La Réparation Navale à Marseille, c’est 750 empois et 50 entreprises référencées. Si le secteur a connu son heure de gloire dans les années 50, il est aujourd’hui fragilisé par la concurrence internationale et un manque de main d’oeuvre qualifiée sur le territoire. Pour relever les défis qui l’attendent, une restructuration du secteur s’impose.
Jeudi soir, la Maison de l’Emploi réunissait les différents acteurs et entreprises de l’industrie navale de la région, afin de leur restituer son étude sur les besoins en emploi de l’industrie navale marseillaise. La Ville de Marseille, la Direccte UD13, la Métropole Aix-Marseille, le CCI Marseille Provence ainsi que des entreprises et donneurs d’ordres de la filière tels que le Chantier Naval de Marseille, Sud Marine, Palumbo, Composite Works, DNCS, Monaco Marine, étaient présents pour réfléchir ensemble aux enjeux et à la nécessaire restructuration de la filière navale.
Quels sont les principaux freins au développement de cette filière ?
Aujourd’hui, le principal frein à l’activité de Réparation Navale réside dans la main d’oeuvre, pas assez présente et qualifiée dans la région PACA. Ainsi, de nombreuses entreprises font appel à de la main d’oeuvre étrangère. Par exemple, le chantier Naval de Marseille a recruté dernièrement seulement 150 techniciens locaux sur 2000 pour un de ses travaux. La main d’oeuvre étrangère vient essentiellement d’Italie.
Le président du Chantier Naval de Marseille, Jacques Hardelay, s’est exprimé sur ce sujet « Ici, on ne trouve pas la main d’oeuvre nécessaire et ce n’est pas normal. On a besoin de monter en compétence dans la région ». Certains travaux sont également directement sous-traités à l’étranger. Ceci représente donc un manque à gagner considérable pour la région.
L’autre enjeu réside dans la montée en compétence de la filière. Marseille doit d’abord être capable d’accueillir des bateaux de toute tailles (paquebots, pétroliers…). Pour cela, la Forme 10, plus grande infrastructure de réparation en cale sèche en Méditerranée et 3ème au monde, sera remise en service en septembre prochain, après 16 ans d’inactivité. En plus d’amarrer les grands paquebots sur son port, les entreprises marseillaise seront donc bientôt capable de traiter leur maintenance. Retrouvez notre reportage photo au coeur du chantier de la Forme 10 ici
Une nécessité, alors que l’activité de croisière explose, comme nous l’explique Jacques Truau, le président du club de la croisière Marseille Provence « L’activité a augmenté de 300% entre 2010 et 2015. Cette année, il y a eu 1,7 million de voyageurs. Nous avons obtenu la confiance de grands opérateurs mondiaux, maintenant il faut qu’il y ait un certain de nombre de chantiers de maintenance compétents sur Marseille pour les accueillir en cas problème. »
La filière marseillaise doit également gagner en visibilité pour être reconnue à l’international car face à la concurrence de Barcelone et de Gêne, les chantiers en PACA souffrent d’un déficit de communication autour d’une marque territoriale. Et plus précisément à Marseille où 60 % des entreprises de réparation navale sont des TPE et n’ont donc pas plus de 250 salariés. Le caractère cyclique de l’activité et l’absence de prévisibilité des commandes freine les embauches en CDI, la formation et le développement des compétences à terme.
Giulio Maresca, le directeur de Palumbo Msy, évoque un autre frein « A Marseille on a tout, des sites géniaux, une qualité de travail à la hauteur, un port bien placé, proche du centre-ville… mais certains capitaines hésitent à venir à Marseille à cause de sa réputation, ils ne veulent pas forcément passer plusieurs jours dans la ville ».
Quelles sont les solutions pour restructurer judicieusement la filière ?
De nombreuses pistes ont été évoquées par les différents acteurs qui se sont engagés à travailler ensemble dans la restructuration de la filière navale à Marseille. Institutions du territoire, représentants des entreprises, acteurs du Service Public de l’Emploi et de la Formation, experts techniques se réunissent depuis fin 2014 pour définir le plan d’action à organiser.
Le plan GPECT (Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences Territoriales), animé par la Maison de l’Emploi vise à anticiper et adapter les métiers de demain. Il a retenu trois pistes d’action principales pour la Réparation Navale.
- Répondre aux besoins en recrutement identifiés à court terme des principaux chantiers navals et leurs sous-traitants
- Renforcer la capacité d’anticipation des PME sous-traitantes, confrontées à la saisonnalité et l’instabilité des carnets de commandes
- Favoriser la promotion et l’adaptation des formations au vu des projections d’activités et des mutations de la filière
Pour cela, de nouvelles formations seront proposées, certaines très courtes et spécialisées afin de répondre aux demandes de polyvalence du secteur. Pôle Emploi financera des formations de deux mois et demi par exemple, pour adapter des profils à un poste précis. En juillet, la région conviera les entreprises du secteur pour établir les besoins de formations.
Afin d’aider les employeurs de la filière, 40 conseillers à l’emploi et en orientation issus de Pôle Emploi, la Mission Locale, le Plie ou encore les CIO ont été formés pour sensibiliser les jeunes aux attentes précises des entreprises.
La visibilité des entreprises sera également renforcée, grâce à un projet de cluster (regroupement d’entreprises du même secteur), imaginé par le Chantier Naval de Marseille. « Nous visons un fonctionnement sur le principe de l’entreprise étendue : être en capacité de s’intégrer dans les projets des donneurs d’ordre au sein d’une association de fournisseurs. Le chantier Naval de Marseille et le Pôle Mer pourraient coordonner de beaux projets au bénéfice de Marseille et de sa Région », explique Jacques Hardelay.
Un travail de promotion du secteur sera également réalisé par différents acteurs, notamment auprès des jeunes et sur les réseaux sociaux.
En bref, les idées ne manquent pas pour structurer la filière qui deviendra peut être un pôle d’excellence d’ici quelques années à Marseille.