Le premier « Production Summit Fiction » organisé au Palais de la Bourse à Marseille est l’occasion de mettre en lumière la filière des industries créatives sur le territoire. Chiffres clés, stratégie, projets… Moteur, action !
« Quel avenir pour les formats courts et les web séries ? », « Comment la réforme de l’audiovisuel public peut-elle profiter aux régions et professionnels locaux », ou encore « Etat du financement de la fiction : leviers et freins ». Ces thèmes ont été abordés à l’occasion du premier « Production Summit Fiction », mardi 16 avril. Des échanges riches à l’occasion de cet événement organisé au Palais de la Bourse, par Le Film Français et la société Hildegarde, détentrice des magazines Première, références dans le secteur des industries créatives, pour les professionnels.
C’est la première fois que Marseille accueille ce type de manifestation. Une délocalisation inédite en région, qui donne l’occasion aux donneurs d’ordres, habitués à traiter à Paris, de rencontrer des porteurs de projets du sud de la France (producteurs, scénaristes et réalisateurs). Depuis la disparition en 2005, du Sunny Side, festival international du documentaire [qui a quitté Marseille pour la Rochelle ndlr], aucun autre événement réservé aux professionnels des industries créatives n’a été organisé sur le territoire, pourtant doté d’un rare potentiel.
88 M€ de retombées économiques directes
La qualité de la lumière et l’ensoleillement, la variété des décors extérieurs (naturels et urbains), le TGV et l’aéroport, le savoir-faire des techniciens, la présence de deux studios répondant aux standards internationaux : le Pôle Média Belle de Mai à Marseille et Provence-Studios à Martigues, mais aussi les infrastructures numériques (datacenters, réseaux télécoms) et la French Tech locale, qui fait des industries créatives un de ses axes stratégiques, font de la métropole Aix-Marseille Provence, l’un des territoires les plus filmés au monde. Le deuxième lieu de tournage en France après Paris. 1715 jours de tournage comptabilisés en 2018 dans la métropole contre 4 500 dans la capitale. Marseille a elle seule en a accueilli 480 en 2018 et a d’ailleurs mieux résisté à la baisse du nombre de réalisations au niveau national (-30% de tournages en France entre 2017 et 2018 contre -5% à Marseille). « Lorsque je suis invitée à Paris, pour le premier Production Summit Fiction, en 2016, je comprends tout de suite qu’ils sont en train de mettre en place un événement qui manque cruellement à notre territoire », nous explique Sabrina Roubache, productrice et fondatrice de Gurkin Invest Film.
A l’époque, son ambition est d’apporter des idées sur « mon territoire pour aider ma filière à être plus visible, et attirer plus de tournages, de producteurs, de production… » Car il faut dire que la filière cinéma est un secteur de poids dans l’économie régionale : sur 94 000 entreprises dans la Région, 1 500 travaillent dans les industries créatives, générant un chiffre d’affaires de 550 M€ par an et représentant 3000 emplois. Selon les chiffres de la CCI Marseille Provence, en 2017, les tournages ont généré des retombées économiques directes sur le territoire métropolitain de 88 M€, et le double de retombées indirectes liées au tourisme et à l’image.
Une stratégie collective pour structurer la filière
Pour structurer le secteur et faire de cette filière d’avenir une filière d’excellence, il convenait d’avoir une stratégie territoriale forte ; qui se concrétise à court terme par la tenue du « Production Summit Fiction ». « Il a fallu mettre en phase toutes les institutions, la Métropole, la Ville de Marseille, la Région et la CCI. Elles ont compris l’enjeu et tout le monde a répondu présent. Tous ont compris qu’accueillir un tel événement, ça pouvait envoyer un message très positif à la filière », explique la productrice, également élue consulaire depuis 2016, heureuse de ce travail collectif. « Il faut prendre ce sujet à bras-le-corps, poursuit-elle, et c’est ce que les institutionnels ont décidé de faire. C’est un signal fort en politique, ça aligne tout le monde », pour faire d’Aix-Marseille une terre de tournage reconnue internationalement.
Une réflexion est d’ailleurs en cours afin de définir un plan d’actions et faciliter l’accueil et la réalisation de tournages. Le premier axe repose sur l’amélioration de la coordination de l’ensemble des acteurs. Se doter de moyens techniques et logistiques permettant de faciliter l’accueil des équipes figure également au cahier des charges.
Création d’une plateforme logistique de tournage à Marseille
Dans cette perspective, un projet de création d’une plateforme logistique de tournage à Marseille est dans les cartons. « Un outil idoine et efficient qui répond aux standards internationaux », confie Sabrina Roubache, qui visite actuellement différents lieux dans la cité phocéenne. « Il y a de nombreux choix ici. Ce qui est sûr c’est que ce sera dans une zone relativement inattendue mais extrêmement bien desservie », sourit-elle, sans vouloir en dire plus pour l’instant. Dans cette aventure, elle agrège l’ensemble des partenaires. « Il faut voir ça comme une structure complémentaire qui va servir l’ensemble de la filière ».
Une complémentarité avec notamment le Pôle Média de la Belle de Mai et la plateforme déjà existante à Martigues : Provence Studios et ses 26 000 m2 de bâtiments. Une infrastructure qui en quatre ans a réussi à s’imposer comme lieu incontournable et dont la notoriété a été renforcée après le tournage de Gaston Lagaffe, en 2017. Pour Sabrina Roubache, « il est impératif de maintenir le rythme de croisière et même d’accélérer. Marseille reste la locomotive de la filière. La concurrence n’est pas entre nous. Nous sommes challengés par d’autres régions, là est la concurrence ! » Et d’ajouter :« la Région Sud, historiquement, a toujours été cette figure tutélaire sur la filière. Sa commission cinéma a été créée il y a 25 ans. La Région n’en est pas à ses débuts, il faut donc s’appuyer sur des outils existants, sur les personnes qui sont là et qui ont de l’expérience, c’est très important mais ce qui fera la différence c’est la stratégie commune, comme ce qui est en train de se construire actuellement ».
La Région Sud a affecté l’année dernière 5,3 millions d’euros à son fonds d’aide à la production. Quatorze projets de long métrage ont été aidés au titre de la production en 2018, se partageant une enveloppe d’un peu plus de 2 M€ (entre 100 000 et 200 000 euros par projet). 870 000 euros ont été attribués à dix projets de fiction TV, tels que Crimes dans le Luberon ou La stagiaire. Le documentaire est également fortement soutenu avec une enveloppe globale dépassant 1 M€. Une aide au développement de 110 000 euros a également été mise en place, avec une catégorie spéciale : aide aux projets groupés, qui s’adresse aux producteurs désireux de créer un catalogue cohérent. Avec la volonté d’écrire un scénario qui permette au territoire de s’imposer, la CCI Marseille Provence comme la Métropole Aix-Marseille Provence participe aux Assises du cinéma, lancés par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Faire du « Production Summit Fiction » un événement de référence
Parmi les autres leviers de croissance de la filière, ont également été identifiés la promotion des atouts et le développement des synergies avec l’écosystème numérique du territoire. Faciliter les mises en relations BtoB entre producteurs, donneurs d’ordres, financeurs, start-up… fait également partie des axes stratégiques, comme à travers le « Production Summit Fiction ». Une deuxième édition est déjà en réflexion pour 2020, avec une ouverture à l’international, notamment aux plateformes digitales. L’ambition est de faire de cet événement, un rendez-vous incontournable et de référence dans le sud de la France.