L’usine Saint-Louis Sucre accueille des tournages depuis le rachat d’une partie du site par Provence Studios. Le site va aussi accueillir un musée, des formations aux métiers du cinéma… et un data center pour se muer en « studios de cinéma 2.0 » d’ici 2029.
Les lettres de l’usine Saint-Louis Sucre dominent le quartier Saint-Louis (15e) depuis 1857. Cette raffinerie de sucre, proche de l’ancien silo du port de Marseille bientôt transformé en data center par Digital Realty, a cessé son activité en 2015. Elle emploie encore quelques salariés pour assurer une production de sucre liquide.
En 2022, un spécialiste de la reconversion de friches industrielles, Brownfields, a racheté les 11 hectares du site pour déployer deux activités. D’un côté, une base logistique de 6,5 hectares pour La Poste. De l’autre, 4,5 hectares rachetés par Provence Studios pour installer des studios de cinéma, complémentaires à ceux de Martigues.
Depuis quelques mois, certains espaces sont déjà mis à disposition. Les productions de la série Pax Massilia d’Olivier Marchal ou encore la série télévisée Mercato sur TF1 (arrêtée depuis) y ont installé leurs bureaux lors des tournages. Et le film KO d’Antoine Blossier, actuellement sur Netflix, a également été tourné en partie dans l’usine.

Des bureaux de production, stockage, décors…
« On a remis un gros coup de propre dans certains bâtiments. Aujourd’hui, on a des bureaux de production, un lieu de stockage, des ateliers pour les décors, mais aussi des parkings », énumère Micke Ristorcelli, responsable du projet et associé d’Olivier Marchetti, fondateur de Provence Studios.
Si la place vient à manquer, les équipes renvoient leurs clients à la Cinémabase, une plateforme dédiée à la confection de décors de films, séries, clips et publicités, quelques mètres plus au sud, boulevard du Capitaine Gèze (14e).
Géré par l’association de techniciens du cinéma ARTS, cet outil logistique est le premier projet du volet cinéma du plan Marseille en Grand lancé pour assurer une proximité avec les lieux de tournages marseillais.
Cinq studios dont un prêt-à-tourner
À terme, le site de Saint-Louis comptera cinq studios « adaptés à l’activité de tournages à Marseille ». Contrairement aux immenses studios de Martigues, ceux de Marseille serviront davantage de « studios d’appoint ». Par exemple, Pax Massilia qui tourne une grande partie des scènes en extérieur, a des besoins spécifiques comme le tournage d’un accident de voiture.
Il y aura donc un studio de 1 500 m2, deux de 750 m2 , puis deux de 800 m2 dont un sera consacré aux écoles et l’autre sera un studio dit prêt-à-tourner. C’est-à-dire avec un décor mis à disposition, comme un hôpital, un tribunal ou une morgue.
Ces studios pourront être utilisés par les étudiants de la région pour s’exercer. Ils accueilleront des écoles et organismes de formation dans le cinéma, comme Kourtrajmé, l’académie Moovida, la Satis et Provence Campus, dans l’idée de « créer des synergies avec les productions », espère Micke Ristorcelli.
Dans ce sens, un auditorium proposera des masterclass pour « valoriser tous les métiers du cinéma ». Mais aussi dans le but d’inspirer les jeunes. « Je veux qu’on donne des perspectives aux jeunes des quartiers Nord de la ville », ajoute l’entrepreneur né dans une des cités voisines, à la Savine, dans le 15e arrondissement.
Un musée du cinéma dans les cartons
Pour réaliser ces nombreux projets, Provence Studios a longuement travaillé sur son modèle économique. Car, bien que les studios aient tiré le gros lot avec les 26 millions d’euros de l’appel à projets « La grande fabrique de l’image » du CNC et France 2030, ils doivent « attester d’un modèle économique viable » pour décaisser cette aide.
Dans le projet, un data center devrait ainsi être construit pour équilibrer le modèle. Les données des tournages pourront être stockées en sécurité dans « les studios 2.0 » avant d’être envoyées ailleurs dans le monde. L’utilisation de l’intelligence artificielle sur les tournages pourra aussi alimenter le centre de données.
Micke annonce également qu’un projet de musée du cinéma est en train d’émerger. « On s’est aperçu qu’il y avait une forte appétence pour les gens à visiter des studios », confie le responsable. On pourrait donc y découvrir la voiture de Taxi, des costumes de Gaulois et de Romains, ou des décors de Jurassik Park.
Travaux échelonnés jusqu’en 2029 à Saint-Louis Sucre
Pour aboutir à ce musée, une étude des flux est impérative. Car les visites devront cohabiter avec des tournages confidentiels, comme ceux de Netflix. Une étude d’impact environnemental est aussi obligatoire pour que cet ancien site industriel accueille du public.
En parallèle, Provence Studios a obtenu les autorisations pour démolir les bâtiments trop vétustes ou pollués pour être conservés. Les démolitions devraient être achevées début 2026 avant d’obtenir le permis de construire. « On ne bloquera pas le permis car on veut que ce projet se fasse », assure Jean-Marc Coppola (PC), adjoint à la Culture de Marseille.
Les travaux se feront ensuite « petit à petit » d’un bâtiment à l’autre pour assurer la progression de l’activité jusqu’en 2029, avec l’architecte marseillais Renaud Tarrazi de Map Architectes en chef d’orchestre, et tenter de redonner son lustre d’antan à cette usine emblématique du nord de la ville.