Alors que les investissements pour accueillir les Jeux olympiques et paralympiques 2024 sont conséquents, le territoire espère capitaliser sur cet événement mondial pour booster l’économie à plus long terme.
Si le comité Paris 2024 indique s’attendre à voir déferler plus de 15 millions de spectateurs et 20 000 journalistes sur les sites olympiques, il faudra attendre plusieurs mois après la fin des épreuves pour déterminer le réel impact économique des Jeux olympiques et paralympiques 2024 en France. Il n’en reste pas moins qu’un évènement de cette ampleur ne va pas sans quelques estimations.
Selon une récente étude du cabinet Asterès, les dépenses totales de Paris 2024 devraient approcher les 11,8 milliards d’euros. L’organisation concrète des épreuves par le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojo) représente 4,4 milliards d’euros. Même somme concernant la rénovation et construction des infrastructures olympiques (transports, stades, villages olympiques…).
Les dépenses liées aux Jeux bénéficiant aux entreprises françaises devraient, par ailleurs, engendrer la création de 109 000 emplois et quelque 9,3 milliards de bénéfices. Des retombées significatives qui s’égrènent sur plusieurs années. Qu’en est-il dans la métropole marseillaise ?
Deux leviers : l’organisation des Jeux et le tourisme
En se référant aux précédents grands événements tels que la Coupe du monde de rugby ou encore le Test Event de voile l’été dernier, la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence (CCIAMP) estime entre 150 à 200 millions d’euros les retombées économiques directes provenant principalement de deux sources : d’une part l’organisation des Jeux, de l’autre le tourisme.
En premier lieu, la chambre consulaire tient compte des 100 millions d’euros investis à Marseille, avec notamment la construction de la Marina olympique de près de 50 millions d‘euros et environ 45 millions d’euros induits par l’accueil des athlètes et des journalistes pour les épreuves de voile (soit environ 3 000 personnes). Les 100 autres millions devraient être générés par l’afflux touristique.
Marseille mise d’abord sur l’arrivée de la flamme olympique le 8 mai, dont le budget avoisine 1,8 million d’euros. Somme financée à 55% par la municipalité et complétée par les autres collectivités locales (Région, Département et Métropole).
Le 9 mai, la flamme passera dans les huit secteurs et lieux emblématiques de la ville, avant une tournée dans le département. 150 000 personnes sont attendues sur ce temps fort, auxquelles s’ajoutent 500 000 personnes qui assisteront aux 10 matchs de football au stade Vélodrome et resteront sur les 14 jours d’épreuves en mer.
Un catalyseur pour de nombreux secteurs d’activité
Selon le Cojo, les 2 000 places quotidiennes à 26 euros du stade nautique ont déjà trouvé preneurs. Le “Club 2024”, une fan-zone de 5 000 m2 à la jauge limitée de 2 000 places, sera installée sur le sable des plages du Prado à quelques centaines de mètres du stade nautique. La présence de l’équipe de France masculine de football qui jouera à Marseille son match d’ouverture le 24 juillet, et une seconde rencontre de poule le 30 juillet, pourrait booster la billetterie.
Les Jeux devraient par ailleurs agir comme un catalyseur pour de nombreux secteurs d’activité et doper la fréquentation des commerces de proximité, acteurs essentiels de l’attractivité et du dynamisme de la deuxième ville de France.
Des millions de touristes de toutes les nationalités y convergeront. “Nous devrions avoir 25% de touristes étrangers et 75% de spectateurs français extérieurs à la métropole. Les retombées devraient être importantes, particulièrement pour les commerçants et les hôteliers. Les principales dépenses seront concentrées sur l’hébergement, la restauration et les sorties dans les cafés, discothèques, musées…”, indique Jean-Daniel Beurnier, président du Club AMP24, un réseau créé en novembre 2022 par la chambre consulaire, qui compte aujourd’hui près de 380 entreprises.
Objectif ? Insuffler une dynamique collective et capter les nombreux marchés relatifs à l’organisation des Jeux. JO ou non, Marseille et sa région sont déjà une destination très prisée des touristes.
Pics de fréquentation
L’année 2024 a bien démarré : les Bouches-du-Rhône ont enregistré 46,3 millions de nuitées touristiques au premier trimestre, ce qui représente quelque 9,2 millions de touristes, selon Provence Tourisme. La saison hivernale, de décembre à mars, représente un quart des séjours. En moyenne, la clientèle séjourne 4,5 jours et dépense quotidiennement 61 euros par personne. Ce sont ainsi quelque 655 millions d’euros de dépenses réalisées sur le territoire en cette saison, soit 19% de la consommation touristique annuelle.
Contrairement aux idées reçues, les observateurs ne constatent pas de doublement du prix des chambres d’hôtels. Pour éviter les abus, la ministre déléguée au Tourisme, Olivia Grégoire, avait annoncé fin 2023 le lancement d’un observatoire des prix des nuitées et davantage de contrôles.
Ce coup de projecteur amènera une très grande visibilité en France et à l’international Jean-Luc Chauvin, président de la CCIAMP
Pour les locations saisonnières en région, “l’analyse des nuits réservées en 2024 montre des pics de fréquentation correspondant à des évènements qui nécessitent une réservation anticipée, que ce soient les concerts, les jours fériés ou les grands événements comme l’arrivée de la flamme olympique à Marseille, la finale du Top 14 et les Jeux olympiques”, souligne Isabelle Brémond, directrice de Provence Tourisme.
On note une nette avance sur la semaine du 6 mai, puisque le niveau des réservations au 1er mars pour cette semaine-là est quasiment deux fois plus important par rapport à la même date l’année dernière. Même scénario, à partir de la semaine du 15 juillet et jusqu’à la fin de l’été. “Les deux semaines correspondant aux Jeux olympiques affichent 44% et 28% de nuits réservées supplémentaires respectivement par rapport à ces mêmes semaines observées le 1er mars 2023.”
À cela vont s’ajouter les sommes que vont empocher les propriétaires de logements en location saisonnière, sur lesquels les durées devraient être plus longues et les tarifs plus élevés. Un rapport du cabinet Deloitte pour le compte d’Airbnb, publié en avril 2023, estime que les hôtes franciliens devraient gagner environ 2 000 euros de revenus supplémentaires en moyenne pendant les Jeux. Comme la cité phocéenne compte quelque 11 500 logements en location recensés par la Ville, on peut estimer jusqu’à 22 millions d’euros le magot pour les propriétaires marseillais.
Accélérateurs d’opportunités
Les Jeux apparaissent également comme un accélérateur d’opportunités en termes d’emplois. Si les besoins restent forts en Île-de-France, territoire qui concentre 80% des emplois générés par les Jeux, pour accueillir l’événement et le nombre de visiteurs attendus, plusieurs secteurs recrutent.
Sécurité, nettoyage, restauration, services, logistique et transports ou événementiel… 4 000 offres ont été diffusées et 600 formations proposées dans les Bouches-du-Rhône, département qui compte 108 000 demandeurs d’emploi selon les chiffres de France Travail.
“Plus d’un sur deux retrouve un emploi dans un métier qu’il ne cherchait pas, assure Sandrine Jacob, sa directrice départementale. Les Jeux sont un révélateur de potentiels. Des gens vont découvrir un métier, d’autres, parce qu’il y a un surcroît d’activité, vont avoir une chance de décrocher un premier emploi, des jeunes, des femmes, des seniors qui n’ont pas travaillé depuis longtemps. C’est une occasion de se faire connaître, et les entreprises ont bien l’intention de transformer ces petits contrats dans la durée.”
Capitaliser sur ce moment historique
Par ailleurs, Paris 2024 s’est engagé à organiser des Jeux économiquement et socialement responsables. Pour tenir cette promesse et intégrer de nouveaux modèles, 20 entreprises de l’économie sociale et solidaire ont décroché des contrats dans la région. “On pense qu’il peut y en avoir plus, mais nous ne savons pas encore ce que peut représenter le chiffre d’affaires, précisait mi-mars, Patrick Jammes, vice-président de la Cress Provence-Alpes-Côte d’Azur, délégué aux fonds européens et aux Jeux de Paris 2024. Le but n’est pas que tout s’arrête après les Jeux, mais que ça puisse se convertir en achat responsable, notamment dans la commande publique.”
“Notre territoire attire les grands événements. C’est un révélateur de sa formidable attractivité et cela se poursuivra après les Jeux, veut croire Jean-Luc Chauvin, président de la CCIAMP. Ce coup de projecteur amènera une très grande visibilité en France et à l’international et donnera à beaucoup l’envie de découvrir notre ville après avoir vu les images lors des retransmissions.”
Quatre milliards de téléspectateurs devraient d’ailleurs vivre ce moment historique derrière leur télévision. “C’est l’occasion de capitaliser sur cette fabuleuse vitrine mondiale pour montrer la meilleure image de nos entreprises et de leurs savoir-faire. Nous devrons convertir ce momentum historique en un facteur d’accélération de nos transitions et de notre transformation. Nous avons l’obligation de faire fructifier cet héritage !”