À l’avant-veille du conseil municipal, l’opposition de droite « Une volonté pour Marseille » pointe du doigt le mode de gouvernance de la majorité municipale.

« Amateurisme », « dénigrement », « incohérence », « duperie », « petits arrangements entre amis »… les mots ne manquent pas aux élus du groupe « Une volonté pour Marseille » (UVPM) pour dénoncer leur quotidien dans l’opposition municipale.

À deux jours de se réunir une nouvelle fois dans l’hémicycle marseillais, Catherine Pila, présidente (LR) du groupe, Sylvain Souvestre, conseiller municipal et maire (LR) des 11-12e et Pierre Robin, conseiller municipal [Photo de Une] sont venus expliquer à la presse le « mépris affiché », disent-ils, par la majorité, exemples à l’appui. « Tous ceux qui sont en contradiction avec la parole municipale sont maltraités », estime Pierre Robin.

Le président de la commission des finances de la Ville est fréquemment chahuté lors de ses prises de paroles, souvent incisives. Le groupe n’a d’ailleurs pas digéré un épisode survenu lors de la précédente séance, écourtée en raison des violences urbaines. « Les élus de la majorité se lèvent, font passer une cafetière, prennent le café », raconte Catherine Pila, observant un « manque de respect ».

« On entend de vives critiques sur la gestion des mandats précédents, de l’équipe Gaudin, qu’on devrait sans cesse s’excuser… mais il y un décalage total entre les annonces qui peuvent être faites par la majorité municipale, la com’ et les drames qui peuvent se nouer au quotidien », poursuit l’élue, tout en se défendant de faire une réunion de mi-mandat « car le temps viendra », tambour battant à la rentrée, semble-t-il.

Entre procédures et débats démocratiques

Depuis la démission de Mathilde Chaboche, adjointe à l’urbanisme, dont on se serait « débarrassé parce qu’elle a osé dire non », prétend Sylvain Souvestre, les élus d’opposition notent des dissonances plus affirmées au sein de la majorité de la gauche plurielle. « Tout simplement parce qu’aujourd’hui des élus qui ne nous parlaient pas viennent nous parler du traitement dont ils sont victimes, peu de dialogue, pas de concertation, les élus apprennent au dernier moment des décisions impactantes pour la majorité. Ils se sentent tellement dénigrés qu’ils viennent nous le dire. Et ça, c’est quelque chose de nouveau », confie Catherine Pila, sans vouloir révéler précisément la teneur des discussions.

Le trio dénonce le manque de concertation d’une équipe qui a fait de l’un de ses piliers une “ville plus démocratique”. « On n’est mis au courant de rien, poursuit Sylvain Souvestre. On est à l’opposé de ce qu’ils ont annoncé lors de la campagne, la concertation, l’écoute… On a des élus qui ne supportent pas l’opposition », poursuit le maire de secteur, s’estimant oublié dans son secteur. Lui qui défendait par le passé la construction d’un hôpital privé à la place d’un collège sur la friche Louis-Armand prône aujourd’hui sa construction, aux côtés de la présidente (DVD) du département, Martine Vassal.

Il évoque, par ailleurs, pas moins de 127 courriers adressés à la Ville « avec des propositions ». Tous restés lettre morte. « On est aussi procédurier parce que le débat démocratique n’a pas lieu en amont », justifie Pierre Robin, qui avait fait annuler la hausse de la taxe foncière par le tribunal administratif le 14 avril dernier, donnant lieu à une nouvelle délibération vendredi 31 juin.

La campagne des municipales en arrière-plan

S’ils se défendent de « faire de la politique », le contexte actuel en est autrement, car la droite marseillaise a donné le coup d’envoi de la campagne des municipales. Depuis le mois de mars, Renaud Muselier, président (Renaissance) de la Région Sud, s’emploie à construire une large coalition de droite et du centre pour ravir les clés de la ville à Benoît Payan en 2026, grâce à la « méthode Muselier ».

« On avait besoin de se parler, on s’est parlé, et la famille est réunie pour faire en sorte que les valeurs qui sont les nôtres ne soient pas bafouées et qu’avec les leviers qui sont ceux du Département, de la Métropole et de la Région, la ville puisse être aidée, bien évidemment, mais pas aidée à décliner, ajoute Catherine Pila. Martine Vassal et Renaud Muselier sont d’accords pour aider la ville de Marseille, mais ils ne le feront pas à n’importe quel prix, ils veulent être associés à ce qui est fait, en amont et sur le moment. Et ils le dénoncent par nos voix et la situation crispe le maire de Marseille ».

Pourtant, hormis les engagements précédents, depuis trois ans, aucune autorisation de programme n’a été validée et signée entre la Ville et les deux collectivités. Pour l’opposition, les propositions ont été faites, comme sur le déploiement des caméras de vidéo-surveillance avec une aide de la Métropole d’un million d’euros, mais restent sans réponse. « Il faut qu’il y ait un dialogue pour déterminer quels sont les objectifs communs : la sécurité peut en être un, l’éducation… des sujets peuvent faire consensus », dit Sylvain Souvestre, qui déplore également qu’aucune de ses écoles ne figure dans le plan de rénovation de Marseille en grand.

Pour Benoît Payan, dire vouloir travailler pour l’intérêt des Marseillais et engager une bataille électorale trois ans avant, « c’est schizophrénique et contradictoire, exprimait-il, lors d’une rencontre avec la presse, avant la venue d’Emmanuel Macron. On ne peut pas travailler avec quelqu’un dont le seul objectif est de vous détraquer pour les élections municipales ».

« Petits jeux politiciens »

« L’amateur, c’est celui qui aime, donc on aime Marseille, c’est un compliment qu’ils nous font », ironise Joël Canicave, président du groupe Printemps marseillais. Il n’y a jamais eu autant de débats dans les conseils municipaux, autant de temps de parole donné à l’opposition. Jean-Claude Gaudin était beaucoup plus strict sur les temps de parole que ne l’est Benoît Payan qui laisse parler tout le monde et tout le temps, défend-t-il. Je crois qu’ils ne sont pas trop à se plaindre de ce côté-là. Après du brouhaha dans un hémicycle, je veux bien qu’on s’en étonne, mais ils en font aussi ».

Pour l’adjoint aux finances, ces critiques relèvent de « petits jeux politiciens ». « Je crois qu’il n’y a pas un seul maire qui peut dire qu’il n’est pas associé au projet de son secteur. C’est nous qui tranchons à la fin, peut-être que certains projets ne plaisent pas à tous les maires de secteur, mais c’est la vie politique. On n’a jamais rien fait de manière masqué…».

Quant aux propositions et courriers restés sans réponse, il s’en étonne. « Quand on n’a pas de projets à proposer, on fait de la politique politicienne. Jusqu’ici, je n’ai pas souvent entendu de propositions de projets. Qu’ils les expriment au conseil municipal ». L’opposition est prête à battre le fer…

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