Face au phénomène d’érosion du littoral, la Ville de Marseille doit recharger en sable certaines plages du Prado. D’autres pistes sont également à l’étude pour les protéger du recul du trait de côte.
Principal espace balnéaire de Marseille, les plages du Prado ont été aménagées dans les années 1970 avec les gravats de la construction du métro, transformant profondément la morphologie originelle du littoral. Aujourd’hui, elles se retrouvent confrontées à l’érosion.
Afin de poursuivre l’exploitation de ces plages qui sont prises d’assaut chaque été par les Marseillais et les touristes, la municipalité est contrainte de « les entretenir annuellement ». Dans le cadre d’une enquête publique ouverte jusqu’au 6 février, la Ville explique devoir « maintenir un volume sédimentaire minimal ». Pour ce faire, elle envisage un « rechargement annuel des plages avant la saison balnéaire ». Une opération qui s’inscrit dans le cadre du Plan guide Littoral sud voté au conseil municipal en octobre 2023.
« Un réensablement mais pas avec n’importe quoi »
Le sable utilisé pour « recharger » le littoral pourrait être récupéré dans la mer, et notamment dans les ports où les sédiments s’accumulent. Une perspective qui interroge l’association des Nageurs du Prado. Constitué dès la création du parc balnéaire, le collectif, qui veut « défendre la plage et l’accès à l’eau dans de bonnes conditions », s’inquiète du projet présenté.
« On souhaite un réensablement mais pas avec n’importe quoi, nous confie le porte-parole de l’association, Sylvain Ronca, qui se dit opposé à l’utilisation de « la vase des ports, pour la santé des baigneurs mais aussi pour la biodiversité marine ». Il pointe notamment du doigt les sédiments qui pourraient être issus des dragages d’entretien de la base nautique du Roucas Blanc.
Face à ces inquiétudes, l’adjoint au maire en charge de l’aménagement du littoral, Hervé Menchon, tente de rassurer. « Les analyses effectuées sont très encadrées », soutient l’élu EELV.
Une solution « plus écologique »
Si le substrat récupéré au niveau de la marina olympique n’est pas parvenu à passer le test environnemental, l’adjoint se dit néanmoins confiant sur la possibilité d’utiliser des sédiments marins.
« Les ports s’engagent désormais dans l’obtention de la certification Ports Propres, il y a beaucoup moins d’hydrocarbures qui se déposent au fond de l’eau. Et nous avons des tonnes de sable qui s’accumulent dans la mer, du côté de Malmousque par exemple, poursuit-il. Ce sont presque des plages qui se forment sous l’eau, avec du sable sain et un bon grain. Pourquoi le jeter ? Ce serait comme se débarrasser d’épluchures alors qu’on peut les utiliser pour faire du compost ».
Une solution qu’il juge en tout cas « plus écologique » que l’utilisation du sable issue des carrières où « on casse des cailloux pour les transporter ensuite en camion. L’impact environnemental est beaucoup plus important ».
Le millefeuille de posidonie pour ralentir l’érosion
L’élu écologiste ne souhaite pas pour autant faire du réensablement annuel une opération « systématique ». Il y voit même « un gaspillage d’argent public. On sait que les plages vont avoir tendance à se rétrécir. Il faut vivre avec cette évolution naturelle. On interviendra uniquement là où c’est indispensable ».
La Ville de Marseille pourrait agir prioritairement sur la plage de Bonneveine, face à l’Escale Borély, où commencent à réapparaître des blocs de pierre et des gravats. « Nous allons devoir rajouter du sédiment fin », annonce Hervé Menchon, qui mise également sur la restauration annuelle des digues et leur élévation de 50 centimètres afin de faire face aux « vagues impressionnantes ».
Parallèlement, dans le cadre de l’appel à projets porté par la Direction Interrégionale de la Mer Méditerranée et la Région sud, une expérimentation de la technique dite du « millefeuille de posidonie » sera entreprise sur les plages de Bonneveine et Borély de 2024 à 2026.
Elle consiste à étaler les feuilles de posidonie sur la plage et de les recouvrir de sable en couches successives. « Au lieu de bloquer l’eau, la posidonie la laisse passer, argumente l’élu écologiste. Et comme il n’y a pas d’effet rebond, il y a moins de sédiments qui sont emportés ». Un suivi scientifique permettra d’attester l’efficacité de cette technique face à l’érosion.