Depuis plusieurs semaines, un groupe de chercheurs explore les pistes d’un nouveau traitement contre les formes graves du Covid-19. Le projet nommé Explore Covid-19, vient de dévoiler ses premiers résultats.
Depuis début avril, Marseille Immunopôle, cluster international de spécialistes en immunologie, a levé « une armée » de chercheurs pilotée par le professeur Éric Vivier, pour étudier les mécanismes immunitaires dans une infection à Covid-19. Le projet baptisé Explore Covid-19 étudie des pistes de traitement du coronavirus.
Il associe les équipes de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille (AP-HM), de l’Hôpital Laveran (HIA-Laveran) et de la société de biotechnologie Innate Pharma pour analyser la réponse immunitaire de 82 patients à différents stades de la maladie.
Explore Covid-19 dévoile ses premier résultats. Ils permettent d’affiner le « double rôle » du système immunitaire face au Covid-19.
La réponse immunitaire face au Covid-19 se précise
Pour la majorité des patients, une fois le virus identifié par le corps, les globules blancs s’activent pour l’éliminer en quelques jours avant de revenir à leur état normal.
Les chercheurs ont confirmé que la « lymphopénie (une baisse du taux de globules blancs qui touche certaines cellules) augmentait avec la sévérité de la maladie » et identifié « des freins immunitaires induits par le Covid-19 ». Pour vulgariser : le virus perturbe la communication des globules blancs et diminue donc les défenses naturelles.
Au contraire, dans une seconde phase, alors que le système immunitaire a « terminé le travail » pour éliminer le virus, il s’emballe et entraîne une hyper-inflammation des poumons. Une complication observée chez 15 % des patients. Elle peut déboucher sur un Syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), tristement connue dans les services de réanimation durant l’épidémie.
Deux traitements à l’essai entre Marseille et Lyon
Pour ces deux phases de complications, deux traitements en immunothérapie sont aujourd’hui testés par le biais d’essais cliniques : l’un baptisé « Force », utilisant l’avdoralimab et l’autre « IMMUNONCOVID-20 », qui porte sur le monalizumab. Deux molécules existantes dans le traitement du cancer et développées par Innate Pharma, société marseillaise de biotechnologies spécialisée en immuno-oncologie. C’est elle qui finance le projet Explore Covid-19.
Nous avions d’ailleurs déjà annoncé le lancement du premier essai clinique de l’avdoralimab, pour maîtriser la « sur-réponse immunitaire » entraînant les complications respiratoires graves. Le protocole est actuellement testé sur 108 patients graves à la Timone, l’hôpital Nord, et Laveran.
Mais cela ne concerne pas les premiers stades de la maladie, et le problème de réponse immunitaire pour éliminer le virus. Le directeur du projet Explore Covid-19, le docteur Frédéric Vely explique que « des anticorps d’immunothérapie déjà développés dans le cancer comme ceux bloquant les récepteurs CD39, PD-1 et NKG2A pourraient permettre de stimuler l’action des lymphocytes T et NK aux premiers stades de la maladie ».
Il fait référence à la molécule nommée monalizumab. Elle est testée dans l’essai IMMUNONCOVID-20, au centre de lutte contre le cancer Léon Bérard à Lyon, chez les patients positifs au Covid-19 et atteints d’un cancer. Jean-Yves Blay, directeur du centre, mène cet essai du traitement développé par Innate Pharma (dont il est membre du conseil de surveillance).
En présentant ses résultats, le projet Explore Covid-19 n’a d’ailleurs pas manqué d’encourager cet essai : « Ces dernières données soutiennent le rationnel des essais cliniques en cours et potentiels avec les inhibiteurs de ces points de contrôle immunitaires aux premiers stades de Covid-19 ».