Pour anticiper la hausse des besoins électriques, le réseau de transport d’électricité (RTE) doit se moderniser et se renforcer. Une ligne aérienne de 400 000 volts se dessine entre Fos-sur-Mer (13) et Jonquières-Saint-Vincent (30) pour décarboner les usages et l’industrie.

Le réseau de transport d’électricité (RTE) a connu trois vagues d’évolution depuis 1945. Reconstruit après la seconde guerre mondiale, le réseau français s’est renforcé dans les années 80 en construisant de « grandes autoroutes » électriques. Ces lignes, qui acheminent l’électricité produite dans les centrales nucléaires vers les points de consommation, doivent être renforcées et dupliquées… car le réseau rentre dans une nouvelle dimension.

En France, les besoins prévisionnels en électricité d’ici 2030 sont colossaux. Notre région prévoit également de doubler sa consommation électrique notamment pour alimenter la zone industrielle de Fos. RTE Méditerranée travaille ainsi sur la création d’une nouvelle ligne aérienne de 400 000 volts, reliant Fos-sur-Mer (13) et Jonquières-Saint-Vincent dans le Gard (30).

Si le tracé de cette future ligne de 63 km n’est pas défini, l’Etat a validé le 16 novembre une aire de 615km² pour encadrer le projet. Une première étape avant la concertation publique lancée début 2024.

L’ambition du réseau est d’achever cet ouvrage en 2028 pour permettre de décarboner les usages et l’industrie. Entretien avec Christophe Berassen, le directeur du développement ingénierie Marseille chez RTE.

RTE, Pourquoi « les besoins électriques de la région vont doubler d’ici 2030 » selon RTE ?, Made in Marseille
Portrait de Christophe Berassen (Crédit : RTE Méditerranée)

Made in Marseille : Comment notre réseau électrique est-il actuellement structuré ?

Christophe Berassen : Notre problématique c’est que 60% de notre consommation d’électricité est produite en dehors de la région. C’est structurel car l’électricité est principalement produite dans la Vallée du Rhône. Nous l’acheminons via deux colonnes vertébrales électriques, des lignes de 400 000 volts, qui viennent irriguer Aix-Marseille et Toulon-Nice. C’est la plus haute puissance à laquelle l’électricité est transportée depuis les lieux de production jusqu’aux lieux de consommation.

Pourquoi une 3e ligne est-elle nécessaire sur notre territoire ?

En France, les objectifs sont très ambitieux puisque nous devons réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Concernant les industriels, leur objectif est d’abaisser de 35% leurs émissions d’ici sept ans. C’est une grande bascule car 60% de notre énergie en France est à base d’énergies fossiles comme le gaz, pétrole, charbon. La décarbonation va donc passer par une électrification de nos usages.

La décarbonation passe-t-elle obligatoirement par l’électrification ?

La réduction des énergies fossiles va se matérialiser par une augmentation de 30% des besoins électriques d’ici 2035. Notre rôle chez RTE est d’accompagner cet objectif fixé par la stratégie énergie climat de l’Etat. Or, nous devons adapter notre infrastructure puisque notre réseau, construit dans les années 70-80, n’est plus adapté pour répondre à ces besoins considérables. Dans le Sud-Est, c’est encore plus important. Nous estimons que la consommation électrique va doubler d’ici 2030. On estime que nous allons consommer entre 5000 et 6000 mégawatts supplémentaires. Soit l’équivalent de la consommation de près de 5 millions d’habitants.

Ce doublement est la conséquence de l’implantation des gros projets industriels comme GravitHy ou H2V sur Fos ?

L’ensemble de la région se décarbone. A Marseille, il y a l’électrification des navires à quai par exemple et aussi les habitants qui progressivement se tournent vers des véhicules électrique, changent leurs modes de chauffages. A Fos-sur-Mer, la deuxième zone la plus émettrice de gaz à effet de serre après Dunkerque, il y a en effet des projets qui se préparent. L’industrie s’est engagée dans un vaste programme de décarbonation dans des délais courts. Décarboner c’est aussi maintenir l’activité industrielle et économique sur la zone… 40 000 emplois directs et indirects sont concernés.

Pourquoi RTE va faire une ligne aérienne plutôt qu’une ligne souterraine ?

RTE se charge du réseau haute et très haute tension : les lignes 63 000, 90 000, 225 000 et 400 000 volts. Pour une ligne à 400 000 volts d’une telle distance, on ne peut pas mettre les câbles sous la terre. On doit mettre en place une liaison aérienne avec des câbles suspendus sur des pylônes pour acheminer de l’électricité d’un point A à un point B. Ces lignes sont plutôt installées dans des zones périurbaines, voire rurales.

Comment définir le tracé ?

Nous avons rencontré 150 personnes depuis mars 2023 pour définir une aire l’étude. Le 16 novembre dernier, l’Etat a validé ce périmètre d’action. C’est un premier jalon. Mais la zone fait 615km² 50km de long et 15 km de large. Ce qui est très large. Nous devons donc l’affiner. On va prendre notre bâton de pèlerin pour travailler sur le fuseau de moindre impact, pour ensuite définir le tracé. La démarche est coconstruire avec le territoire car nous devons trouver la meilleure intégration dans l’environnement et le paysage.

Quel est le calendrier que RTE s’est fixé ensuite ?

Nous démarrons la concertation publique au premier trimestre 2024. La validation du fuseau de moindre impact devrait être validée avant été 2024 de façon à achever la ligne pour 2028.

Par qui les travaux sont-ils financés ?

La ligne électrique est prise en charge à moitié par les clients industriels. L’autre moitié est financée par RTE, via  le tarif d’utilisation des réseaux de transport que chacun peut voir sa facture d’électricité. Il faut savoir que tous nos investissements sont validés par la commission de régulation de l’énergie (Cré).

 

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