Les « Élégantes » grues de la Digue du Large, dans le Port maritime de Marseille, ont été sauvées et rénovées grâce au soutien de la Région Sud. Désormais mises en valeur et illuminées, elles témoignent du riche passé industriel et commercial du port.
Les navires du Grand Port Maritime de Marseille (GPMM) ont fait résonner leurs sirènes ce lundi 16 mars après-midi. Ils célébraient la remise en valeur des « Élégantes », les cinq grues historiques qui trônent à plus de 40 mètres de haut sur la Digue du Large.
Depuis trois ans, elles ont bénéficié d’une rénovation complète afin d’offrir à la vue des Marseillais, ce symbole du riche passé commercial et industriel du port de Marseille. Dans les prochains jours, elles seront également illuminées le soir, pour être contemplées à toute heure.
Mises en services en 1961, elles sont tombées en désuétude avec le temps. Vieillissantes, dangereuses, et promises à un démantèlement, la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, au côté du GPMM, a décidé de lancer cette opération de sauvetage et de valorisation à plus de un million d’euros.
Les « amoureux du Patrimoine » au secours des grues
« Elles étaient rongées par la rouille, l’amiante et la corrosion, promises à une démolition certaine », a déclaré le président de la Région, Renaud Muselier, présent pour célébrer les « Élégantes, revenues à la vie ». « Mais il y a trois ans, les amoureux du Patrimoine se sont élevés contre ce destin », a-t-il lancé, en hommage à des associations telles que Sites et Monuments ou le Comité du Vieux Marseille.
Pour l’élu, ces 5 grues sont « les vigies silencieuses de nos bassins, et tous ceux qui ont cru devoir leur dire adieu en 2017 sont soulagés de les voir aujourd’hui resplendissantes ».
« Elles sont magnifiques », s’est réjoui de son côté Hervé Martel, Président du Directoire du Grand Port Maritime de Marseille. « Dans ce paysage, c’est quelque chose de magique. Je suis très content car c’est très symbolique, ici, sur l’entrée actuelle de ces bassins Est du GPMM. C’est symbolique aussi du savoir-faire des ingénieurs du port. Je suis très heureux qu’avec la Région Sud, on ait trouvé des solutions. Quand on veut, on peut en trouver ! ».
Marseille : un port de 26 siècles
Si Marseille est la plus ancienne ville de France, avec ses 26 siècles d’existence, son destin a toujours été celui d’un port. Ses fondateurs, les Phocéens, étaient déjà des marins. La vocation portuaire de la ville, toujours vivante, a depuis connu de multiples facettes.
D’abord en se concentrant sur le Vieux-Port, qui tient son nom du fait que les activités commerciales et industrielles se sont déplacées au nord depuis la création du port de la Joliette en 1853. Le « grand port maritime » s’étend désormais jusqu’à l’Estaque, sur plus de 24 000 hectares.
Les « Élégantes » siègent sur la Digue du Large, ouvrage d’art mêlant la pierre et le béton, protégeant les bassins de la houle et des courants marins sur 7 kilomètres.
« Symbole du temps où la force des hommes faisait le déchargement des navires »
Éléments emblématiques du patrimoine industriel marseillais, ces grues électriques ont été mises en service en 1961 sur le port de Marseille. Elles pèsent près de 72 tonnes chacune et leur flèche culmine à plus de 40 mètres.
« Elles montrent comment le Port de Marseille s’est relevé après la Seconde Guerre mondiale », précise l’historienne spécialiste de la cité phocéenne, Judith Aziza. « Il ne restait qu’une grue sur le port en 1944. Quand on l’a fait redémarrer, on a acheté beaucoup d’outillage, dont ces grues, commandées à la fin des années 1950 ».
« Elles étaient installées sur le quai du Maroc [entre la Joliette et Arenc] pour décharger les produits fruitiers », poursuit l’historienne. « Ces grues sont emblématiques du passé industriel et commercial de la ville. Mais surtout, quand les marchandises, dans des tonneaux et des caisses, étaient déchargées à la main. Elles sont le symbole du temps où la force des hommes faisait le déchargement des navires ».
Témoins du savoir-faire des ingénieurs du port
Mais dans le temps, avec l’intensification du trafic portuaire et les progrès techniques, les « Élégantes » se sont modernisées. « À la base, elles étaient fixes », rappelle Judith Aziza. « Puis, elles ont été électrifiées et rendues mobiles par les ingénieurs du port ».
Leur apparence actuelle témoigne de l’ingéniosité et des compétences des ingénieurs de l’époque pour faire évoluer un outil industriel aussi imposant. « Ils avaient ce savoir-faire d’adapter les moyens de manutention aux besoins. Les grues pouvaient bouger grâce à des chemins mis spécialement en place pour les rendre mobiles, et décharger les bateaux dans divers endroits du port ».
Technique, savoir-faire, force humaine, grandeur industrielle… C’est toute cette histoire qui est désormais remise en valeur aux yeux des Marseillais.
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