Les Paniers marseillais alimentent 1 500 familles marseillaises grâce à un réseau de 28 AMAP dans toute la ville. Depuis 2007, cette association permet aux habitants de consommer des produits bio et locaux, à prix abordables. Reportage.
Sur le cours Joseph Thierry (1er), en face des bars animés du quartier des Réformés, les bénévoles déchargent le camion de Loïc Péré, maraicher à Saint-Gilles dans le Gard. Une chorégraphie joyeuse se met en mouvement. Chacun à son poste déplie les tréteaux, installe les cagettes, et remplit les paniers des habitants.
Ce 15 octobre, les adhérents du Panier marseillais reçoivent six œufs frais de la ferme, un sac de champignons, quatre oignons, une grosse patate douce, un melon, deux concombres, six courgettes, deux poivrons, quatre tomates et des chèvres coulants. « Il y a de quoi bien manger », sourit Driss en remplissant son chariot.
Dans la queue, une adhérente depuis une dizaine d’années a pris conscience du bien manger, bio et local, à la naissance de sa fille. Elle aime l’idée de soutenir concrètement un agriculteur du coin et découvrir de nombreuses variétés comme les côtes de blettes ou le citron caviar « délicieux avec les crevettes », glisse-t-elle.

Des prix imbattables
Pour ce panier garnis de fruits et légumes, chaque famille prépaye 21 euros par semaine. Il faudra ajouter quelques euros pour les œufs, les champignons et le fromage de chèvre, produit par d’autres paysans. Cet argent atterrit ensuite directement dans la poche de chaque producteur.
Selon une étude des Paniers marseillais, réalisée avec Kedge en 2024, ces prix sont imbattables pour cette variété de produits. Un panier équivalent non bio coûtera 24,13 euros dans une enseigne de grande distribution, 33,7 euros dans un magasin spécialisé bio, et 22,15 euros sur le marché du coin.
Driss, administrateur de l’association, explique cette différence de prix grâce « au zéro intermédiaire » et de la distribution en circuit court. Chaque légume est en effet ramassé le matin même, du champ à l’assiette. En revanche, les consommateurs devront adapter leurs recettes en fonction des récoltes de Loïc.
Préserver le métier d’agriculteur
Ce fils d’agriculteur travaille différemment de son père. Depuis 20 ans, le paysan a ainsi transformé ses 15 hectares en bio pour vendre sa production dans une association pour le maintien de l’agriculture paysanne (AMAP). Alors que son père a toujours travaillé avec la grande distribution, parfois « à perte ».
Loïc Péré y trouve « le confort » de savoir que ses récoltes seront vendues « à un prix juste ». De son côté, les Paniers marseillais permettent aux agriculteurs de trouver des débouchés fiables et durables.
L’association revendique ainsi de se battre pour la préservation de terres agricoles en Provence, qui ont fondu depuis 50 ans, et de permettre aux jeunes agriculteurs de s’installer en les aidant à trouver du foncier.
Militer pour le droit à l’alimentation
« Nous avons aussi créé un fonds de solidarité pour avancer des sommes aux agriculteurs en difficulté », assure Driss. À l’inverse, les centres sociaux du quartier peuvent aussi rediriger les habitants en situation de précarité pour payer ces paniers trois euros pièce.
Cette distribution hebdomadaire permet notamment de créer du lien dans le quartier, entre les voisins et l’agriculteur qui les nourrit. Driss organise, plusieurs fois dans l’année, quelques apéros pour favoriser ce lien social et encourager la solidarité.
Forte de son réseau de 28 AMAP et de 1 500 familles adhérentes, l’association joue également « un rôle de lobbying » auprès des institutions pour le droit à l’alimentation et le projet de sécurité sociale de l’alimentation en étude à Marseille.