Tourisme, agriculture, environnement, transport, culture, santé, Méditerranée… Après une année et demi de crise sanitaire, l’heure est à la relance économique. Une vaste consultation territoriale entre les élus régionaux, les acteurs économiques et les citoyens va être lancée. Objectif : proposer des actions et dispositifs à mettre en œuvre dans les prochains mois.
Que conserver de ce que certains ont surnommé « l’ancien monde » ? Quels nouveaux modèles construire pour répondre aux enjeux économiques, écologiques, sanitaires, sociaux… d’aujourd’hui et de demain ? Après la fin du « quoi qu’il en coûte », la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur lance les États régionaux de la relance.
L’objectif est d’engager, « secteur par secteur, filière par filière, et dans tous les territoires de la région, une vraie phase de consultation et d’échange avec tout le monde économique », explique François de Canson, vice-président de la région, en charge du développement économique, de l’attractivité, du tourisme et de la prévention des risques majeurs, à l’occasion de la présentation, mardi 21 septembre, à l’Hôtel de Région. « Nous devons bâtir la relance en tenant compte de nos richesses, de nos atouts, mais aussi des difficultés auxquelles sont confrontés nos filières, nos entreprises, nos concitoyens ».
Emploi et rupture d’approvisionnement
Cette large concertation territoriale est donc également ouverte à la société civile, au travers notamment d’une plateforme mise en place sur le site de la Région. En ligne depuis le début du mois d’août, elle a déjà enregistré de nombreuses contributions.
Les plus récurrentes portent sur les problématiques d’emploi, et depuis la reprise de l’activité, sur la pénurie de matériaux dans le BTP ou l’industrie. « Un industriel doit pouvoir produire, il est impensable qu’un constructeur de voitures retourne à l’aiguille, car il ne dispose plus de composants électroniques pour fabriquer des tableaux de bord digitaux. Nous allons travailler avec l’ensemble des industriels de la région, dans toutes nos filières pour anticiper ces difficultés, les prévenir et saisir les opportunités pour avoir un coup d’avance », poursuit le président du Comité régional du tourisme (CRT).
Les indicateurs de rentrée font état d’un redressement de l’économie, mais les ruptures d’approvisionnement et les besoins de main-d’œuvre restent des problématiques pouvant freiner cette reprise. Si les secteurs de l’hôtellerie, le tourisme et la culture ont bénéficié d’un bol d’oxygène cet été, la région Paca reste l’un des territoires de France où l’emploi salarié a le plus reculé depuis 2020, avec une perte de 11 % du chiffre d’affaires pour les services marchands.
L’industrie accuse mieux le coup, mais enregistre néanmoins une baisse de 7 %. Le taux de chômage a, quant à lui, franchi la barre des 10 % fin 2020 contre 8 % en 2019. Dans ce contexte fragile, pour la majorité régionale, sortir de cette crise ne peut être assimilé à un simple processus de relance économique. « Un simple retour au « business as usual » ne peut être satisfaisant. Quelle serait notre plus-value si ce n’est pour revenir au statu quo ? », estime François de Canson.
La relance dans tous les domaines
Les États régionaux de la relance ont pour ambition d’aller plus loin. Ils s’articulent ainsi autour d’une vingtaine de commissions, chacune sur une thématique précise : tourisme, agriculture, environnement, transport, culture, santé, Méditerranée… Pour exemple, la catégorie Économie rassemble trois commissions : « formation et emploi », « développement économique, industrie, attractivité » et « entreprises – artisanat et commerce – économie sociale et solidaire ». Chacune d’elle est pilotée par un ou plusieurs élus régionaux. [voir encadré]
L’idée est d’aborder « tous les sujets, tous les domaines, pour donner un nouveau sens à ce mot de « relance ». C’est pourquoi, certaines commissions dépassent le champ de compétences de la collectivité. « Nous avons quand même un rôle d’accompagnateur de ce petit pays qu’est la région sur des sujets qui ne sont pas forcément les nôtres, comme nous l’avons fait durant la crise, tout en veillant à rester sur la ligne à ne pas franchir », justifie, à ce titre, Bernard Kleynhoff, conseiller régional, président de la commission développement économique et digitale, industrie, export et attractivité.
De cette concertation doivent émerger des solutions concrètes, durables et résilientes, l’enjeu étant aussi de réinventer la manière de travailler pour s’adapter aux nouveaux métiers. De fait, miser sur l’innovation « sera essentiel, quels que soient les secteurs d’activité », poursuit le président du CRT. « Le monde de l’emploi d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier. Nous devons pouvoir proposer une formation, un métier à tout le monde, y compris à ceux les plus éloignés du monde du travail en créant les passerelles qu’il manque aujourd’hui ». D’ailleurs, la Région prévoit d’élargir son « plan de formation avec Pôle Emploi pour répondre aux besoins des entreprises »
L’élu plaide aussi pour « un vrai choc de simplification » dont le monde du travail a besoin. Le secteur sanitaire et social « reste un enjeu stratégique », tout comme le monde de la culture « fondamental ». La Région va d’ailleurs augmenter de 10% son budget pour la culture. Les professionnels de la montagne bénéficieront d’un doublement du plan d’aide de la Région qui va passer de 100 à 200 millions d’euros l’an prochain. L’agence Rising Sud ambitionne d’attirer 500 nouvelles entreprises et la création de 10 000 emplois d’ici à 2027.
Parmi d’autres objectifs évoqués : atteindre la souveraineté alimentaire et être une région pilote dans ce domaine, engager la décarbonation de l’économie, et « faire face à la crise climatique en créant aujourd’hui, les conditions des emplois de demain ».
Promesse de campagne
Depuis le début de la crise de la Covid-19, les Régions en soutien à l’État ont tenté d’amortir le choc lié à la pandémie. La création de ces États régionaux de la relance est une promesse de campagne de Renaud Muselier, réélu en juin président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. La stratégie repose sur la méthode déployée pour faire face à la crise sanitaire, avec comme mot d’ordre « ne laisser personne sur le bord de la route ».
40 000 entreprises ont été accompagnées durant cette période, avec une quinzaine d’outils déployés au plus fort de la crise ; 3,8 milliards engagés avec l’État au titre du fonds de solidarité national, 36 millions déployés avec les collectivités territoriales partenaires dans le fonds Covid-Résistance ; 57 millions via les prêts rebond avec la BPI, ou encore la mise en oeuvre du dispositif « Réaction » pour aider à la digitalisation des artisans et commerçants (4 millions et un millier d’entreprises soutenues).
Un plan de reconquête régionale construit avec tous les acteurs du monde économique, soit auprès de 1 200 entreprises et un budget de 1 milliard sur deux ans. Pour exemple : 64 millions pour renforcer les fonds propres des entreprises, un soutien aux investissements industriels des entreprises dans le cadre de l’appel à projets « Territoires d’industrie » avec notamment 41 millions engagés par l’État et la Région, pour soutenir une centaine d’entreprises… 4 000 ont bénéficié de ce plan de reconquête.
Résultats à court terme
Outre le contrat de plan Etat-Région à 5 milliards, « nous sommes allés chercher 107 millions d’euros de fonds européen, plus de la moitié des entreprises de la région ont été aidées et plus de 35 000 emplois sauvegardés grâce aux dispositifs que nous avons déployés pour les entreprises », assure François de Canson. L’Europe reste un levier que la majorité entend activer pour mettre en œuvre les dispositifs et actions qui résulteront de ces États régionaux de la relance.
Les premières réunions dans chacune des grandes filières débuteront ce jeudi 23 septembre avec la cellule développement économique, industrie, attractivité. Au total, 20 commissions se réuniront d’octobre à décembre, avant la restitution des travaux en fin d’année. « Notre objectif sera d’aboutir à une feuille de route claire pour ces six ans, avec des résultats immédiats », affirme François de Canson, soit dans les six mois à venir.