Logements, équipements publics, chauffage à l’eau de mer, avenir des « makers » de ICI Marseille… L’écoquartier des Fabriques est en projet depuis 2015 sur le périmètre d’Euroméditerranée 2. Les cinq premiers projets commenceront à sortir de terre fin 2020, pour une livraison prévue en 2022. Les détails sur ce quartier à vocation inclusive et écologique.
C’est un quartier au passé riche et dynamique, lorsque les savonneries et huileries tournaient à plein régime à Marseille. Aujourd’hui, entre la rue de Lyon et le bassin de radoub (Grand port de Marseille), dans le quartier des Crottes, se côtoient des friches à l’abandon, des entrepôts et des conteneurs maritimes.
Un secteur qui « rompt la continuité urbaine entre Euroméd’1 et Euroméd’2 », explique Laure-Agnès Caradec, présidente de l’établissement public d’aménagement Euroméditerranée. C’est pour cette raison que depuis 2015, le projet d’écoquartier Les Fabriques est dans les tuyaux. Une opération de 14 hectares confiée au tandem Bouygues Immobilier – Linkcity, via la société « XXL Marseille ». Délimitée par la passerelle Gèze au nord, la rue André-Allar au sud, la rue de Lyon à l’est et le chemin de la Madrague-Ville à l’ouest, elle devrait aboutir à un écoquartier « inclusif », avec petits commerces, bureaux, et 2 500 logements mêlant social et accession à la propriété.
Les 5 premiers projets lancés en fin d’année
Cinq ans plus tard donc, les premiers édifices se préparent à sortir de terre : « Cinq permis de construire ont été déposés fin 2019 », explique la directrice du projet chez XXL Marseille, Anne Villard. « On attend les réponses très vite, avant la fin du mois de septembre. Après le délai de trois mois pour les recours, on devrait lancer les chantiers en fin d’année. La livraison des premiers logements est prévue en 2022 ».
Situés au sud du quartier, elle explique qu’il s’agira de « quatre îlots de logements et d’un parking silo en superstructure de 422 places ». Ce dernier devrait être mutualisé pour le stationnement des habitants des futurs immeubles alentour, « mais aussi être accessible aux non-résidents en journée, grâce à un système innovant de gestion des places ». Un parking semi-privé donc, « pour minimiser l’étalement urbain ».
Les quatre projets de logements dans le détail
Sur l’îlot 4C2 qui fait l’angle de la rue Allar et la rue de Lyon, deux projets devraient être lancés en début 2021. Le premier, conçu par Marciano Architecture pour Bouygues Immobilier, est déjà commercialisé sous le nom AL-FA. Il prévoit 148 logements en accession libre (48 à prix maîtrisé) sur une structure variant entre R+6 et R+15. Au rez-de-chaussée, 700 m2 de commerces sont prévus.
La parcelle de plus de 5 000 m2 est située sur l’ancienne concession Peugeot. Cela impliquera donc en premier lieu une dépollution conséquente du site. Puis, il faudra mener des fouilles archéologiques préventives en raison de la voie romaine qui passait à cet endroit.
Sur le même îlot, un immeuble de 13 étages dessiné par l’agence niçoise Février-Carré pour Linkcity, proposera 85 logements, dont 25 sociaux et 60 intermédiaires. Au rez-de-chaussée, trois locaux commerciaux sont prévus ainsi qu’un parking de 130 places en sous-sol.
Le quatrième projet sortira de terre le long de la rue Allar. Deux agences l’ont conçu pour Linkcity : PPX Architectes (Paris, Lyon) et BAG Architectes (Marseille). Il comprendra 150 logements dont 53 sociaux, 44 intermédiaires et 53 en prêt locatif social. Un local partagé de 150 m2 sera mis à disposition des habitants et l’ensemble abritera un une crèche de 60 berceaux.
Enfin, plus au centre du futur quartier, l’îlot 5B3 accueillera un ensemble de 84 logements dont 32 sociaux et 52 intermédiaires porté par Linkcity et dessiné par 3A Architectes (Marseille). Au pied, un local d’activité de 220 m2 est prévu.
Une nouvelle école de 20 classes
Sur le même îlot, un groupe scolaire va émerger. « L’école des Fabriques » accompagnera le nouvel écoquartier, et la présidente d’Euroméditerranée (qui aura la maîtrise d’ouvrage) attend qu’elle « soit livrée en même temps que les logements ». Elle comptera 20 classes (17, après mise à jour, dont une partie sera dédoublée*), précise Laure-Agnès Caradec « et deux cours avec préau de 1 000 m2 chacune, dont une à l’étage ».
Le concours lancé par l’établissement public d’aménagement a retenu le projet de l’agence Brenac & Gonzalez (Paris). Anne Villard, la directrice des Fabriques, explique qu’une « place des enfants » sera aménagée au sud de l’école, avec des équipements extérieurs dédiés à la jeunesse et aux familles. Elle fera partie des trois places en projet dans le futur quartier.
Autre équipement public prévu aux Fabriques : une médiathèque de 4 500 m2 sur un nouvelle « grande place le long de la rue de Lyon à proximité de la station Gèze, où un gymnase est également attendu », précise Laure-Agnès Caradec. Un projet qui sera porté par la municipalité, et verra le jour dans une phase ultérieure.
L’ouverture de l’école est prévue pour la rentrée scolaire 2024
« Tous les logements en thalassothermie »
Le principe de thalassothermie consiste à capter l’énergie naturellement contenue dans la mer pour produire de la chaleur et du froid. Du côté d’Euroméditerranée, un pan entier de la ville se chauffe l’hiver et se rafraîchit l’été à l’aide de ce système grâce aux installations Thassalia et Massileo.
C’est ce dernier système qui a été retenu pour alimenter 100 % du quartier des Fabriques. Les 250 000 m² de surface de plancher et les 18 îlots du quartier seront ainsi réchauffés et refroidis « par une énergie verte et locale », explique Anne Villard. « On s’est battu auprès des promoteurs pour obtenir cela, car ça représente un surcoût financier. Mais l’intérêt, c’est que c’est une énergie à 70 % renouvelable, et locale. Ce n’est pas une climatisation, cela permet de baisser la température d’environ cinq degrés en été », précise-t-elle.
Les « makers » d’ICI Marseille vont-ils déménager ?
Cela fait maintenant deux ans qu’ICI Marseille s’est implanté au cœur du futur écoquartier des Fabriques. Cette manufacture collaborative et solidaire de 3 500 m2 est destinée aux artisans, designers, entrepreneurs et start-up de la création traditionnelle ou numérique. Elle permet de partager des lieux de travail et mutualiser les machines ainsi que les coûts pour des communautés de « makers ».
Linkcity et Bouygues Immobilier ont soutenu ce projet, prévu initialement pour être éphémère. Car l’immense hangar pourrait abriter un futur projet immobilier. Les « makers » devraient alors déménager au nord du quartier, pour investir les pieds d’immeubles de la « rue des activités » qui verra le jour entre 2024 et 2026.
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Mais le projet fonctionne et prouve sa raison d’être en tant que tel : « les makers, c’est l’âme du quartier », lance Anne Villard, « ils ont créé des emplois et du lien social. On s’est rendu compte que tout le monde dans le même bâtiment, ça crée de l’émulation, de la solidarité, des relations ».
Assez pour convaincre les décideurs de pérenniser le projet et le site ? La directrice des Fabriques explique que « c’est une hypothèse que l’on pousse aujourd’hui ». Une hypothèse qui sera mise à l’épreuve de la logique immobilière ces prochaines années.