconacci se montre désormais très loquace, affichant une position offensive. Avant l’été, la municipalité multipliait les sorties sur la Villa Valmer alors que l’hôtelier restait très discret. La situation semble aujourd’hui inversée.

Il annonce avoir « engagé ce lundi une procédure en référé pour suspendre l’arrêté interruptif des travaux ». Mesure qu’il juge « disproportionnée » et « ne devrait, au pire, concerner que la partie sinistrée, sans bloquer la poursuite du chantier sur le reste du bâtiment ». Il compte reprendre les travaux « le plus vite possible, début 2022 au plus tard ». Son estimation des préjudices financiers de l’interruption est pour le moins élevée  : « 135 000 € pour les architectes, 1 million d’euros du côté de l’entreprise ».

Alors qu’il espère une ouverture de son établissement « avant la coupe du monde de Rugby 2023 et les JO de voile en 2024 », la prolongation de la procédure contradictoire joue contre lui. Par la voie du référé, le juge pourrait se prononcer rapidement, « d’ici une dizaine de jours », et lui permettre de reprendre les travaux. Mais quelle que soit la décision, elle ne concernera pas le dossier sur le fond.

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« Comme l’Intercontinental, l’hôtel de la Villa Valmer verra le jour »

Les positions des deux parties semblent moins présager une résolution à l’amiable qu’une bataille en justice. Suite à l’interruption des travaux en juin, le maire de Marseille, Benoît Payan, se montrait résolu : « C’est un acte clair. Notre volonté vous la connaissez depuis de nombreuses années [que la Ville récupère la Villa Valmer, ndlr] ». Ce que confortent d’autres témoignages au sein de la Mairie, dont certains vantent les services d’un « cabinet d’avocats de très haut niveau ».

De son côté, Pierre Mozziconacci est tout aussi déterminé : « comme l’Intercontinental, l’hôtel de la Villa Valmer verra le jour ». La rupture du bail emphytéotique lui semble « improbable juridiquement, sur la seule base de ce sinistre ». Une riveraine lui demande si le blocage de la Ville et le combat judiciaire peut le décourager ? « Je suis fils de militaire, madame [voir encadré] », fait-il valoir, comme ses origines corses. « J’ai appris l’art de me défendre ».

Vers un long bras de fer judiciaire ?

Comme la municipalité, l’hôtelier annonce une équipe juridique solide : « À Marseille, maître Grimaldi nous représente, vous le connaissez sûrement (il officie notamment pour l’OM ou Force ouvrière) ». Si ce dernier « tente de nous faire sortir par le haut », à l’amiable, il laisse entendre que ce ne sera pas le cas du puissant cabinet parisien Gide, auquel il fait également appel. « Eux par contre… ». Il estime que la rupture du bail pourrait coûter très cher à la Mairie, et avance l’intérêt économique de son projet pour la Ville : un loyer annuel de 300 000 euros, ainsi qu’une part variable sur le chiffre d’affaires.

Difficile de se projeter sur l’issue de l’affaire. Elle repose sur des éléments que les uns estiment « très graves » quand l’autre les juge « beaucoup trop légers pour remettre en cause un bail emphytéotique ». Si les deux parties ne trouvent pas de terrain d’entente à l’issue de la procédure contradictoire, début 2022, il appartiendra donc à la justice de trancher. Mais dans combien de temps, et sous quelle mandature ?

Colonel Mozziconacci, médaille de la Ville de Marseille sous Gaudin

Le colonel Marc Mozziconacci, élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur (la plus élevée de cet ordre), a reçu en 2019 la médaille de la Ville de Marseille des mains de Dominique Tian, alors premier adjoint au maire Jean-Claude Gaudin. Son fils, Pierre, précise que la même année, le permis de construire de son hôtel de luxe était accepté.

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