La vague du podcast a déferlé sur la France ces dernières années, avec un succès exponentiel chez les moins de 35 ans. Ces programmes audio sur internet, aussi variés que créatifs, génèrent aujourd’hui une véritable économie. De nombreuses structures de production ont émergé du côté de la capitale. À Marseille, la Podcast Factory entend bien rentrer dans la danse.
Lauren Bastide, Mehdi Maizi, ou Henry Michel, ces noms ne vous parlent peut-être pas encore. Pourtant, dans la sphère encore discrète du podcast, ces animateurs aux univers très variés conquièrent chaque jour un public plus grand en produisant sur internet une nouvelle forme de programme audio. Certains comparent la nouvelle vague du podcast à l’émergence des radios libres qui a révolutionné le monde de la radio entre 1970 et 1980, ou plus récemment, au boom des youtubeurs.
Alors qu’aux États-Unis, certains podcasts sont plus écoutés que les émissions des grandes radios, les français se tournent également vers l’écoute de ces contenus entièrement créés et diffusés sur le web. De nouveaux médias émergent, labels ou producteurs, et professionnalisent la pratique. Et si ils se concentrent aujourd’hui principalement à Paris, du côté de Marseille, certains entendent également surfer la vague.
Le podcast, futur concurrent de la radio ?
Ce vendredi 22 juin après-midi, le MarsMédialab, lieu dédié aux cultures numériques situé rue Colbert, est en effervescence. Urban Prod, structure hybride entre social et numérique, organise les Mars digital days : débats, rencontres et ateliers autour du monde digital. Le thème du jour, « Jusqu’où ira la vague du Podcast ? » est animé par Joël Ronez, cofondateur et président de Binge Audio, une plateforme de production et de diffusion de podcasts. Après avoir dirigé le pôle web d’Arte, les nouveaux médias à Radio France, et Le Mouv’, il s’est lancé dans l’aventure de cette nouvelle pratique.
« La vague du podcast est en pleine accélération », explique-t-il, « cela fait 20 ans que le phénomène existe, mais de manière plutôt confidentielle, créé par et pour la culture geek. Aujourd’hui, après le succès immense qu’il rencontre aux US, il y a un effet « boule de neige » en France ».
Le terme « podcast »est né en 2004 avec l’invention de l’i-pod, de la contraction de « i-pod » et « broadcast » (diffusion). Et si la production de podcasts « natifs » (produits et diffusés exclusivement sur internet) s’est développée auprès d’un petit cercle d’initiés, les grandes radios s’en sont emparées à partir de 2006 en proposant la réécoute de leurs programmes sur internet.
Aujourd’hui, la production de podcasts natifs connaît un vrai boom auprès des moins de 35 ans. Une dizaine de structures de production professionnelles ou semi-professionnelles ont émergé ces dernières années, en parallèle de créateurs indépendants. Certains ont créé une véritable communauté d’auditeurs et génèrent économie non-négligeable.
Si le financement participatif via des plateformes spécialisées telles que Patreon permet aux créateurs de se financer, les acteurs traditionnels de l’économie des médias s’emparent aujourd’hui du phénomène. « Avec un taux de croissance des écoutes de 50 % par trimestre, les investisseurs et les annonceurs voient aujourd’hui une vraie opportunité. La publicité et les contenus sponsorisés font leur apparition, et nous gagnons aussi de l’argent avec la création de contenus audio pour des groupes privés », détaille Joël Ronez, « sur le premier trimestre 2018, Binge Audio a fait le chiffre d’affaires de l’année précédente ».
Et la boulede neige fait son effet. L’argent généré permet de dénicher des talents pour produire des contenus de qualité. Ils séduisent de plus en plus d’auditeurs, qui séduisent les investisseurs.
Marseille dans la vague
Mais revenons à Marseille, du côté du MarsMédialab. Dans l’assemblée diverse venue écouter Joël Ronez, on aperçoit des visages, dont certains connus, du monde du podcast ou du journalisme. Lauréat du prix Albert Londres 2014, le marseillais Philippe Pujol en fait partie. Car Urban Prod profite de l’événement pour faire la lumière sur la Podcast Factory, un dispositif d’aide à la production de podcasts ouvert à tous. Un appel à projets vient d’être lancé son créateur, Julien Kirsch. « La Podcast Factory propose des moyens techniques et de l’accompagnement professionnel pour toute personne qui souhaite se lancer dans le podcast. Mais nous passons un cap aujourd’hui en devenant aussi un véritable label qui produira bientôt des contenus plus ambitieux ».
La Podcast Factory a déjà lancé cette année le Marseille Champions Podcast. Le « talk-show » au ton très libre, animé par des spécialistes de l’Olympique de Marseille, s’est fait une place auprès des aficionados de l’OM. « La liberté de ton, des contenus plus engagés, revendicatifs et créatifs que dans la radio traditionnelle, l’invention de nouveaux formats, c’est ce qui fait le succès du podcast », explique Joël Ronez.
La présence de Philippe Pujol n’est pas anodine lors de la conférence. Lorsqu’on demande au journaliste le plus médiatique de la cité phocéenne ce qu’il fait ici, il nous répond qu’un projet se met en place avec Urban Prod, en gardant un peu de mystère. « Je voudrais parler de la Corse que l’on connaît moins, en hiver notamment ». On peut imaginer que, comme à son habitude, il n’aura pas peur d’aller fouiller partout pour nous offrir des témoignages rares.
En préambule de #RBLOM, on a enregistré le Marseille Champions Podcast #3 avec mes compères @MouradAerts, @B_Yannis_ et @MrCerise. Ça arrive très bientôt ! pic.twitter.com/HqfDQBnADA
— Comme Elle Vient (@CommeElleVient1) 5 avril 2018
De l’OM à la Corse, la Podcast Factory met les moyens pour déclencher la dynamique du podcast à Marseille et entend peser parmi les structures de production françaises. « Nous sommes à ma connaissance la première à se lancer en province » raconte Julien Kirsch, en citant tout de même l’incontournable label Riviera Ferraille du podcaster grassois Henry Michel, dont les productions humoristiques visent un public plus précis. « Et pourquoi pas fédérer les talents en région ? Au moins dans le grand sud » conclut-il.
Pour démarrer, une « ville monde » telle que Marseille est un terrain de jeu idéal pour les créateurs qui peuvent avec le podcast, offrir un regard neuf et créatif. « On a l’ambition aujourd’hui de faire travailler des auteurs sur de belles productions, capables d’être primées et de rencontrer un plus grand public » explique Julien, « en 2019, La Podcast Factory va commencer à vraiment exister dans le monde du podcast francophone ».
Si vous avez envie de vous lancer dans l’aventure du podcast, répondez à l’appel à projets lancé par la Podcast Factory :