Dans le 14e arrondissement de Marseille, une nouvelle épicerie sociale et solidaire, portée par le centre social du Grand Canet, offre à ses bénéficiaires l’accès à des produits de qualité pour 10 à 30% de leur valeur marchande.
Des clémentines de Corse à 75 centimes le kilo. Un paquet de café à 35 centimes. Douze rouleaux de papier toilette pour 86 centimes. Comme des centaines d’autres, ces articles sont vendus à prix cassés dans la nouvelle Échoppe solidaire gérée par le centre social du Grand Canet, qui a ouvert ses portes au 43 du boulevard Larousse (14e), pour lutter contre la précarité alimentaire.
Dans un quartier où près de la moitié des habitants vit sous le seuil de pauvreté, l’épicerie permet à des familles en difficulté financière de faire leurs courses avec des produits alimentaires et d’hygiène de qualité pour 10 à 30% de leur valeur en grandes surfaces.
Le projet a abouti après deux ans de coordination entre le centre social du grand Canet, la Ville de Marseille, et son bailleur social, Marseille Habitat, qui met à disposition le local remis à neuf pour l’épicerie. « Cette épicerie sociale correspond parfaitement aux besoins du quartier », s’est félicitée Audrey Gatian, présidente de Marseille Habitat et adjointe au maire en charge de la politique de la ville et des mobilités, lors de l’inauguration le 25 janvier.
Le bailleur social, qui possède 298 logements répartis sur 9 immeubles dans l’arrondissement, « a à cœur de revitaliser ce point de vie de quartier en pied d’immeuble ». L’épicerie est située sur une placette qui regroupe plusieurs commerces de proximité, dont une boulangerie, une pizzeria et une rôtisserie.
Une aide ponctuelle
« On a pris conscience de cette problématique de précarité alimentaire pendant le Covid, explique Véronique Magot, directrice du centre social du grand Canet. Aujourd’hui, on a beaucoup d’adolescents qui arrivent affamés quand ils viennent faire leurs devoirs à 16h30. On sent bien qu’il y a un problème ».
Cependant, « tous les habitants ne peuvent pas venir y faire leurs courses ». En tant que membre du réseau Andes du Groupe SOS, qui regroupe 550 épiceries solidaires en France, l’Échoppe accueille uniquement des clients bénéficiaires, orientés par les travailleurs sociaux de la CAF, du Centre communal d’action sociale, des Maisons de la solidarité ou des bailleurs sociaux.
Sur place, ils sont accompagnés par la coordinatrice de l’épicerie, employée du centre social, Aïssatou Camara. Les adhérents « doivent répondre à trois critères : habiter dans le 14e arrondissement, avoir un reste à vivre complet entre 5 et 12 euros par personne et par jour, et un projet personnel finançable sur six mois », explique cette dernière.
Les économies réalisées à l’épicerie doivent être « mise au service de ce projet, défini en amont avec leur conseiller : partir en vacances, réparer le lave-vaisselle, rembourser une dette locative, précise Véronique Magot. Ce n’est pas de l’aide d’urgence, mais une aide ponctuelle. Ça permet aux gens de faire des économies, sur un temps donné, sur le poste alimentation, qui est de plus en plus important avec l’inflation ».
Une offre alimentaire saine et diversifiée
Une fois par mois, aidée par une stagiaire, Aïssatou Camara part récupérer les produits alimentaires à l’antenne marseillaise de la Banque alimentaire située à la Pomme (11e).
Fruits, légumes, surgelés, boîtes de conserve… L’épicerie solidaire propose une offre alimentaire diversifiée, qui permet l’accès à des fruits et légumes frais fournis par la Banque alimentaire et la Banaste de Marianne, chantier d’insertion qui lutte contre le gaspillage alimentaire en revalorisant les invendus des professionnels de la filière fruits. « La première journée d’ouverture, les clients ont fait razzia », témoigne la conseillère.
Les bénéficiaires peuvent aussi s’approvisionner en produits non-alimentaires, également issus d’invendus, livrés directement par l’association Dons solidaires. Des produits hygiéniques féminins pour lutter contre la précarité menstruelle, du linge, des cosmétiques, vêtements, produits de nettoyage, fournitures scolaires… « La lessive et les articles de puériculture, très chers en magasin, sont ce qu’il y a de plus demandé », indique Chrystel Tertzaguian-Orsini, responsable de l’antenne régionale de l’association.
Accompagnement social
Tous les trois mois, une commission d’attribution se réunit pour sélectionner les dossiers pouvant entrer dans le dispositif. Les bénéficiaires s’engagent pour une période de six mois, renouvelable jusqu’à un an. Néanmoins, le centre social n’a pas la capacité de prescripteur, qui est le rôle des travailleurs sociaux.
« On a fait ce choix pour être plus en retrait, sinon, on ne s’en sortirait plus, admet Aïssatou Camara. Les besoins sont tels que l’on aurait du mal à sélectionner les familles ». La conseillère en économie sociale et familiale redirige les personnes non-bénéficiaires vers d’autres associations du quartier, comme le restaurant solidaire l’Après-M.
Ouverte tous les jeudis de 14h à 17h, l’épicerie accueille pour le moment huit familles, dont une étudiante. L’objectif étant de pouvoir aider 30 familles cette année, et d’atteindre 60 adhérents au plus long terme.
Par le biais de cette épicerie, le centre social espère créer du lien avec les habitants en difficulté. « Ce n’est pas que pour faire ses courses, il y a tout un travail d’accompagnement des bénéficiaires, reprend la directrice. C’est aussi une formidable porte d’entrée pour permettre aux personnes, qui sont souvent isolées et engluées dans leurs problématiques, de comprendre qu’il y a plein d’activités dans le centre social auxquelles elles peuvent participer ».