Aux Docks, un atelier-boutique nommé « Canal 16 Lab » recycle les déchets marins en sacs et accessoires design. Les fondateurs du projet aimeraient voir cette filière vertueuse grandir à Marseille.
Sur les rayons, sacs, pochettes et bandanas dévoilent leurs formes originales et leurs couleurs flashy. Dans cet atelier-boutique éphémère, installé aux Docks Village jusqu’à Noël, tous les accessoires ont une même particularité : ils ont été fabriqués à partir de déchets marins recyclés.
Cette initiative tient particulièrement à cœur à Bérangère et Olivier Perret, les fondateurs d’Espigas, la célèbre marque d’espadrilles marseillaise. Ils estiment en effet qu’environ 20 tonnes de déchets liés à la mer pourraient être récupérées à Marseille chaque année.
Si le nom qu’ils ont attribué au projet peut sembler mystérieux, « Canal 16 Lab » ne doit rien au hasard. C’est une référence à la fréquence de détresse utilisée par les navigateurs en haute mer. Un clin d’œil bien choisi pour ce couple marseillais qui rappelle l’urgence de « porter secours à la planète ».
« La matière est obsolète mais comme neuve »
Pour la fondatrice, « la gestion des déchets marins est un vrai sujet ». Et plutôt que de les voir brûlés ou enfouis, elle a décidé avec son mari de leur offrir une seconde vie. « C’est de la matière obsolète qui n’est plus aux normes de sécurité. Mais elle est comme neuve, même si elle a vécu un peu », lance-t-elle en passant sa main sur les différents articles du magasin.
À côté d’elle, derrière une machine, une couturière formée à la Fask Academy est en train de coudre une notice de sécurité d’évacuation des canaux de survie sur une poche. Équipements de plongée, gilets de sauvetage ou encore radeaux de secours se métamorphosent en accessoires imaginés par une designeuse. En plus d’être résistants et imperméables, ils racontent tous une histoire.
« Il y a beaucoup de travail, souligne Bérangère. On récupère la matière, on la stocke, on la découpe. Mais on n’a pas envie en recyclant ces objets de créer une nouvelle masse de déchets. On essaye donc d’utiliser un maximum de matière pour avoir le moins de chutes possibles. Par exemple, sur 80 kilos de radeaux de survie, il ne devrait nous rester qu’un à deux kilos non utilisés ».
Un projet de coopérative à Marseille
Au départ, le couple avait d’abord pensé à recycler des tentes d’une grande enseigne française de sport. « Mais elles devaient être envoyées à Chamonix et il fallait ensuite les acheter pour les ramener ici. Ça n’avait pas de sens écologiquement ». Leur projet s’est donc recentré sur les déchets locaux. Et en particulier sur ceux du Grand port maritime de Marseille, avec qui ils collaborent.
La boutique accueillera ces prochaines semaines des ateliers pour le grand public « pour que les gens comprennent ce qu’est le recyclage ». Les participants seront invités à couper eux-mêmes la matière qui sera ensuite cousue pour fabriquer différents accessoires.
Mais le projet pourrait ne pas s’arrêter là. « Notre objectif à la fin, c’est de monter localement un véritable atelier de production en couture industrielle, poursuit Olivier. Les couturiers formés à Marseille ont parfois du mal à trouver des débouchés alors même que beaucoup de marques, comme Jup’On, ont des besoins ».
Ils espèrent que les pouvoirs publics apporteront leur soutien à la création d’une coopérative afin de poursuivre à grande échelle leur engagement pour une filière textile vertueuse.