Fondée en 2015, l’entreprise Gojob vient de lever 120 millions d’euros auprès du groupe japonais Persol. Les deux partenaires deviennent le leader mondial du recrutement avec de l’intelligence artificielle.

Faire matcher des profils de candidats avec des postes en intérim comme l’appli de rencontres Tinder. Voici l’ambition de départ de Pascal Lorne et Jean-Baptiste Demonte lorsqu’ils fondent Gojob en 2015 à Aix-en-Provence. Leur grande innovation depuis ? Missionner des agents IA pour vérifier l’intérêt et la disponibilité des candidats.

À l’issue de cet échange, le recruteur prend le relais avec un appel téléphonique d’une demi-heure. « Non seulement, on fait des gains de productivité de l’ordre de x50 parce que toute la préqualification est automatisée. Mais en plus, on augmente la qualité de la relation téléphonique », assure Pascal Lorne.

Gojob prône un recrutement inclusif ayant permis à 50 000 personnes de trouver un emploi depuis dix ans. « On se bat pour aller chercher des jeunes dans les quartiers, qui galèrent, qui n’arrivent pas à trouver leur premier job parce qu’ils n’ont pas le bon prénom, ils n’ont pas les bons codes », confie le chef d’entreprise.

Fin 2024, la société réalisait déjà 200 millions d’euros de chiffre d’affaires, lui permettant d’intégrer le Next40 du club des grandes entreprises du territoire, le Top 20. Mais après avoir « coché toutes les cases », l’ancien président de la French Tech Aix-Marseille sentait « un plafond de verre ».

Gojob, L’entreprise aixoise Gojob en route pour devenir le leader mondial du recrutement par IA, Made in Marseille
Pascal Lorne, fondateur de Gojob © Gojob

La rencontre avec Yoshiko Shinohara

Alors, début 2025, l’entrepreneur se met en tête de trouver un partenaire capable « d’injecter des dizaines de millions d’euros » pour passer à l’échelle mondiale. Ses associés du début, Rising Sud, la Caisse des dépôts, Breega, Kois, Alter Equity, Amundi Private Equity Funds, pourraient aussi y trouver une porte de sortie.

Dans sa quête, épaulé par la banque Lazard, Pascal Lorne atterrit au Japon pour rencontrer Yoshiko Shinohara, la fondatrice de 93 ans du leader de l’intérim en Asie, Persol, qui réalise neuf milliards de chiffre d’affaires. « Je suis tombé amoureux d’elle, car j’ai trouvé que son histoire résonnait beaucoup avec la nôtre », se souvient-il.

Yoshiko Shinohara a quitté le Japon à 20 ans pour s’installer en Europe après une déception amoureuse. La jeune femme découvre, dans les années 50, que les femmes européennes ont le droit de travailler et d’ouvrir un compte en banque. Elle monte alors sa première entreprise d’intérim.

Mais, après quelques années d’expatriation, la patronne japonaise revient dans l’archipel nippon pour y dupliquer ce concept. « Elle a fait ça de manière complètement illégale pendant les cinq premières années parce que le travail temporaire n’était pas autorisé dans son pays. Et puis, à force de lobbying et de persuasion, elle a fait passer un texte de loi pour autoriser l’intérim. Au fil de l’eau, en 30, 40, 50 ans, c’est devenu la première boîte d’intérim asiatique », raconte Pascal Lorne, admiratif.

120 millions pour devenir leader mondial

Lorsque Yoshiko Shinohara a ensuite pris sa retraite, elle a légué son entreprise à une fondation dont la mission est d’offrir un travail aux personnes victimes de discrimination à l’embauche. Des valeurs qui matchent avec celles du patron aixois, qui avait lui-même reversé une partie de ses actions chez Gojob à une fondation « avec une volonté farouche d’inscrire le projet social de l’entreprise au cœur de la cité ».

Début octobre, les deux partenaires ont ainsi scellé leur alliance. Persol a injecté 120 millions d’euros dans la start-up aixoise et Pascal Lorne a investi dans le groupe japonais. Les nouveaux partenaires se complètent désormais : Persol est n°1 en Asie et Gojob domine le marché en Europe et aux États-Unis.

« On leur vend notre technologie pour qu’ils la déploient en Asie et ils nous aident à financer les acquisitions en Europe et aux États-Unis, résume Pascal Lorne. Ensemble, on crée un groupe qui fait 10 milliards de chiffres d’affaires, présent sur trois continents, et qui est devenu le leader mondial du recrutement par intelligence artificielle ».

Le siège et la R&D restent à Aix

Au regard de cette ambition, Gojob pourrait ouvrir d’autres bureaux en Europe et aux USA au fil de ses acquisitions, en plus de l’antenne à Paris, New-York et Atlanta.

Mais, pour Pascal Lorne, l’ambition reste de conserver le siège social de Gojob et le laboratoire IA à Aix-en-Provence pour atteindre un milliard d’euros de chiffre d’affaires dans cinq ans.

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