Pilier de l’équipe féminine de l’Olympique de Marseille, l’Américaine Ashley Clark est tombée amoureuse du maillot bleu et blanc comme de la ville. Elle revient sur une saison difficile mais encourageante et raconte sa vie sous le soleil de Provence.

Vingt-deux janvier 2023. L’équipe féminine de l’OM se déplace à Saint-Étienne pour un match décisif face à leurs seules véritables concurrentes. Les deux formations marchent sur leur groupe de seconde division de football, avec dix matchs sans défaite et des scores fleuves. Cette dernière rencontre de la phase aller est brûlante, malgré le froid stéphanois.

En jeu, la première place du championnat, la seule permettant d’accéder en division 1. Les vainqueures prendront un ascendant comptable et psychologique pour la suite du championnat. Les Bleues et Blanches entament parfaitement la rencontre et mènent 0 – 2 à la 30e minute. Mais, dans une ambiance électrique, la partie leur échappe. Les Vertes renversent le match et l’emportent 3 – 2 dans les derniers instants.

Elles s’installent en tête du championnat, avec 5 points d’avance. Pas de quoi enterrer définitivement les espoirs de montée, mais la défaite laisse des traces. Avant un second coup dur : sur la pelouse d’Yzeure, en février, la capitaine emblématique de l’équipe, Ashley Clark, subit un violent tacle. La cheville devra être opérée, et “Ash” ne jouera plus cette saison.

Ashley Clark, Interview | Ashley Clark, coup de foudre avec l’Olympique et Marseille, Made in Marseille
Ashley Clark durant la saison 2022-2023

Yes we can

Arrivée en 2021, l’Américaine est devenue une pièce maîtresse de l’équipe. Dans un groupe très jeune (23 ans de moyenne) et très local (la moitié des joueuses sont marseillaises), la quasi-trentenaire assure la cohésion. Elle donne le ton par sa combativité, l’exemple par son expérience, et les victoires par ses buts (12 en 13 matchs).

À l’OM Campus, où s’entraîne l’équipe, pas de langue de bois : « Depuis sa blessure, c’est différent sur le terrain », confie le directeur sportif des féminines, Alban Sanchez. Il se remémore le mois d’avril « compliqué », avec deux défaites consécutives, anéantissant les chances de montée en D1. C’est pourtant l’objectif principal de l’Olympique de Marseille, un des seuls grands clubs français dont les filles ne jouent pas dans l’élite.

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Entrainement à l’OM Campus

Mais depuis 2021, la section féminine a connu une petite révolution. Nouveau staff, nouvel entraîneur, et nouvelle équipe, axée sur la jeunesse et les talents du territoire. Des ambitions sportives soutenues par un nouveau modèle économique basé sur le partenariat avec des entreprises locales.

Pour la saison à venir, que tout le monde espère la dernière en D2, l’effectif évolue et se renforce. Mais Miss Clark restera au centre de la partie. « L’année prochaine, on monte ! », promet-elle. Rencontre en tongs et décontraction avec la plus marseillaise des Américaines, dans son spot préféré de la ville, Prado Beach.


L’INTERVIEW

Comment as-tu vécu la dernière saison ?

C’était un ascenseur. On a commencé au top, personnellement je mettais un but par match. Puis j’ai pris ce tacle très moche, j’ai tout de suite su que ma saison était finie. Juste après, la montée en D1 s’est envolée, c’était une période très dure mentalement. Maintenant, je regarde en arrière et on peut être fières. L’année d’avant, on descendait presque en D3. Là, on a fini 2e de D2. La saison prochaine, on sera championnes !

On vante beaucoup tes qualités. Mais toi, comment tu te vois ?

Je ne suis pas une joueuse exceptionnelle et je ne serai jamais la meilleure joueuse du monde. Mais je donne tout, tout le temps. Je donne aussi beaucoup au groupe. Si tu me dis “Ashley, va en goal”, j’y vais à fond ! (Rires.) Je transmets cette énergie aux filles et ça me donne un bon leadership dans le groupe. Je travaille aussi beaucoup en dehors des entraînements, mais discrètement, sinon Alex (le préparateur physique) n’est pas content. J’arrive même à fatiguer ma femme qui est professeure de crossfit et championne du monde de skate !

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« Ash » en plein rééducation après sa blessure

Comment es-tu tombée dans le football ?

J’avais 4 ans, j’étais en voiture avec ma grandmère. J’ai vu des petites jouer, j’ai demandé “elles font quoi ?”. Elle m’a répondu “du foot”. Alors j’ai dit “je veux faire ça dans la vie”.

J’adore quand une petite fille me dit “moi aussi je veux être footballeuse professionnelle”Ashley Clark

Tu vis donc ton rêve de gosse…

Oui, c’est incroyable. Et je veux transmettre cette envie. C’est pour ça que j’entraîne les moins de 15 ans de l’OM et que je passe mon diplôme d’entraîneuse (BMF). J’adore quand une petite fille me dit “moi aussi je veux être footballeuse professionnelle”. D’ailleurs, j’ai transmis ce rêve à ma petite sœur de 20 ans. Peut-être qu’on jouera ensemble un jour !

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Little Ashley chausse les crampons

Après les frères Ayew à l’OM, les sœurs Clark ?

Ce serait fou ! Mais plus sérieusement, le foot féminin évolue enfin en France. Les infrastructures, les moyens, les mentalités… Il y a de plus en plus de petites qui jouent et de parents qui les poussent. Notre rôle est d’accompagner la future génération. Leur dire que c’est possible, avec du travail et de l’investissement. Et plus tard, j’en profiterai en entraînant des supers joueuses !

Quelle est ta relation avec l’OM ?

Honnêtement, je ne connaissais pas vraiment les clubs français avant. L’OM m’a contacté en 2021 quand j’étais au Havre. J’ai dit oui, surtout pour le soleil. Mais je ne m’attendais pas à ça ! L’ambiance m’a complètement attrapée. Déjà, le Vélodrome, c’est fou, je n’avais jamais vu ça. Tout le monde porte les couleurs du club, toute la ville est en mode “OM ! OM ! OM !”. C’est difficile de ne pas dire : “Ok ! Moi aussi ! Ashley Clark, Interview | Ashley Clark, coup de foudre avec l’Olympique et Marseille, Made in Marseille

Et avec la ville ?

J’ai grandi en Caroline du Nord, entre Charlotte et Wilmington, entre ville, mer et montagne. Ici, il y a tout en condensé. J’aime bronzer à la plage, me balader dans les calanques ou faire du shopping aux Terrasses du Port. Même si en ce moment, côté mode… c’est surtout survêtement de l’OM et Crocs aux pieds ! (Rires.) J’aime aussi le fait de rencontrer des gens différents tout le temps. D’Afrique noire, d’Algérie, ou des étudiants de Luminy… Toutes ces cultures ensemble, c’est vraiment le cœur de la ville pour moi.

Il y a bien un truc qui t’énerve ici tout de même ?

Oui, les bouchons ! C’est quoi ça ? Faire 3 kilomètres en 30 minutes ! Heureusement, je me déplace beaucoup en vélo, je peux filer !

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Ashley grave sa vie sur sa peau. Les empreintes digitales de ses parents, la carte du monde qu‘elle aime tant parcourir, l’union avec sa femme… et les hommages aux disparus. “Lion strong” (forte comme un lion) pour cette petite fille décédée d’une tumeur, ou “Fighter” (battant) pour son beau-père emporté par le cancer. “Ils me donnent la force de me battre et l’envie de profiter de la vie”, affirme-t-elle.

Qu’est-ce qui te surprend le plus culturellement ?

Les grèves ! C’est vraiment une culture chez vous ! Il y a eu trois mois de grève cette année, c’est énorme ! Et ça marche parfois, pour gagner des choses. Chez moi, on travaille tout le temps et si t’as un souci… tu travailles quand même. Et après les grèves, il y a eu les jours fériés, au mois de mai. J’ai dit à ma mère “ça va, c’est cool, j’ai 4 jours OFF”, elle m’a répondu : “Mais c’est pas possible !” (Rires.)

Tu restes encore parmi nous ?

Oui, au moins la saison prochaine. Et on verra pour la suite avec le club. Mais je retournerai dans mon pays un jour, pour me ressourcer un peu. Pourquoi pas revenir après. We’ll see…

3 questions droit au but

Ton surnom dans l’équipe ?
On m’appelle “Ash” ou “Capi”, pour capitaine.

Y’a quoi dans tes écouteurs ?
Il y a du JUL bien sûr ! Sinon, pour me motiver, j’écoute Stronger de Sam Feldt feat Kesha. Pour danser, je mets Lola de RK ou Wild Things d’Alessia Cara.

Tes expressions locales favorites ?
“Tarpin bien !”, que je dis beaucoup. Et bien sûr “C’est Marseille BB !”

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