Les mesures sanitaires restrictives liées à l’épidémie de Covid-19 et le retour du confinement ont entrainé une crise sociale d’ampleur à Marseille. Les associations et bénévoles décuplent d’énergie pour aider les plus démunis, avec le soutien des pouvoirs publics. État des lieux.
L’impact social du premier confinement était encore bien présent qaund la deuxième vague épidémique a enfoncé le clou, jetant de nouvelles personnes dans la précarité à Marseille. « De nouveaux pauvres », disent certains travailleurs sociaux de terrain, qui voient chaque jour des entrepreneurs, des étudiants, des nouveaux chômeurs gonfler les rangs des plus démunis.
Une période « sans précédent dans l’histoire » de la Banque alimentaire des Bouches-du-Rhône, d’après son président Gérard Gros. « Nous atteignons déjà quasiment le niveau de demande du premier confinement : une augmentation de 55 % correspondant à 200 000 repas par semaine. Et le pic n’est pas encore atteint ». La grande collecte nationale annuelle des 27 et 28 novembre « sera capitale », lance-t-il, espérant un élan de générosité des Français.
À Marseille, le Secours populaire enregistre une forte hausse de la demande en aide alimentaire. « De 30 % à 40 % globalement, et jusqu’à 70 % pour certains quartiers », nous confie la présidente départementale de l’association, Sonia Serra. Pour répondre à la crise, la structure a déployé sept nouvelles antennes dans la ville, avec une présence dans environ 85 quartiers.
Le bénévolat, lui, ne connaît pas la crise
De son côté, Emmaüs Marseille « oriente la quasi-totalité de ses aides » aux étudiants durement touchés par la crise. Si beaucoup d’entre eux ont perdu leurs petits boulots, cela n’empêche pas certains de faire preuve de générosité en mettant leur temps libre au service des plus fragiles. « Nous avons vu 15 jeunes supplémentaires rejoindre notre équipe de bénévoles en deux jours », note la présidente du Secours populaire.
Les télétravailleurs et les chômeurs partiels se mobilisent également. « D’autant plus, cette fois, car les enfants vont à l’école », rappelle Sonia Serra. « On ne connait pas la crise du bénévolat. Au contraire, on doit organiser les ressources humaines ». De son côté le président départemental de la Banque alimentaire est également rassuré : « On n’est pas loin d’atteindre les 5 000 bénévoles attendus ».
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Pour autant, comme toutes les autres structures sociales, le Secours populaire reste en demande de soutien financier, alimentaire ou humain. « Toutes les compétences sont bienvenues. Pour la recherche de financements, la coordination, la communication… »
Dans les quartiers Nord, le Mac’do de Sainte-Marthe tourne à plein régime
Le lieu est devenu un symbole de la convergence de nombreuses luttes, des salariés du Mc Do aux gilets jaunes. Il s’est transformé en base logistique pour la distribution de colis alimentaires pour les plus démunis lors du premier confinement. Au Mac Do Sainte-Marthe, il ne s’agit plus de menus « best off », mais de paniers alimentaires. Et le drive tourne à plein régime. « On est ouvert de 9 h à 18 h, six jours sur sept », explique Salim Grabsi, de l’association le Sel de la vie.
Il décrit une « demande exponentielle » ces dernières semaines, avec un rythme de « 3 000 à 3 500 colis par semaine ». La structure alimente également de nombreuses autres associations. Elle se fournit chez la Banque alimentaire et des grossistes, mais « a besoin de dons pour tenir le rythme ». Qu’ils soient en nature (nourriture, produits de première nécessité, serviettes hygiéniques, couches pour enfants…) ou financiers, ils sont les bienvenus sur place ou via une cagnotte en ligne.
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Donner un cap à la myriade d’initiatives solidaires
Face à la multiplicité d’actions de solidarité, il est parfois difficile d’y voir clair pour les plus démunis. De même pour les travailleurs sociaux et les citoyens qui veulent aider. « Il y aura bientôt un guichet unique pour la précarité à Marseille », annonce toutefois Salim Grabsi. « Les pouvoirs publics ne peuvent pas être absents cette fois ».
Répertorier et cartographier les distributions ? L’adjointe à la solidarité de la Ville de Marseille, Audrey Garino (Printemps marseillais), répond qu’un travail de référencement est bien en cours. Il est piloté par la Préfecture des Bouches-du-Rhône « mais avec la richesse incroyable d’initiatives solidaires dans la ville, c’est très compliqué ».
L’élue souhaite travailler plus activement à « fédérer les actions, développer les échanges, la coordination, innover, pour plus d’efficacité ».
• Que vous soyez dans le besoin ou dans le don, la plateforme d’entraide locale Aouf fait le lien à Marseille : à découvrir ici.
• Le site jeveuxaider.com vous aiguille également selon vos disponibilités, vos compétences, vos dons et votre situation géographique.
La municipalité double les distributions du Samu social
L’adjointe était en visite au Samu social avec une délégation municipale mercredi 4 novembre. Couvertures, vêtements, produits d’hygiène… La structure augmentera notamment la distribution de repas, passant de 500 à 1 000 paniers par jour.
Soit « près de 200 000 € par mois pris en charge par la Mairie », précise le premier adjoint Benoît Payan. Une dizaine d’agents municipaux supplémentaires doivent également renforcer les équipes du Samu social.
Avec l’arrivée de l’hiver, la Ville déploie également une centaine de places d’hébergement d’urgence. Une dizaine est dédiée aux femmes victimes de violences conjugales.
Le camion-douche municipal à destination des sans-abri est immobilisé. « Avec le Covid, nous ne pouvons pas le désinfecter systématiquement », explique Audrey Garino. C’est donc le gymnase Ruffi (13003), « ouvert tous les jours », qui propose des douches publiques.
Métropole et Département face à « une crise humanitaire d’une ampleur jamais vue »
La présidente (LR) de la Métropole Aix-Marseille-Provence et du Département des Bouches-du-Rhône, Martine Vassal, déroulait les dispositifs des deux institutions ce jeudi 12 novembre. Pour elle, la reprise de l’épidémie et le nouveau confinement entrainent « une crise humanitaire d’une ampleur jamais vue ».
Déjà « 200 millions d’euros ont été déployés depuis mars » par les deux collectivités, affirme-t-elle, entourée de ses différents délégués aux questions de solidarité, de logement, d’alimentation et d’emploi. De nouvelles aides « qui ne sont pas encore chiffrées » devraient suivre prochainement.
Martial Alvarez, vice-président métropolitain délégué à l’emploi et la cohésion sociale et territoriale et à l’insertion, proposera une délibération de « lutte contre le décrochage à l’emploi », au prochain conseil métropolitain.
Par ailleurs, il annonce qu’une convention d’appui à la pauvreté et à l’emploi dotée de 1,5 million d’euros, partagés entre la collectivité et l’État, sera déployée à partir de janvier. La Métropole livre également 7 tonnes de nourriture à la banque alimentaire chaque semaine.
Du côté du Département, les chèques d’accompagnement personnalisés « sont passés de 30 € à 50 € », rappelle Danièle Brunet, déléguée à la solidarité. « Nous avons également augmenté les subventions pour le restaurant solidaire Noga à Marseille (Cours Julien), qui a atteint 1 000 repas par jour lors de la première vague ».
C’est le seul restaurant de ce type dans la ville. L’élue entend aussi ouvrir de nouvelles épiceries solidaires, en particulier dans la cité phocéenne, où les rares qui existent sont dédiées aux étudiants.
Le Conseil départemental renforcera également l’offre d’hébergement d’urgence dans les prochaines semaines aux côtés de la Ville et de l’État.