Le Port de Marseille-Fos poursuit sa mutation. Un plan d’actions jusqu’à 2024 et un investissement de 350 millions ont été actés pour que le premier port français atteigne l’excellence environnementale, tout en conciliant sa croissance économique.
Un « port vert au service de l’économie bleue », telle est l’ambition du port de Marseille-Fos. Pour atteindre cet objectif, le premier port français (51e rang mondial) a décidé d’investir 350 millions d’euros d’ici à 2024. Cette nouvelle stratégie qui vise à mieux concilier croissance économique et excellence environnementale a été approuvée, le 5 mars, à l’occasion du conseil de surveillance du port.
Elle repose sur quatre piliers : la redynamisation industrielle et l’innovation « pour réussir notre transition énergétique », la « transition numérique et des nouvelles technologies », booster la compétitivité et enfin valoriser « les compétences de la place portuaire ». Tous les projets engagés ou aboutis entre 2014 et 2019 ont nourri la réflexion sur la façon de faire évoluer le modèle économique du port de Marseille Fos vers un rôle de « port entrepreneur » et en « cohérence » avec la stratégie portuaire nationale impulsée par le gouvernement.
Hisser le port de Marseille-Fos au premier plan de la scène maritime mondiale
Ces dernières années, le port s’est déjà engagé dans la voie de la transition énergétique. Il était le premier en France à se doter de connexions électriques des navires à quai. Le GPMM est le seul port de Méditerranée à offrir ces connexions, et travaille, avec le soutien de la Région Sud, pour que d’autres armateurs que ceux basés à Marseille, soient également équipés. Le terminal du Cap Janet sera équipé progressivement d’ici à 2025.
Le port a également attribué une baisse des droits de ports aux navires les moins polluants et implanté des démonstrateurs industriels liés au recyclage de CO2. Avec une « position stratégique en Méditerranée, nous avons la capacité de nous hisser au premier plan de la scène maritime mondiale pour devenir une réelle alternative aux ports saturés du range Nord », estime Élisabeth Ayrault, présidente du Conseil de surveillance du port de Marseille-Fos.
Vers une réduction des nuisances
Pour mettre en œuvre sa mutation, la plateforme annonce un investissement de près de 350 millions d’euros jusqu’à 2024 : « près des deux tiers seront dédiés aux projets de développement et un tiers aux projets de maintien des infrastructures et du patrimoine », souligne le port dans un communiqué de presse.
Il s’accompagne d’un changement de « posture » et l’application de « nouveaux principes d’actions ». Ainsi, la mue passera par l’élaboration d’un Schéma directeur du Patrimoine naturel « pour mieux prendre en compte les impacts à l’échelle de l’ensemble de la Zone industrialo-portuaire ». Il entend aussi se placer comme « aménageur volontariste, pour un processus réglementaire intégralement anticipé par le Port lui-même pour réduire le délai entre la commercialisation et l’implantation ».
Afin d’intégrer la politique environnementale au modèle de développement du port, un plan d’actions sera mis en œuvre avec notamment la recherche « de solutions multimodales dès l’aménagement et le suivi en vue de la réduction des impacts et nuisances pour les populations locales ».
Recherche de synergies entre les espaces portuaires et urbains des bassins marseillais
À Marseille, les nuisances dues aux pollutions maritimes sont souvent critiquées par les élus locaux. Les quartiers Nord sont directement exposés aux émissions de dioxydes d’azote et de soufre. Lorsqu’elle était sénatrice, Samia Ghali, [aujourd’hui maire adjointe à la Mairie de Marseille, ndlr] s’était exprimée à plusieurs reprises sur le sujet dénonçant des « usines à cancers ». Depuis janvier 2020, les émissions de soufre sont plafonnées à 0,5% en mer par l’Organisation maritime internationale (IMO).
Le Printemps marseillais, aujourd’hui aux commandes de la Ville de Marseille, affichait dans son programme de campagne la volonté de faire de « Marseille une ville-port-exemplaire ». « C’est avec le port que le Marseille de demain se construira, et il doit devenir le port de l’excellence écologique et celui de l’excellence sociale ».
Sans remettre en cause la vocation industrielle et portuaire du bassin Est, le Printemps marseillais soulignait la nécessité d’un « impact moins contraignant et plus respectueux de tous ». La majorité souhaite le lancement d’une étude d’évaluation du potentiel de trafic des bassins Est (Marseille) et de leur complémentarité avec les bassins Ouest (Fos-sur-Mer), co-financée par les partenaires de la charte Ville-Port.
À ce titre, le GPPMM réaffirme la triple vocation des bassins marseillais : urbaine, industrielle et commerciale. Dans les bassins marseillais, la recherche de synergies entre les espaces portuaires et urbains est également au cœur de la vision de développement portée par le port de Marseille Fos.
Cette stratégie se fonde à la fois sur les perspectives de croissance ainsi que sur le partenariat entre la Métropole, la Ville et le port. « L’ambition de la politique d’aménagement sur les bassins Ouest (Fos) est d’accompagner la transition par rapport au modèle « tout pétrole » tout en limitant la consommation brute de foncier. Tandis qu’à l’Est (Marseille), l’ambition est celle du maintien de l’outil industriel avec des mesures fortes de réduction des nuisances et d’anticipation des réglementations environnementales », explique Hervé Martel, président du Directoire du port de Marseille Fos.
« Être au cœur des modèles de demain »
Par ailleurs, dans le cadre du plan stratégique 2020-2024, le port de Marseille Fos prévoit la création de deux filiales. La première dédiée à l’immobilier, pour la gestion et la transformation des actifs immobiliers du port qui lui seraient confiés, investir ou de co-investir en minoritaire sur des projets logistiques ou tertiaires, selon l’intérêt financier et stratégique.
L’autre sur la question énergétique destinée à allier une vision de long terme et une agilité dans la décision d’investissement ou de cession ; monter en compétence sur le plan technique et financier sur ces nouveaux métiers et capter plus de valeur ajoutée. « La stratégie du port entrepreneur répond à plusieurs motivations. Le port souhaite innover, être au cœur des modèles de demain, se doter des capacités et compétences pour réussir les transitions nécessaires. 2020-2024 sera une période de transformation pour le Port qui ne veut pas seulement constater la mutation opérée sur son domaine, mais souhaite impulser une dynamique de développement des filières d’avenir », affirme Hervé Martel.
Le cluster industrialo-portuaire de Marseille Fos représente 7,5 % des emplois salariés dans le département des Bouches-du-Rhône.