Depuis 2016, l’entreprise Eranova travaille sur la fabrication de plastique biosourcé, conçu à partir d’algues vertes proliférant autour de l’Étang de Berre. Avec la construction de sa nouvelle usine, elle prévoit, à terme, d’en générer 15 à 20 000 tonnes, comme substitut au plastique traditionnel.

Pallier au désordre sanitaire et environnemental en valorisant les déchets. Telle est l’idée de l’entreprise Eranova qui cherche aujourd’hui à développer la filière de la macro-algue en fabriquant du plastique biosourcé. Les algues échouées et récupérées sur les berges de l’Étang de Berre, sont en effet en passe de devenir une nouvelle ressource pour la fabrication de résine recyclable et compostable.

En 2019, la prolifération d’algues vertes sur l’étang de Berre avait généré de vives tensions sur le territoire, celles-ci pouvant être à l’origine d’intoxication. En effet, si elles ne sont pas ramassées dans les 36h, ces espèces marines peuvent entraîner des dégagements d’hydrogène sulfuré (H2S), émanant des gaz nauséabonds et toxiques.

Une plaie, en somme, que les collectivités ont eu bien du mal à contenir, en délimitant notamment des périmètres de sécurité de 30 mètres autour de ces échouages, selon les recommandations de l’Anses.

, Une usine va produire du plastique avec les algues échouées de l’Étang de Berre, Made in Marseille

99% de la biomasse valorisés

Cette prolifération est due à la concentration de nitrates dans l’étang qui arrivent par la centrale EDF, principale source d’apports d’azote (plus de 50 %). Une situation sanitaire dont les dirigeants d’Eranova, Philippe Michon et Philippe Lavoisier, comptent bien profiter avec une technologie brevetée qui permettrait de valoriser 99% de la biomasse.

« On est sur une nouvelle génération de polymères qui va utiliser une partie biosourcée issue des algues, nous explique en détails Philippe Michon, co-fondateur d’Eranova. Les municipalités ont le devoir de les collecter et nous les fournissent. De notre côté, nous allons les mettre en bassin, sur une unité de production. Pour le moment, nous réalisons cela à Palavas-les-Flots, en location sur un site de l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer). Vendredi, nous avons d’ailleurs clôturé la levée de fonds avec divers industriels de la région. Nous allons ainsi pouvoir lancer la construction de notre usine à Port-Saint-Louis-du-Rhône, fin octobre ou début novembre ».

 

Car le dossier est sur les rails depuis 2016, alors que les deux entrepreneurs décident conjointement de mêler leur expertise dans le domaine de l’ingénierie plastique. Une approche vertueuse et respectueuse de l’environnement, oeuvrant pour l’industrie locale. « Finalement, on attaque le problème par plusieurs bouts : on utilise moins d’emballages et on dépollue les plages ».

L’entreprise, par son projet, est d’ailleurs labellisée Programme d’Investissement d’Avenir de l’ADEME 2017, et est soutenue par TOTAL TDR, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et la BPI.

Objectif : 20 000 tonnes de plastique biosourcé en 2022

C’est donc dans les bassins que se développent ces algues, dont la culture double tous les 4-5 jours. Une prolifération permettant un rendement 20 fois supérieur au rendement des cultures terrestres, comme celles du blé. « Les algues se reproduisent d’elles-même, continue le directeur. Le procédé consiste à les stresser, les priver de nutriments en modifiant leur métabolisme. Ainsi, elles s’enrichissent en sucre et en amidon. Par la suite, nous extrayons cet amidon, nous nous chargeons de fabriquer la résine dont nous avons produit 4 familles, puis nous la vendons à des transformateurs pour qu’il soit transformé en sacs, gobelets ou emballages ».

350 millions de tonnes de plastique sont produites dans le monde à ce jour. Un nombre important et dix types de plastique différents qui sont pour l’heure difficilement remplaçables par de nouveaux procédés. Cependant, à Palavas-les-Flots, plusieurs tonnes ont déjà été produites depuis le début de l’année 2019. A terme, l’entreprise vise à produire 20 000 tonnes de plastique biosourcé dans le courant 2021-2022. Un beau pari qui ouvre la voie vers une consommation globalement plus respectueuse de notre environnement.

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