À proximité de la gare Saint-Charles, le Centre d’hébergement et de réinsertion sociale pour femmes « Chez Simone », géré par le Groupe SOS, vient d’être inauguré. Doté d’une quarantaine d’appartements équipés, il peut accueillir jusqu’à 62 personnes.
« Je suis très bien ici, j’ai un petit studio, avec un coin cuisine, une salle de bain et un balcon », lance Isabelle, souriante, en pointant du doigt la fenêtre de son studio. À 55 ans, elle fait partie des 62 femmes accueillies au nouveau CHRS (Centre d’hébergement et de réinsertion sociale), officiellement inauguré jeudi 14 mars dans le 3e arrondissement de Marseille.
Géré par le Groupe SOS avec le soutien de la Ville et de l’État, ce « lieu-refuge » offre aux femmes majeures en situation de grande précarité un accueil inconditionnel dans des appartements d’une, deux ou trois places. Ouvert depuis décembre 2023, il a été nommé « Chez Simone » en hommage aux combats de Simone de Beauvoir, Simone Veil et Nina Simone, qui ont toutes les trois vécu dans les Bouches-du-Rhône.
Pour Jean-Marc Borello, président du Groupe SOS, « c’est une migration de l’inhumanité vers l’humanité » par rapport à l’ancien CHRS de Saint-Louis : installé au sein d’une école du 16e arrondissement, ses locaux « fortement dégradés » étaient devenus inadaptés à l’accueil des personnes.
Isabelle a effectué de nombreux allers-retours entre cet établissement et la rue, après avoir perdu son logement. « On avait une douche et les toilettes dehors dans la cour, on était douze, puis huit par chambre, se souvient-elle. Il n’y avait pas d’intimité, aussi bien dans les chambres, que la cour ou dans la cuisine. Ici, quand on veut s’isoler, on rentre dans notre appartement, si on veut voir du monde, on descend… c’est apaisant ».
Un accompagnement global
Si l’ancien site a permis « des beaux parcours de réinsertion », ce déménagement « permet d’offrir des conditions grandement améliorées, se félicite Audrey Garino, adjointe aux affaires sociales, à la solidarité et à la lutte contre la pauvreté.
« Chez Simone a été réfléchi comme un lieu de répit. Nous voulions qu’il y ait une prise en charge globale, précise l’élue. Ce n’est pas juste un lieu où dormir : c’est un lieu où se reconstruire et pour repartir, qui permette à chacune d’être protégée et accompagnée pour pouvoir se projeter dans un avenir meilleur, puis dans un parcours de réinsertion professionnelle ».
Au-delà d’un hébergement de jour et de nuit, le lieu propose aussi à chaque femme un accompagnement médical, social et professionnel de la part des travailleurs sociaux du Groupe SOS. À leur arrivée, chacune reçoit des denrées alimentaires et un kit d’hygiène. Le site dispose également d’un patio, d’un espace de détente et une buanderie.
Le Groupe SOS Solidarités gère un millier de places d’hébergement d’urgence à Marseille, dont 329 sur le site de La Minoterie, ouvert en avril dernier dans le 15e arrondissement.
Les femmes plus touchées par la pauvreté
À terme, la municipalité a pour objectif la création de 1 000 places. Sur les 350 places supplémentaires créées depuis trois ans, « 80% ont été dédiées aux femmes et aux familles, souligne Audrey Garino. Parce que la réalité du terrain est que la précarité des femmes a tendance à fortement augmenter ces dernières années ».
« Le sujet se pose statistiquement sous nos yeux : le taux de pauvreté des femmes est de 28,9% dans le département*, un peu moins que la moyenne nationale, mais le double par rapport aux hommes, pointe Michaël Sibilleau, préfet délégué pour l’égalité des chances présent lors de l’inauguration.
Cette précarité rencontre un autre problème, celui de la « pénurie de logement, notamment dans le logement social, dont la demande s’accroît et dont l’offre a été ralentie ces dernières années », ajoute le préfet.
« Ici, je revis »
« Des lieux comme celui-ci, il faut en ouvrir beaucoup plus », concède Audrey Garino. La municipalité investit 370 000 euros par an pour le fonctionnement de ce site. Car si l’hébergement d’urgence est une compétence de l’État, la Ville de Marseille a fait le choix de doubler le budget à cet effet, qui s’élève désormais à 3,5 millions d’euros.
« Nous menons un travail très conséquent de recensement de notre patrimoine vacant pour créer d’autres lieux, poursuit l’élue. En revanche, ce n’est pas tout de créer des places. Notre enjeu est surtout d’améliorer les conditions de vie, qui rendent possibles, derrière, un accompagnement social ».
Un cadre nécessaire pour reprendre pied. Après s’être retrouvée à la rue pendant 11 mois suite à sa séparation avec son conjoint violent, Nadia** a été orientée au CHRS par le 115 et y est hébergée depuis deux ans. « J’étais tombée très bas, je n’avais plus la force d’avancer ».
« J’ai un petit balcon où je fais pousser des plants de menthe, j’invite des amies à manger le soir… J’ai galéré, mais c’est derrière moi. Je peux enfin me poser, être soignée et accompagnée. Ici, je revis », conclut-elle.
* Chiffres Insee.
** Le prénom a été modifié.