Depuis un an, le groupe Berto fait circuler un poids lourd de 26 tonnes à l’hydrogène vert dans la région. Alors que la filière peine à se structurer, son directeur Adrien Berto continue de défendre le nécessaire mix énergétique des entreprises grâce, en partie, au développement de l’hydrogène.
En juillet 2024, le groupe Berto, leader de la location de véhicules industriels en France, voulait frapper fort. Après deux ans de recherche et développement, l’entreprise provençale, basée à Avignon, a mis sur le marché le premier camion de 26 tonnes plateau grue alimenté à l’hydrogène, avec ses partenaires Point P. et Hyliko, une start-up spécialiste de la décarbonation des mobilités lourdes.
Depuis, ce poids lourd orange rétrofité, dont le moteur thermique a été remplacé par un moteur électrique, « roule tous les jours », se réjouit Adrien Berto, troisième génération à la tête de l’entreprise familiale qui réalise 600 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 5 500 collaborateurs.
Preuve que les clients adhèrent ? Ses principaux atouts étant l’autonomie de 450 kilomètres, le confort de conduite, et son énergie peu carbonée grâce à l’hydrogène vert fabriqué par électrolyse de l’eau (séparation des atomes d’hydrogène et de l’oxygène) avec de l’électricité provenant d’énergies renouvelables.
En revanche, la « rentabilité économique est encore loin d’être démontrée », admet Adrien Berto. En effet, comme peu de véhicule à hydrogène roulent sur le marché, ces camions coûtent encore cher à produire. L’approvisionnement en hydrogène vert reste aussi onéreux, avec un prix trois à quatre fois plus cher que le pétrole.
Un rétropédalage national sur l’hydrogène
En mars dernier, la France a également revu à la baisse sa stratégie de développement de l’hydrogène. L’objectif de 6,5 gigawatts (GW) de puissance d’électrolyse en France en 2030 a été ramené à 4,5 GW avec un plafonnement à 8 GW en 2035.
Selon les acteurs de la filière, regroupés au sein de France Hydrogène, ces nouveaux objectifs sont « insuffisants ». Ils réclament « un objectif clair de 8 GW de capacité en 2035 et non un plafonnement » pour « redonner de la confiance et de la visibilité aux industriels ».
Pour enfoncer le clou, un rapport très critique de la Cour des comptes a été publié début juin. Il révèle notamment l’attribution des centaines de millions d’aides publiques versées par l’État pour le développement de la filière, notamment dans le transport routier, alors que la technologie hydrogène a pris beaucoup de retard.
Ce document estime en effet que cette technologie est obsolète face à l’essor des batteries électriques « dont la technologie est plus avancée », ajoute Adrien Berto.
Continuer à innover
Mais Adrien Berto, comme d’autres industriels, continue de croire à la nécessité d’innover dans cette technologie. La recherche avance notamment vers une nouvelle compression de l’hydrogène pour doubler l’autonomie et ainsi passer à 800 kilomètres pour un poids lourd.
Le but ultime de l’entreprise serait désormais d’accéder à l’hydrogène ‘’super vert’’ qui selon elle, produirait un bilan négatif en carbone grâce à de la biomasse (matière organique d’origine végétale).
La direction de Berto vient d’achever son parcours de neuf mois à la Convention des entreprises du climat (CEC) pour faire évoluer la décarbonation du transport. « On va continuer à innover car on veut rester optimiste, promet Adrien Berto. On sent que d’autres entreprises ont des convictions ».