Pour passer à la vitesse supérieure dans le développement des transports, la Métropole compte sur le Plan de relance et espère que l’État finance 80 % de ses projets. Si le ministère tempère un peu ses ambitions, d’autres leviers de long terme sont sur les rails, comme la création d’une société publique de transports. Une mission gouvernementale est attendue en mars pour l’étudier.
Lundi dernier, le ministre délégué en charge des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, était à Marseille pour signer deux feuilles de route concernant la mobilité ferroviaire et routière dans la région Provence-Alpes-Côte d’azur, pour plus d’un milliard d’euros.
Ce déplacement intervenait 4 jours après que la Métropole Aix-Marseille-Provence ait voté 2,3 milliards d’euros pour plus de 180 projets de transports sur le territoire. La collectivité compte sur un financement de l’État et ses partenaires à hauteur de 80 % dans le cadre du Plan de relance. Soit environ 1,84 milliard d’euros. La présidente Martine Vassal est d’ailleurs montée défendre ces projets à Paris auprès du Premier ministre. Elle nous confiait que ses propositions « ont été reçues favorablement par Jean Castex ».
L’élue était attendue à l’Hôtel de Région pour signer la « convention de cofinancement de 13 projets autoroutiers ». Son absence « de dernière minute » n’a pas empêché le ministre des Transports de préciser la position du gouvernement sur les projets métropolitains.
Priorité au ferroviaire
D’abord en tempérant un peu les attentes de la collectivité envers le financement gouvernemental : « Les chiffres avancés sont de gros chiffres et, comme toujours, les demandes sont « volontaristes ». Mais je commence à connaître le jeu politique », commente-t-il. Il rappelle surtout que « la réalité […] c’est la priorité très claire au ferroviaire. C’est quasiment 50 % des investissements dans le Plan de relance ». Sur les 11 milliards fléchés pour les transports, « 5 sont dédiés au rail », nous précise-t-il.
Quid des 6 milliards restants pour les autres projets de mobilité en France ? La Métropole pourra-t-elle, comme elle le souhaite, en capter près du tiers ? Selon nos informations, l’exécutif devrait préciser les enveloppes avant l’été. Le ministre reste prudent : « Nous l’étudierons, nous l’analyserons, en lien avec le préfet, pour voir dans quelle mesure ce plan [métropolitain] s’inscrit sur le schéma d’ensemble [national], quelles sont les clés de cofinancement possibles ».
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Une mission gouvernementale attendue à Marseille en mars
« C’est normal que le gouvernement tempère, car les négociations sont en cours », commente le député de la 8ème circonscription des Bouches-du-Rhône, Jean-Marc Zulesi (LREM). Depuis février, il préside le Comité national stratégique de France Mobilités, en charge de mettre en œuvre la stratégie de mobilité nationale.
« Ces milliards demandés par la Métropole ne pourront pas forcément être tous assumés par la case « transports » du Plan de relance », estime-t-il. « Mais il y a des enveloppes à chercher sur d’autres thématiques [Culture, tourisme, sport, événementiel… ndlr] pour financer d’autres projets du territoire et par vases communicants, libérer des crédits pour les rediriger vers la mobilité ».
Par ailleurs, le député annonce qu’une « mission gouvernementale » se rendra à Marseille « début mars » pour « auditionner différents acteurs du transport sur le territoire, faire un état des lieux sur la mobilité et la stratégie de développement ». Ses conclusions pourraient peser dans les négociations entre le gouvernement et la Métropole, qui n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.
La société publique des transports métropolitains de nouveau sur les rails
Ce n’est pas la première délégation à venir faire un diagnostic pour l’État. La précédente, en 2017, devait étudier la pertinence de la création d’une société métropolitaine des transports. Un établissement public sur le modèle du « Grand Paris », porté par l’État, les collectivités et d’autres partenaires comme la Caisse des dépôts ou la Banque européenne d’investissement. Un levier d’action de long terme, au-delà du Plan de relance, pour structurer, financer et accélérer les grands aménagements de mobilité.
Ce projet tient à cœur à la présidente de la Métropole, autant qu’au député Jean-Marc Zulesi : « J’ai essayé de l’inscrire dans la Loi d’orientation des mobilités (LOM) en 2019 », rappelle-t-il. Il compte renouveler l’essai avec la loi 4D (décentralisation, différenciation, déconcentration, décomplexification). Elle sera examinée par l’Assemblée nationale « aux alentours de l’automne 2021. Je pourrai m’appuyer sur le rapport de la mission gouvernementale qui devrait être rendu en début d’été ».
Le député met l’accent sur les capacités de financements que permet un tel organisme. En structurant la stratégie avec les partenaires financiers solides pour lever des fonds, mais aussi « avec une partie d’autofinancement. Car cela permet de créer des taxes qui vont dans les caisses de l’établissement public sans passer par l’État. Ce qui ne plaît pas forcément à Bercy (ministère de l’Économie et des Finances) ». En effet, une surtaxe sur les bureaux dans certains secteurs d’Île-de-France sert à financer la Société du Grand Paris.
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Un contrat d’avenir en attendant ?
Ancien vice-président à la mobilité de la Métropole, aujourd’hui conseiller métropolitain d’opposition LREM, Jean-Pierre Serrus a accompagné Martine Vassal à Paris en début d’année pour la première phase de négociation. « On savait que ce ne serait pas un « one shot » », explique-t-il, conscient que le montant demandé dans le cadre du Plan de relance est ambitieux. « Pour moi, il permet d’amorcer de premiers financements ».
Mais « la priorité des priorités pour la Métropole, depuis la création de l’Agenda mobilité en 2016, c’est de pérenniser des financements sur 5, 10, 15, 20 ans ». Pour lui, différents leviers « essentiels » sont en discussion avec le gouvernement : le Plan de relance sur le court terme, la société publique sur le long terme. « Pour le moyen terme, un contrat d’Avenir État-Métropole. C’est un enjeu essentiel, la contractualisation avec le gouvernement, pour sécuriser les financements et la stratégie, car nous sommes la deuxième ville de France ».
Jean-Pierre Serrus assure que c’était « un point majeur » de la réunion avec Martine Vassal et Jean Castex. « On ne l’a pas suffisamment expliqué », regrette-t-il.