Alors que la crise énergétique et le conflit en Ukraine mettent au jour l’impérieuse nécessité d’assurer notre indépendance alimentaire, le Département des Bouches-du-Rhône et la Métropole Aix-Marseille-Provence ont décidé renforcer la souveraineté du territoire avec un plan de 10 actions concrètes.
Avec une surface de 145 000 hectares de terres cultivées, les Bouches-du-Rhône sont le premier producteur de fruits et légumes en France. Pourtant, 90 % des productions locales sont vendues et consommées à l’extérieur du territoire, tandis que 90 % de la consommation est importée. Un paradoxe sur lequel Martine Vassal, Présidente du Conseil départemental et de la Métropole entend agir grâce à un plan pour la souveraineté alimentaire du territoire qui vient renforcer les mesures déjà développées par les deux collectivités.
Un plan de souveraineté alimentaire pour aider les agriculteurs
Dix actions concrètes pour permettre au territoire de retrouver une certaine capacité nourricière ont ainsi été présentées par le Département et la Métropole le 17 mai dernier :
-L’ouverture d’un à deux nouveaux magasins de producteurs ou points de vente par an sur le territoire métropolitain et départemental. A l’instar des halles de la Barrasse ouvertes en mars 2021 à Plan-de-Campagne, la Métropole a pour projet de créer de nouvelles halles de Terre de Provence, notamment un marché à La Ciotat, ainsi que de nouveaux points de ventes sur des lieux de mobilité multimodaux comme au quai de la Jonquière à Martigues ou au parking-relais Krypton à Aix ;
-L’installation de « corners » de fruits et légumes locaux dans les grandes surfaces ;
-L’augmentation de la part de produits alimentaires bio et locaux de 10 % par an dans la restauration scolaire, mais aussi la réduction des déchets alimentaires et de l’utilisation d’emballages plastiques ;
-L’accompagnement de plateformes de mise en relation entre acheteurs des Bouches-du-Rhône et fournisseurs locaux comme « Agrilocal 13 », pour accroître la massification des produits agricoles locaux, et augmenter de 10 à 15 % par an les livraisons de fruits et légumes locaux aux écoles et collèges ;
-L’aide à l’installation d’une « légumerie » par an pour la commercialisation des fruits et légumes locaux conservés hors saison, et la transformation culinaire des produits impropres à la vente, comme cela se fait déjà au MIN des Arnavaux avec une légumerie solidaire. Des projets sont en réflexion à Fos ou à Miramas ;
-La préservation des terres agricoles dans les documents de planification et de programmation ;
-La création de deux zones agricoles protégées ;
-L’aide à l’acquisition de foncier « agricolable » par les communes ou les exploitants-propriétaires pour l’installation d’agriculteurs ou le développement d’activités agricoles jusqu’à 30 hectares par an ;
-L’accompagnement des communes pour la remise en culture des terres en friche ;
-L’accompagnement à l’installation d’agriculteurs avec un objectif d’une superficie de 10 hectares par an.
Ces dix mesures viendront renforcer les actions déjà déployées par le Département et la Métropole en faveur du développement et de la commercialisation de produits locaux notamment dans les grandes villes.
Développer l’agriculture urbaine, un enjeu majeur
Pour encourager la production et la vente de produits en circuits courts en ville, la Métropole a dédié un volet de son Projet Alimentaire Territorial (PAT) à l’agriculture urbaine dès 2019.
Aux piémonts du massif de l’Étoile, dans le 14e arrondissement de Marseille, la Métropole a racheté un terrain de 350 hectares, anciennement dévolu à la promotion immobilière, avec le soutien de la Chambre d’Agriculture. Objectif : consacrer ces terres exclusivement à la production agricole.
Depuis un an, quatre jeunes maraîchers s’y sont installés pour produire et vendre des fruits et légumes en agriculture biologique. « Certains vont vendre leurs produits dans le centre-ville de Marseille, et c’est exactement ce que nous souhaitons : aider les agriculteurs pour alimenter directement les habitants des Bouches-du-Rhône sans être obligés d’importer ».
L’accès au foncier et l’aide à l’embauche
L’un d’entre eux, Rémy Van den Bussche, cultive une cinquantaine de variétés de légumes. Il les vend en circuit « extra-courts » à des restaurateurs du centre-ville, mais sa production n’est pour l’instant pas suffisante pour nourrir tout un quartier. « Je souhaite que la Métropole et le Département ne s’arrêtent pas là, il reste encore des terres qu’il faut préserver de l’urbanisation pour installer d’autres producteurs » a réaffirmé la Présidente.
Les agriculteurs font également face à la difficulté d’embaucher du personnel. Pour y remédier Martine Vassal espère « une écoute attentive du prochain ministre de l’Agriculture pour, pourquoi pas, créer une Zone franche urbaine sur le territoire. Pour Lucien Limousin, conseiller départemental délégué à l’Agriculture : Un bon repas aura toute sa vertu si l’agriculteur est justement rémunéré, si le consommateur est en bonne santé grâce à son alimentation, s’il retrouve le plaisir du goût et si en plus l’environnement est protégé. C’est tout l’objectif de ce dispositif de souveraineté alimentaire déployé par les collectivités ».