À Marseille, le projet Explore Covid-19 fait travailler « une armée » de spécialistes en immunologie pour trouver un traitement adapté aux complications graves du coronavirus. Une piste de traitement parallèle à l’hydroxychloroquine testée à l’IHU par les équipes du Professeur Raoult et qui pourrait être complémentaire.
S’il n’est plus besoin de présenter la piste de traitement à l’hydroxychloroquine prônée par le professeur Raoult à l’IHU Méditerranée Infection, une seconde voie est étudiée avec énergie dans la cité phocéenne, du côté de l’immunologie.
Car dans cette discipline, Marseille Immunopôle tient une place internationale, au même titre que l’IHU de Marseille. Et le cluster de spécialistes en immunologie entre également dans la course mondiale au traitement contre le coronavirus, avec le projet Explore Covid-19.
À sa tête, l’immunologue Éric Vivier. Il a « levé une armée » d’une quarantaine de spécialistes. Ils travaillent d’arrache-pied en collaboration avec cinq services cliniques de Marseille. « Nous analysons le sang de 20 patients par jour sur une quarantaine de paramètres. C’est énorme ». Le projet associe ainsi les équipes de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM), de l’Hôpital Laveran (HIA-Laveran) et de la société de biotechnologie Innate Pharma.
« Booster les défenses »
L’immunologie s’intéresse aux défenses naturelles du corps contre les maladies. Une piste intéressante lorsque l’on sait que « 85 % des patients atteints guérissent très bien sans traitement », explique Éric Vivier.
« Mais nous nous intéressons aux 15 % qui réagissent mal », poursuit l’immunologue. « Quand le virus entre dans l’organisme, le système immunitaire répond et certaines cellules luttent contre l’intrus. Ce sont elles que l’on étudie pour voir si on peut les « booster » et accélérer la réponse. »
Une solution aux complications graves du virus ?
Mais une grande partie des complications graves des malades du Covid-19, inflammations et syndromes de détresse respiratoire aiguë (SDRA), sont liés à une « sur-réponse immunitaire ». Des complications que produit donc le corps lui-même. Le chercheur les étudie pour les contrôler. « Nous avons déjà conçu beaucoup de traitements de ce type, et cherchons à déterminer s’ils sont efficaces dans ce cas précis ».
Le projet Explore Covid-19 se penche notamment sur un médicament conçu par Innate Pharma pour traiter les réponses immunitaires antitumorales. « Dans le cas du cancer, nous sommes parvenus à booster la réponse immunitaire tout en freinant la réponse inflammatoire. On veut voir si ce médicament peut agir de même avec le Covid ».
« Si ces pistes fonctionnent, ça devrait déboucher sur des essais cliniques rapidement », annonce l’immunologue, qui semble adopter une méthodologie inverse à celle de l’IHU. « On analyse d’abord scientifiquement et méthodologiquement tout ce qu’on peut, et en fonction des résultats, on fera des essais sur les patients ».
Premiers essais dans les semaines à venir
Question délais, il se veut donc prudent, car « il y a un aspect réglementaire qu’il ne faut pas sous-estimer. Mais, la crise accélère les protocoles d’entrée en essais cliniques, et nous avons levé une armée pour lancer les essais le plus rapidement possible. On va au pas de charge, tout en respectant la science ».
L’immunologue estime ainsi que les premiers essais cliniques s’inscriront dans un calendrier « qui ne se compte pas en mois, ni même en semaines… »
Alors que, dans une autre logique méthodologique, le professeur Raoult s’emploie à lutter contre la présence du Virus dans le corps, le projet immunologique Explore Covid-19 entend lutter contre ses effets graves chez les patients contaminés. Des traitements qui pourraient donc s’avérer complémentaires, bien que différents. Avec une origine commune : Marseille.