La Ville de Marseille a présenté son plan chiffré à plus d’un million d’euros pour voler au secours de la posidonie. Une plante aquatique menacée, pourtant indispensable à la préservation de la biodiversité sous-marine.

Les scientifiques la surnomment « trésor de la Méditerranée ». Les herbiers de posidonie, plante aquatique endémique des côtes méditerranéennes, jouent un rôle clé dans la préservation de la biodiversité marine, la stabilité du littoral et la lutte contre les impacts du dérèglement climatique.

Ce 11 octobre, l’adjoint municipal en charge de la biodiversité marine Hervé Menchon a dévoilé son « Plan posidonie », adopté par le conseil municipal en décembre 2023. Celui-ci « présente une arborescence de solutions devant des problèmes majeurs du 21e siècle, explique l’élu. Il prend en compte la montée des eaux, l’érosion littérale accrue, et la nécessité de décarboner d’ici 2030 », note-t-il.

Le plan constitue justement « l’un des piliers d’actions menées pour atteindre les objectifs du label 100 villes neutres en carbone en 2030 », dont Marseille est lauréate. Déployé jusqu’en 2028, il dispose d’une enveloppe de 1,175 million d’euros pour étudier l’état actuel des herbiers, les protéger, mais aussi informer le grand public sur leur importance.

La posidonie, « architecte du littoral »

« C’est une véritable architecte du littoral, qui construit elle-même des écosystèmes », appuie Thomas Changeux, biologiste à l’Institut méditerranéen d’océanologie à Luminy. C’est aussi un « puits de carbone » avec une capacité de stockage de CO2 3,5 fois plus importante qu’une forêt tropicale, et un habitat pour de nombreuses espèces sous-marines.

Pourtant, près de 10% des herbiers de posidonie ont été détruits par les pressions humaines au cours du siècle dernier. Dans la rade Sud de Marseille, ils ont été mis à mal « par les rejets d’eaux turbides de l’Huveaune » qui empêchaient leur photosynthèse, comme l’explique le scientifique. Puis « par la construction du port » au Nord.

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Patrick Astruch du GIS Posidonie lors de la présentation du Plan posidonie au Muséum d’histoire naturelle du palais Longchamp.

« Une progression spectaculaire » des champs de posidonie

L’une des mesures phares du plan est la réimplantation artificielle d’herbiers de posidonie au large de Marseille, une expérience connue sous le nom de Reposeed. Après avoir collecté 9 000 graines échouées sur les plages, le GIS Posidonie les a replantées à 25 mètres de profondeur, sur une surface de 165 m².

Depuis leur installation en octobre 2023, « 5% des plants, soit environ 450 plantules, ont survécu et se développent bien », indique Patrick Astruch, ingénieur de recherche de l’association. Un taux modeste, mais très encourageant « par rapport aux observations en milieu naturel. La baie de Marseille a une progression spectaculaire, qui remet en question les connaissances sur les croissances de l’herbier », poursuit le chercheur.

Dès cet hiver, le groupement travaillera à définir des sites capables d’accueillir les transplantations de boutures de posidonie. Ces initiatives s’accompagnent d’un suivi scientifique rigoureux sur de nombreuses années pour évaluer leur efficacité.

En effet, la posidonie est une « championne de la lenteur » selon les mots de Thomas Changeux, avec un rhizome qui pousse en moyenne de 1 à 3 centimètres par an. On ne pourra avoir de résultats que d’ici 5, 10 voire même 20 ou 30 ans ».

Des circuits en réalité augmentée d’ici 2025

« Pendant un certain temps, la ville a détenu le record en termes de surfaces de récifs artificiels » installés dès 2007, rappelle le biologiste. Ses 850 hectares d’Aires marines protégées (AMP), qui intègrent désormais les îles du Frioul en plus des récifs du Prado, font de la rade marseillaise « un laboratoire à ciel ouvert ».

Aujourd’hui, l’une des menaces principales à la posidonie demeure l’ancrage des bateaux qui arrachent leurs racines. D’ici 2028, la Ville, en partenariat avec Parc national des Calanques, annonce ajouter dix bouées d’amarrage supplémentaires à celles installées en 2022.

La Ville souhaite également changer le regard du public sur les « banquettes » de posidonie, essentielles pour contrer l’érosion. Cette matte morte « ne doit plus être évacuée des plages comme un déchet, elle va se dégrader lentement sur notre littoral et donner des nutriments à la biodiversité marine alentour », détaille Hervé Menchon. C’est déjà le cas sur la plage du Prophète (7e) depuis plusieurs mois.

Pour faire découvrir les trésors marins de Marseille, la municipalité va également mettre au point des circuits littoraux en réalité augmentée pour smartphone et tablette. Ils devraient être disponibles à l’horizon 2025.

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