Nous avons étudié les propositions des candidats aux élections municipales pour les écoles de Marseille. Entre rénovation d’urgence et Etats généraux, école inclusive et 100% de bio dans les assiettes, jusqu’au retour de la blouse dans les salles de classe. Tous au tableau ! 

Etat du bâti « catastrophique », « manque d’entretien », « vétusté » « insalubrité » Tous les candidats aux élections municipales de mars 2020 ont fait des écoles de Marseille une grande priorité de leur projet. Bien avant le très controversé partenariat public-privé (PPP) à un milliard d’euros, pour reconstruire 34 écoles primaires, que la justice a enterré, la situation des écoles de la ville a toujours défrayé la chronique.

Marseille compte 80 000 écoliers, répartis dans 470 écoles sur 16 arrondissements. 55 000 mangent à la cantine. Les écoles représentent un quart du budget de la ville, avec près de 200 M€ de fonctionnement, et plus de 50 M€ d’investissement. Malgré le récent audit réalisé par deux cabinets d’études indépendants, concluant à l’état « convenable » des établissements, et mettant en exergue seulement « des points à améliorer », les candidats continuent de dénoncer une situation qui n’a que trop duré, certains insistant sur les problèmes sanitaires.

Par ailleurs, c’est à l’école que se forment les premières inégalités. Au-delà des murs, il s’agit donc d’offrir aux écoliers les conditions optimums d’apprentissage.

Tous les candidats sont sortis de la logique du partenariat public-privé. Tous parlent d’un nouveau diagnostic réalisé par des cabinets extérieurs indépendants, et chacun y va de son grand plan « d’urgence » pour sauver les écoles de la deuxième ville de France.

Yvon Berland (LREM) : 100 jours pour agir

Yvon Berland, candidat soutenu par La République en marche, a fait de l’éducation le fil rouge de son programme, « car, tout par de là (…) L’école de la République, notre bien commun, a été délaissée. Nos écoles publiques sont depuis de nombreuses années en danger », déclare-t-il. « Ces difficultés se concentrent au sein des quartiers les plus en difficulté, accentuant par ricochet la fracture territoriale qui frappe Marseille plus qu’ailleurs et le déterminisme social qui l’accompagne. » 

Après une phase d’audit, l’équipe Berland se donne 100 jours pour « rénover les bâtis anciens et indignes, avec des salles de classes chauffées ou climatisées ». Il propose d’augmenter le personnel municipal à l’école, passant d’un agent pour 10 enfants en maternelle, à 1 pour 20 en primaire. Plus globalement, il est envisagé de sécuriser les périmètres scolaires (accès piétons, police, vidéosurveillance) ; installer des capteurs de pollution de l’air et rendre les écoles 0 carbone et 0 déchet. 

« 17% des Marseillais âgés de 15 à 29 ans n’ont aucun diplôme et, chaque année, 14% des jeunes sortent de l’école sans aucun certificat de l’Éducation nationale », souligne le candidat. Fort de ce constat, il mise aussi sur des méthodes d’apprentissage plus ouvertes au monde extérieur : il propose ainsi d’offrir une carte de transports gratuite afin de favoriser les sorties scolaires ou encore d’ouvrir des établissements hors des temps scolaires pour la pratique du sport, des arts et du soutien scolaire entre autres. « Nous proposerons de nouveaux apprentissages périscolaires : arts, langues vivantes, écologie ou philosophie. Nous favoriserons également la mixité sociale et multiplierons les jumelages inter-écoles et internationaux ».

Samia Ghali (SE) : travaux d’urgence et plan « Santé à l’école »

Comme Yvon Berland, pour Samia Ghali, l’égalité des chances passe par l’école : « L’école reste le meilleur passeport pour la vie », déclare la candidate Marseille avant tout qui lancera, si elle est élue, un audit indépendant dans les trois premiers mois du mandat « afin de déterminer les travaux d’urgence à réaliser et d’établir la programmation d’un plan pluriannuel de réhabilitation des écoles ».

Autre mesure de son programme : une conférence des écoles organisée chaque année au mois d’avril, dans les huit secteurs de la cité phocéenne. Présidée par le maire, elle regroupera le maire de secteur, la communauté éducative, les parents d’élèves et « aura pour objet de déterminer les principales actions à conduire dans les écoles afin d’améliorer l’accueil des enfants et la vie scolaire ». Elle aussi veut augmenter le nombre de « tatas » dans les écoles maternelles pour atteindre 1 Atsem pour 20 enfants. Un accueil gratuit des élèves de 7h30 à 18h30 dans toutes les écoles.

Elle prévoit d’allouer un « petit budget annuel » à chaque école pour l’organisation de sorties pédagogiques et découvertes et le renforcement de l’accompagnement des élèves en difficultés scolaires. L’une de ses mesures porte sur le lancement d’un programme « Santé à l’école » (deux bilans sur le parcours scolaire en grande section et en CE2). Il s’agit de « dépister les problèmes éventuels de vue, d’audition, de langage, de développement psychomoteur, de poids… et d’apporter les meilleurs conseils aux parents ».

Bruno Gilles (SE) : des Etats généraux au « Speed »

Bruno Gilles (sans étiquette) entend lancer les Etats généraux des écoles marseillaises (EGEM) à partir de l’automne qui consisteront à élaborer un diagnostic sur le bâti, les cantines, le personnel municipal et les aides au fonctionnement. « L’objectif est de faire émerger des propositions concrètes », souligne le candidat, qui envisage également la création d’un Pôle de rénovation des écoles marseillaises (PREM), « dès le lendemain de l’élection », constitué d’experts issus de la ville, des instances de l’Education nationale et des fédérations de parents d’élèves.

Parallèlement, deux entités techniques seront créées : le « SPEED » (service de proximité d’entretien des écoles en difficulté) via une plateforme informatique dédiée à l’urgence et aux petits travaux, et gérée par les mairies d’arrondissements qui disposeront d’une brigade technique capable d’intervenir de 6h à 20h, du lundi au vendredi, et de 8h à 12h le samedi. Puis le Sesat (Service d’études, de suivi et d’accompagnement des travaux). Objectif : au-delà des visites de suivi, il s’agit d’instaurer deux réunions annuelles dans chaque école, une afin d’évaluer les besoins en vue d’une programmation de travaux et une autre pour réceptionner.

Pour prendre en compte le changement climatique, il prévoit, outre l’entretien et l’assurance d’un chauffage fonctionnel dans toutes les écoles, « la mise en place progressive de pompes à chaleur puisant l’énergie présente dans l’air, l’eau ou encore la terre suivant le principe de géothermie ». Il envisage de changer progressivement le mobilier et ré-agencer la majorité des réfectoires, mettre en place l’apprentissage du tri sélectif et se fixe l’objectif 100 % EAC : éducation artistique et culturelle.

Côté personnel municipal, Bruno Gilles, parle de « valorisation et requalification des fonctions des agents », plutôt que d’augmentation. « Le plus grand chantier en matière de ressources humaines », estime-t-il.

Debout Marseille ! « Les enfants d’abord »

La liste « Debout Marseille ! écologiste et citoyenne » mise aussi sur un plan de rénovation de toutes les écoles dégradées, en maîtrise d’ouvrage publique, dont un quart au cours de la mandature. Pour ce faire, les Verts envisagent de doubler le budget d’investissement de la Ville. « Nous prévoyons d’investir 30 millions d’euros par an, sur six ans, pour rénover un quart des écoles, puis pour les rénovations légères, 20 millions sur la mandature ».

Debout Marseille ! prévoit la construction de douze groupes scolaires pour 120 millions sur la durée du mandat, pour accueillir 600 nouveaux enfants chaque année. Pour répondre aux enjeux du changement climatique, en finir avec « les passoires thermiques », construire des « écoles résilientes et inclusive », les Verts optent pour l’isolation thermique et phonique des bâtiments, l’installation d’équipements de production d’énergie (panneaux solaires, géothermie), de vitres anti-chaleur et brise-soleil ; la végétalisation des cours de récréation et la fin du béton « des espaces ouverts pour créer des îlots de fraîcheur et permettre le ruissellement des eaux de pluies ».

300. C’est, sur la mandature, le nombre d’agents que souhaite recruter l’équipe. « La solution pour arriver à la neutralité des finances est de retrouver un équilibre entre le public et le privé, dans le cadre de la loi, ce qui nous permettra de dégager 6 millions d’euros pour former et financer ces emplois ». Un personnel dédié au meilleur encadrement des écoliers, et notamment à repérer les cas de harcèlement.

Autre point : la création d’une commission « École et Transparence » pour assurer un dialogue permanent entre l’administration, les responsables politique et les représentants de parents. Elle sera dotée d’une plateforme numérique de gestion des demandes ouverte à tous les membres de la commission.

Le « plan Charlemagne » de Martine Vassal (LR)

Martine Vassal (LR) veut sortir de la logique des travaux réalisés au coup par coup. Sa stratégie repose sur un « plan Charlemagne », pour les écoles, élaboré sur 15 ans, à l’instar de celui initié pour les collèges, au Département des Bouches-du-Rhône, dont elle est à la tête. « Ce plan comportera la réalisation de travaux de rénovation d’urgence et un partenariat fort avec le Département ».

Avant sa mise en œuvre, la candidate préconise aussi un nouvel audit « sans concession » en six mois, là aussi, par des experts externes. Mais sans attendre les résultats, comme d’autres candidats, elle prévoit la réalisation de rénovation d’urgence, « car nous connaissons les écoles qui sont dans le plus mauvais état ». Pour la réalisation des travaux courant, elle souhaite créer un « allô-mairie spécial écoles », et redonner une plus grande responsabilité aux mairies de secteur.

La candidate veut promouvoir l’architecture provençale « douce et classique pour la construction et la reconstruction des bâtiments éducatifs, rappelant nos écoles d’antan de l’extérieur, et moderne à l’intérieur ». Pour « connecter » les enfants à la nature, Martine Vassal veut planter « massivement » des arbres et créer des murs végétalisés, développer les jardins potagers, installer des ruches dans les écoles qui le souhaitent quand techniquement, ce sera possible, et créer des « zones fraîches » dans toutes les écoles.

Le Printemps Marseillais : 1 milliard d’euros pour la rénovation des écoles

Naturellement, le Printemps Marseillais, dont la plupart des membres a dénoncé dès l’origine le partenariat public-privé des écoles, a fait de cette question sa priorité. « Avec nous, les écoles marseillaises ne seront plus la honte de la République », a déclaré Benoît Payan, porte-parole du Printemps Marseillais et tête de liste dans les 2/3e arrondissements.

Première mesure phare : un milliard d’euros sur six ans pour la rénovation des écoles. « C’est le prix pour en finir avec le scandale des écoles ». Dès le début du mandat, le Printemps Marseillais prévoit de rénover 38 écoles qui présentent un risque immédiat pour la santé des écoliers, avant la rénovation de l’ensemble des groupes scolaires en mauvais état. « Cette rénovation, c’est aussi une chance pour faire de nos écoles des lieux plus verts, plus respectueux de notre environnement. Elles ne doivent plus être des passoires thermiques et au contraire devenir des îlots de fraîcheur ».

Il souhaite doubler le budget de l’entretien des groupes scolaires. « On va s’appuyer sur le tissu économique local : les architectes, les professionnels du BTP, les géomètres, les PME… Il s’agit de réinjecter 1 milliard d’euros sur plusieurs années dans l’économie locale, pour créer un cercle vertueux. Il faut faire confiance à nos entreprises pour ces rénovations qui se feront en concertation avec les parents et le corps enseignant. Pour nous, l’essentiel est d’être au chevet du territoire ».

Le plan « urgence école » de Stéphane Ravier (RN)

Enfin, Stéphane Ravier (RN) a fait de la rénovation des écoles sa priorité au travers d’un grand plan « Urgences écoles » de rénovation, reconstruction « si nécessaire » dès le mois d’avril 2020. Il propose de décentraliser la gestion des écoles aux mairies de secteur « plus réactives et au plus près du terrain » et d’en construire plus ; sécuriser les entrées et sorties d’écoles par des « papis et mamies trafic » rémunérés par la Mairie.

Tous les candidats ont intégré un volet numérique dans leur programme, à des degrés différents, ainsi qu’un aspect portant sur la sécurité des abords des écoles, comme des zones 30, l’interdiction du stationnement anarchique,…


Le retour de blouse à l’école

Trois candidats prônent le retour de la blouse à l’école. « Pour les écoles primaires volontaires et après avis du conseil d’école », Samia Ghali souhaite expérimenter un retour de la blouse à l’école « pour gommer les différences vestimentaires entre les enfants ». Ce retour de la blouse figure aussi dans les programmes de Stéphane Ravier (RN) et Martine Vassal (LR), également sur la base du volontariat des écoles. Ils proposent d’en financer l’achat. Une proposition pour « contribuer à apporter plus d’ordre et de discipline et contribuer concrètement à l’égalité entre les élèves », indique le programme de la candidate LR.

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